"Le maïs au Mali est devenue une filière stratégique, la culture la plus prisée", estime Siriman Sakho, conseiller à l'Assemblée permanente des Chambres d'agriculture du Mali, chargé du projet d'accroissement de la productivité agricole (Papam). "En 1960, on cultivait le maïs uniquement comme champs de case et la production nationale était de 50 000 tonnes (t). En 2019, on est à 3 650 000 t en maïs jaune et blanc, mais surtout du maïs jaune", a-t-il précisé à CommodAfrica, jeudi dernier, lors du Salon international de l'agriculture (SIA) à Paris. Le maïs représente 35% environ des 10 millions de tonnes (Mt) de production céréalière du pays, aux côtés du mil, fonio, sorgho ou encore du riz.
Un dynamisme confirmé par Oumoun Oumoun Coulibaly, directrice adjointe de l'entreprise privé semencière Faso Kaba créée en 2007 par sa mère. La maïs représente 60% de la production de la société qui propose des variétés OPV et hybrides, avec des ventes qui progressent annuellement de 5 à 15%.
"Parmi les produits céréaliers phares au Mali, c'est le maïs qui est le plus dynamique", souligne-t-elle. "C'est une culture traditionnelle, en maïs jaune et blanc. Les Maliens l'utilisent pour la consommation humaine, mais de façon croissante, pour l'alimentation animale avec le développement de l'aviculture, la pisciculture, l'élevage du bétail. Mais surtout les volailles. Actuellement, 50 à 60% de la production nationale de maïs va à la consommation humaine et le reste, de façon croissante, à celle animale. C'est vraiment un débouché actuellement."
@ CommodAfrica
"Les semoules infantiles sont aussi un créneau porteur", précise Siriman Sakho. "Les gens font leur propre farine de maïs pour leurs enfants. C'est le meilleur moyen maintenant pour ceux qui veulent assurer la sécurité alimentaire de la population."
Les rendements oscillent entre 6 t/ha pour le variétés conventionnelles, à 8-11 t/ha pour les variétés hybrides, selon les deux spécialistes.
Le challenge : l'utilisation des semences hybrides
L'utilisation par les agriculteurs des variétés de semences hybrides sont l'un des principaux challenges de la filière. "Il existe une concurrence entre les semences produites au niveau local et les semences hybrides", souligne le responsable des Chambres d'agriculture. "S'agissant des semences hybrides mises sur le marché, il y a tout un protocole car les paysans ne sont pas habitués à n'utiliser qu'une seule fois des semences, puis à les jeter. Car les semences hybrides donnent un grand rendement mais ne peuvent être réutilisées. Donc on est en train de former les gens à l'utilisation de ces semences hybrides pour avoir plus de productivité mais avoir aussi un mécanisme pour remplacer ces semences."
Des semences hybrides qui ne sont pas l'alpha et l'oméga de la société Faso Kaba. "L'Etat subventionne l'achat d'engrais mais aussi le petit et grand matériel de culture. L'Etat subventionne les semences dont, en premier, le maïs. Au début, c'était uniquement le maïs hybride mais nous sommes en train de négocier pour l'achat du maïs conventionnel aussi", précise Oumoun Oumoun Coulibaly.
Notons que lors de l’atelier national de synthèse des ateliers régionaux sur le Programme de subvention des intrants agricoles au Mali, organisé mi-janvier par le ministère de l’Agriculture, le mécanisme de distribution et de ventes des intrants avait été au cœur des débats. Le ministre Nango Dembélé avait rappelé que 15% du budget national allait à l'agriculture, proposant de réorienter les subventions des intrants agricoles. "Aujourd’hui, le Mali dispose d’un réseau fortement étoffé de fournisseurs d’engrais et de semences avec deux grandes usines de production d’engrais minéraux et une dizaine de grossistes importateurs et plus de 2 000 agro dealers", avait-il expliqué, avait rapporté Malijet.co. Les participants à l'atelier avaient, pour leur part, suggérer une réorientation de la subvention en intégrant les semences hybrides de mil/sorgho, de riz et de fonio et de réserver 5% du budget de la subvention pour l’appui-conseil et l'intégration dans la subvention des cultures de pomme de terre, pois sucré et échalote. Notre confrère n'a pas mentionné le maïs.
Les deux autres défis de la filière maïs sont l'organisation de l'interprofession sur la base d'un contrat plan avec l'Etat, avec le soutien de la Cedeao à travers l'Uemoa, précise Siriman Sakho, mais aussi la conservation du maïs que ce soit sous forme de stockage ou de sa transformation.