Des arrestations arbitraires, des viols ou tentatives de viols sur des femmes, des enlèvements d’animaux, des vols de biens et des incendies causés par des gaz lacrymogènes et des arrestations massives des ressortissants, dont un vieillard de 86 ans, détenus à la prison de Kayes avant d’être transférés à Bafoulabé… la liste des dégâts causés par les militaires de la garde nationale dans la commune rurale de Konsinka, ce 20 décembre 2018, est loin d’être exhaustive.
On en sait un plus désormais sur les violences perpétrées par un détachement de la garde nationale dans la commune de Konsinga, ce 19 décembre 2018. Dans une lettre du chef de village de Kersingnané, Mahamadou KEBE, en date du 5 janvier dernier, au président de la république, différents intervenants dressent la liste des dégâts commis et l’ampleur et le bilan des violences perpétrées par les forces de sécurité commises par le gouverneur de Kayes. Suite à une visite contestée de M. Baye KONATE, gouverneur de la région de Kayes, qui voulait coute que coute réhabiliter le conseil communal contesté par les populations, des éléments de la garde républicaine ont été envoyés par le chef de l’exécutif régional pour mater tous les opposants, majoritaires.
« Le gouverneur n’est pas passé par quatre chemins. Il nous a ordonné de remettre les clés à Tamassa KEBE, pour que ce dernier reprenne service. Pire, il prévient que cette décision est venue des plus hautes autorités nationales et que les habitants de la commune en récolteront les conséquences s’ils s’avisaient de contester cette décision », nous a expliqué M. Mahamadou Kagny KEBE, un ressortissant de ladite commune. Face au refus catégorique des populations de céder à ce qu’ils appellent ‘’le chantage’’ du gouverneur, ce dernier a mis sa menace en exécution. Ainsi, le 20 décembre 2018, la petite ville de Kersigané, chef-lieu de ladite commune reçoit la visite de 250 militaires, notamment de la garde nationale, selon les témoignages sur place. Comme pour exécuter une décision militaire, les agents se sont mis à casser et à incendier les domiciles des toutes personnes indexées comme contestant l’autorité du maire Tamassa Kébé.
L’opération tourne au désastre et l’on dénombre une perte de plus de 200 millions de nos francs, selon des témoignages d’habitants à Kersignané.
« Nos portes ont été défoncées pour emporter tous ce que s’y trouvent. Plusieurs millions de francs CFA et d’Euro, des métaux précieux, comme de l’or et de l’argent, ont disparu après le passage des forces de sécurité. Pire, ils ont emporté nos moutons et chèvres, dont une partie a été consommée sur place et le reste rempoté à Kayes », relate un témoin, s’appuyant sur une vidéo qu’il dit avoir réalisé sur place. Sur ces images, on peut apercevoir les douilles des gaz lacrymogènes et des éclats de balles dans les chambres à coucher, des écuries brulées, sans épargner des livres saints.
De sources concordantes, des vieux octogénaires ont été tabassés, dont certains sont toujours en détention au moment où nous mettions sous presse. Les personnes arrêtées au nombre de 95 ont été d’abord détenues à Kayes avant d’être transférés à Bafoulabé. Au moment où nous mettions sous presse, un ressortissant a informé que 35 ont été libérées vendredi 18 janvier 2019, dont des femmes et des mineurs.
« Chaque matin, on les fait sortir pour leur demander de reconnaitre Tamassa KEBE comme leur maire. Mais nos parents disent préférer la mort que de se laisser gouverner par ce maire. Ainsi, les gardes les insultes de la manière la plus grossière, avant de les faire retourner dans leurs cellules. Et gare à toute personne qui les apporte assistance dans la prison à Bafoulabé », nous a expliqué Mahamadou KONTE, la voix nouée par la colère.
Le cri de cœur des femmes
Pendant deux jours de violentes répressions sauvages des forces de sécurité dans la ville de Kersigané, les femmes et les enfants n’ont guère été épargnés et certaines ont subi des tentatives de viol.
« Ils venaient en groupuscule de quatre et de trois. Ils demandaient de passer à l’action, si tu refuses, ils te prenaient par quatre. Notre contrée n’avait jamais subi une humiliation pareille », a dit une femme leader de la commune rurale qui a voulu garder l’anonymat.
Actuellement, le chef-lieu de la commune rurale de Konsinka est sous le contrôle des agents de la garde nationale armés.
« Personne ne rentre et ne sort sans venir demander la permission aux militaires qui sont devenus des vrais maîtres de notre commune », a dit M. KEBE. Malgré toute cette tension du gouverneur, l’on reste formel à Konsinga : « Tamassa KEBE ne sera jamais notre maire ».
Quant au maire contesté, il bénéficie d’une garde rapprochée de quatre agents de la garde nationale.
Rappelons que depuis les affrontements sanglants de 2017 consécutifs à des mouvements de contestation du maire Tamassa KEBE de l’URD dans la commune rurale de Konsika, il y a eu de multiples démissions dans les rangs de son conseil communal.