Le recours à la grève est une revanche pour les administrateurs civils qui avaient dû abandonner leur grève illimitée à la veille de la présidentielle de juillet et août dernier. Les administrateurs civils font bloc derrière l’ancien gouverneur de Kayes qui serait arbitrairement relevé, selon eux. Ils sont soudés par un esprit de corps, depuis la mort de leurs camarades à Kidal en 2014. La grève pour protester contre la révocation de l’ancien gouverneur de Kayes est en réalité un rappel des engagements non respectés par le gouvernement.
Cette grève a d’ailleurs donné l’occasion aux responsables du syndicat des administrateurs civils de sortir le dossier des préfets et sous préfets assassinés à Kidal en 2014 lors de la visite ratée du Premier ministre d’alors. Selon les syndicalistes, les familles et proches des victimes de ce drame sont sans assistance plusieurs années après les faits, alors que les parents d’autres ont victimes n‘ont pas connu pareille situation.
C’est encore le gouvernement qui est pointé du doigt par les administrateurs civils dans la façon dont est gérée la crise des otages. La famille d’un des leurs enlevé par des hommes armés est dans le désarroi total, abandonnée par les autorités. A cela s’ajoutent les difficultés des sous-préfets affectés dans les zones d’insécurité sans avoir les moyens de leur mission rendue difficile par la présence des groupes armés.
Dans ce contexte, relever le gouverneur de Kayes est devenu un casus bellis pour les administrateurs civils dont les griefs contre le gouvernement sont beaucoup plus nombreux. Ousmane Christian Diarra, responsable d’un des syndicats, ne veut pas servir sous les ordres d’un agent assermenté après le remplacement du gouverneur de Kayes par un officier de la police.
Le message des syndicalistes est clair: « administrateurs civils ou rien!» Au-delà des faits récents, les administrateurs civils s’estiment être des laissés pour compte de la démocratie. La réduction de leurs pouvoirs pendant les dernières décennies a créé un malaise dans cette profession qui est au contact direct des populations partout sur le territoire national et qui connait les difficultés du pays profond.
Hors, depuis le drame subi par leurs confrères à Kidal en 2014, les syndicalistes ont juré fidélité à leur profession. L’heure du sacrifice est révolue pour ces hommes qui en ont gros sur le cœur à cause de la légèreté avec laquelle les politiques gèrent leurs carrières au moment où les défis sécuritaires dépassent leurs moyens.
Le sentiment le plus partagé par les administrateurs civils maliens est que l’attitude du gouvernement face à la mort de leurs camarades indique que la vie d’un administrateur ne vaut rien. Qui de plus normal qu’ils soient tous unis comme un seul homme pour défendre une décision politique qui aurait pu passer sans bruit en temps normal.