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Mali: Mahmoud Dicko, l’imam qui ne cache pas son influence (PORTRAIT)
Publié le dimanche 10 fevrier 2019  |  AFP
Cérémonie
© aBamako.com par Androuicha
Cérémonie de signature de l`accord de paix d`Alger
Bamako, le 15 mai 2015 au CICB. Le Gouvernement malien et les groupes rebelles du nord ont procédé en présence de nombreux chefs d`Etats africains et de la médiation internationale à la signature du document de paix issu du processus d`Alger. (Photo Mahmoud DICKO, imam et président du Haut Conseil Islamique du Mali)
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Bamako - L'imam Mahmoud Dicko, qui avec un autre leader religieux a rempli dimanche un stade de 60.000 places à Bamako, est un farouche défenseur des "valeurs traditionnelles" qui a souvent montré sa capacité à faire plier le pouvoir.

Né près de Tombouctou (nord-ouest) il y a 64 ans, l'imam Dicko incarne dans le pays, face au rite malékite dominant au Maghreb et en Afrique de l'Ouest, plus ouvert, la tendance inspirée par la doctrine wahhabite, en vigueur en Arabie saoudite, où il a poursuivi sa formation théologique, entamée dans la "ville aux 333 saints".

Un positionnement qu'il assume sans complexe. "Si être rigoriste pour vous, c'est aimer la vérité, condamner ces choses qui vont contre nos valeurs sociétales, alors j'accepte, je suis rigoriste", a récemment déclaré à l'AFP cet homme à la courte barbe grise, président depuis 2008 du Haut conseil islamique du Mali (HCIM).

"Faire de la politique politicienne ne m'intéresse pas. Mais je suis citoyen de mon pays. Ce n'est pas parce que je suis un religieux que je n'aurai pas de prise de position", a confié M. Dicko, rentré au Mali pour se rapprocher de sa mère, à qui il a rendu visite tous les matins jusqu'à son
décès il y a quelques jours, affirme-t-il.
Depuis une dizaine d'années, il ne s'est pas privé de donner son avis, devenant l'un des hommes les plus influents du pays.
Il acquiert une stature nationale en 2009 en menant la fronde, avec notamment le chérif de la localité de Nioro du Sahel, près de la frontière mauritanienne, Bouyé Haïdara, un dirigeant religieux musulman très respecté et très influent, contre un nouveau Code de la famille qui accordait davantage de droits aux femmes. Le gouvernement avait revu sa copie.

Lorsque le nord du Mali tombe aux mains des jihadistes en mars-avril 2012 il obtient grâce à ses relations avec certains de leurs dirigeants, comme l'ex-chef rebelle touareg Iyad Ag Ghaly, la libération de 161 militaires maliens et organise à Bamako de grands meetings pour la paix.

Mais lorsque la France prend en janvier 2013 l'initiative d'une intervention militaire internationale pour les en chasser, il approuve l'opération.

- Bons offices -

S'il dénonce les exactions des jihadistes, son credo reste la réconciliation et la main tendue. En témoignent sa présence, aux côtés d'autres dignitaires religieux, en 2015, à la signature de l'accord de paix au Mali, ou en 2017 à la conférence d'entente nationale prévue par cet accord,
qui avait notamment recommandé l'ouverture de négociations avec des chefs jihadistes maliens.

Bien que sa tentative d'obtenir un cessez-le-feu d'Iyad Ag Ghaly en 2016 n'ait finalement pas abouti, il fait figure d'interlocuteur de premier plan. En 2017, le gouvernement lui confie ainsi une mission de bons offices pour mettre fin aux violences entre groupes armés et communautés rivales dans le nord et le centre du pays.

En 2015, ses propos sur des attentats récents, dont celui du Radisson Blu de Bamako le 20 novembre 2015 (20 morts), évoquant une "punition divine" liée à l'adoption des moeurs occidentales font polémique.

En 2017, l'ex-professeur d'arabe --"très strict", selon un de ses anciens étudiants-- s'est insurgé contre une promesse du ministre de la Justice de faire adopter une loi interdisant l'excision, poussant le ministre à se rétracter.

Il est revenu sur le devant de la scène en décembre 2018, en prenant la tête de la mobilisation contre un projet de manuel scolaire d'éducation sexuelle, conçu avec l'appui financier des Pays-Bas, prônant une approche tolérante de la question de l'homosexualité, taboue au Mali.

Dénonçant "un texte qui veut enseigner l'homosexualité aux enfants à
l'école", ses opposants ont obtenu l'abandon du projet, officialisé par le
président Ibrahim Boubacar Keïta lors de ses voeux de Nouvel an.
Pour son meeting de dimanche, l'imam Dicko s'est offert le luxe de refuser
l'aide financière de 75.000 euros proposée par le gouvernement, qui aurait
selon lui "vidé de sa substance" le rassemblement, co-parrainé par le chérif
de Nioro.
L'événement a valeur d'avertissement pour le président malien, avec qui le
chef religieux entretient des relations en dents de scie. Pour sortir d'une
"situation qui conduit à l'abîme", le Mali a "besoin d'une refondation
authentique basée sur nos valeurs sociétales et religieuses", a-t-il déclaré.
sd-siu/sst/sba
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