Pour manque d’appui de l’Etat, la Société de production des aveugles du Mali (SOPRAM) vit des moments difficiles. Elle produit des craies qui ne sont pas écoulées. Et le soutien de l’Etat en faveur de la société par l’achat d’une certaine quantité par an ne se fait plus. Conséquence: la SOPRAM a plus de 50 000 boîtes de craies stockées depuis octobre.
«Nous fabriquons des craies de bonne qualité qui ne sont pas achetées par l’Etat»,se lamente le président de l’Union malienne des aveugles, Hadji BARRY, en référence à la Société de production des aveugles du Mali. Outre les craies, la SOPRAM fabrique également des serviettes. Selon Barry, la structure a été créée pour leur permettre de travailler et de subvenir à leurs besoins. Mais, cet objectif risque ne pas être atteint s’il n’y a pas l’accompagnement pérenne et conséquent de l’Etat dans l’achat de leurs produits.
«Auparavant, nous bénéficions chaque année d’un quota d’achat de nos craies à travers un marché dit de consolation de l’Etat (Ndlr, c’était un marché de gré à gré d’achat de craies entre la SOPRAM et le ministère de l’Education nationale pour aider la structure). On n’a plus ce soutien de l’Etat», regrette notre interlocuteur, d’un ton triste. A part la mairie du district de Bamako qui achète avec eux, chaque année, des craies d’une valeur de 7 millions de FCFA, ils reçoivent rarement des commandes des structures scolaires de l’Etat. Conséquence : plus de 50 000 boîtes de craies sont en stock dans les magasins depuis octobre dernier, précise le président de l’UMAV.
«Face à la situation, on a écrit au président de la République en 2018. Les instructions qu’il a données ne sont pas allées loin »,déplore-t-il. Il affirme avoir également écrit au ministère de l’Éducation nationale afin de bénéficier du ‘’marché de consolation’’. « Aucune de ces démarches n’a abouti »,s’indigne M. Barry.
Pourtant, l’argent de ce marché occupe une place importante dans le fonctionnement de la société. Il permet de garantir le salaire du personnel et de recruter d’autres personnes pour faire face à l’insuffisance de ressources humaines et de les éloigner de la mendicité.
Interpellé par nos soins, le chargé à la communication du ministère de l’Action humanitaire et du Développement social, Garibou Pérou a indiqué : « Notre département fait beaucoup pour aider cette unité de production de craies. D’ailleurs, dans le cadre du mois de la solidarité, le ministère (entendez le ministère en charge de la Solidarité, ndlr) a même acheté une grande quantité de craies avec la structure pour les distribuer dans des écoles ». M. Barry ne nie pourtant pas ces efforts de leur département de tutelle, mais ils se font rarement. Si c’était pérenne, « la somme allait nous permettre de subvenir à des charges (la ration alimentaire et autres dépenses) de 230 élèves qui sont internés dans le centre »,ajoute-t-il.
Quant à l’achat permanent des craies, M. Pérou a fait savoir que les responsables du département de l’Action humanitaire sont en train de voir avec leurs collègues de l’Education nationale des actions « pour pourvoir aider l’unité la SOPRAM avec l’achat de certaines quantités ».
Sur le sujet, Mahamane N. Maïga, responsable de la Direction administrative et financière de ministère de l’Education nationale, a indiqué que les commandes de craies du ministère se font sur la base d’un appel d’offres, sans se prononcer sur le fameux marché dit de consolation. Ainsi, toutes les commandes de craies obéissent à ce principe de passation de marché public.
Selon M. Barry, cela est regrettable parce que leur société ne bénéficie plus de certains avantages compte tenu de sa spécificité. Mais il pense que le problème s’explique par un « manque de volonté politique ».
«L’Etat ne peut prétendre lutter contre la mendicité et laisser une structure comme la société SOPRAM dans la détresse »,a indiqué le responsable de la structure, en signalant que contrairement à beaucoup d’autres personnes en situation de handicap, ils ont décidé de vivre à la sueur de leurs fronts.