Ses rapports avec la France, ses liens avec le capitaine Sanogo et avec l’armée, la question du Mouvement national de libération de l’Azawad... Le chef du Rassemblement pour le Mali, Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), s’est confié à Jeune Afrique.
Toujours se méfier du chat qui sommeille. El Hadj Ibrahim Boubacar Keïta, 68 ans, a la courtoisie pateline et les manières policées d’un latiniste distingué nourri aux meilleures études : Janson-de-Sailly, la Sorbonne, le CNRS. Mais à Koutiala, sa ville natale, entre les champs de coton et le stade chinois, les génies nocturnes n’ont, dit-on, rien de docile. D’où l’impression quelque peu féline qui se dégage du personnage, particulièrement de son regard. Si la patte est de velours, les griffes sont toujours aussi acérées.
« Kankeletigui » (« l’homme qui n’a qu’une parole »), ainsi que l’appellent en bambara ses partisans, ou encore « le châtelain de Sebenikoro », du nom de ce quartier de la commune IV de Bamako où il a établi sa résidence, est un vrai animal politique. Considéré par tous les observateurs comme l’un des deux ou trois favoris (avec Soumaïla Cissé et Modibo Sidibé) de la prochaine élection présidentielle, IBK est tombé un jour de 1992 dans la calebasse d’un maître-queux en la matière : Alpha Oumar Konaré. Ce dernier en fera successivement son directeur de campagne, son conseiller diplomatique, son porte-parole, son ambassadeur, son ministre des Affaires étrangères, puis son Premier ministre pendant six ans et dix jours. La séparation, inévitable quand l’ambition est là, survient le 14 février 2000. IBK démissionne et dévoile aussitôt le projet de sa vie : il sera président.
Cataclysme