Aucun qualificatif ne serait approprié à la situation qui prévaut au centre du Mali, si ce n’est l’horreur. Rarement, un conflit à caractère ethnico-communautaire n’a causé autant de morts et de dégâts que celui que connait la région de Mopti au Mali. En effet, le 23 mars, soit moins d’une semaine seulement après l’attaque du camp de Dioura, l’opinion nationale et internationale a appris avec consternation et stupéfaction une attaque d’une ampleur inouïe faisant près de 200 morts. Après ces deux attaques abjectes, le décompte macabre dans le centre avoisine les mille morts pendant ces trois dernières années. Comment les deux communautés incriminées dans ce conflit, à savoir les Peuls et les Dogons, qui ont cohabité pendant des siècles, pourraient-ils arriver à une telle horreur ?
Pour rappel, le brusque regain de tension qui a abouti au massacre en masse et sans discernement, a eu lieu après l’horrible attaque du camp militaire de Dioura, faisant près d’une centaine de morts. Comme une sorte de réplique, c’est seulement six jours après cette attaque, et paraphrasant Alphonse de Lamartine dans son célèbre poème intitulé « le Lac », le temps a suspendu son vol, cette fois-ci pas pour que les amoureux savourent sa clémence, mais pour être témoin de l’un des massacres les plus abominables perpétrés à Ogossagou. Le samedi 23 mars 2019 sera désormais l’une des dates les plus funestes dans l’histoire du Mali. A l’annonce de la nouvelle, l’émotion fut grande et l’horreur incommensurable. A qui alors la faute ? Pourquoi avons-nous assisté à l’instrumentalisation de deux communautés qui ont pourtant vécu en parfaite symbiose ensemble depuis la nuit des temps ?
Evidemment, la première responsabilité est à attribuer aux gouvernants, eux dont la mission régalienne est la préservation de l’intégrité du territoire, du caractère républicain et laïc de l’Etat et surtout la protection des personnes et de leurs biens. Aujourd’hui, ces trois vertus qui fondent toute République moderne sont mises à rudes épreuves au Mali.
Le Président de la République, IBK, après le dépôt de la gerbe de fleurs au monument des martyrs, le mardi 26 mars, à l’occasion du 28ème anniversaire de l’avènement de la démocratie au Mali, a reconnu à demi-mot la grande part de responsabilité de l’Etat, par son absence. Avant d’appeler à une union sacrée autour du Mali pour faire face aux multiples défis qui touchent jusqu’aux fondements de la République. C’est pourquoi, en tant que chef suprême des armées, il a procédé à un réaménagement au sein du commandement et donné ordre à l’armée d’intervenir dans les minutes qui suivraient les alertes venant de n’importe quel endroit du Mali. Les décisions de limogeage de la hiérarchie militaire ont été qualifiées de mesurettes par son opposition, qui a d’ailleurs demandé le départ du Gouvernement. Ces mesures suffisent-elles pour endiguer ce cancer ? Pas sûr, car d’autres attaques ont été perpétrées dans certaines localités du centre, après la tuerie en masse.
Après la responsabilité clairement établie des gouvernants, tous les observateurs de la scène politique malienne s’accordent à dire que ce qui est arrivé au Mali aurait été planifié par la France pour assouvir son dessein machiavélique. Aujourd’hui, elle est en passe d’atteindre son objectif, celui de morceler le Mali, en se fondant sur deux raisons majeures. La première raison est la faiblesse de l’Etat malien a assuré la sécurité des personnes et de leurs biens sur le vaste territoire, la seconde raison est son incapacité à assurer le minimum vital aux populations du nord au sud d’est en Ouest.
La troisième responsabilité incombe aux communautés elles–mêmes ; qui deviennent véritablement les dindons de la farce. Peuls et Dogons qui ont vécu côte à côte et en parfaite complémentarité, ont accepté de se laisser manipuler, en ravivant les vieilles rancœurs entre éleveurs et agriculteurs.