Mardi 9 avril, les habitants du quartier secteur II de Sevaré se sont réveillés dans la douleur. L’émoi était total et la scène horrible. Araba Sidibé, âgée de 13 ans, élève en 6ème année à l’école Boukary Wologuème de Sevaré, fille de Djary et de Fatoumata Tamboura, s’est donnée la mort par suicide, avec son foulard, le bout attaché à la barre de traverse de la toiture de la véranda de son domicile parental et l’autre accroché et serré à son coup, la tête sous le choc, penchée vers l’épaule droite. Pourquoi et comment elle est-elle arrivée à s’écourter la vie de cette manière ?
La première à vivre cette scène macabre est celle qui partageait, ses biens, sa vie avec Araba : sa grand-mère.
En raison de la chaleur qui sévit actuellement, dans la famille Sidibé, à Sevaré secteur II, à quelques encablures du commissariat de police, les uns et les autres dorment dans la cour. L’élève Araba Sidibé très collée à sa grand-mère dort avec cette dernière sous la véranda.
C’est d’ailleurs elle qui prépare et occupe en première la couchette, avant d’être rejointe par sa ‘’Mémé adorée’’. Ce mardi tôt le matin, comme tous les jours d’ailleurs, lorsque la grand-mère s’est réveillée pour faire ses ablutions afin d’accomplir son devoir religieux (la prière du Fajr) elle n’en croyait pas ses yeux, au moment même où elle ressortait de la chambre avec son bouillard. Un étrange corps était suspendu entre le plafond de la véranda et le sol.
Pour bien distinguer ce qui obstruait le passage, la vieille dame fut obligée de sortir dans la cour afin de profiter de la lumière de la lueur de l’aube qui se projetait sur ce colis pendu à partir d’un foulard rougeâtre. La scène faisait jeter le froid dans le dos. Oui, c’est le corps sans vie de la petite Araba ! Une adorable fille, chouchoutée par tout le monde, inséparable de sa grande mère et de son père (tailleur de son état).
Sans autre forme de procès, la grand-mère s’est mise à crier au secours. Ses sanglots ont porté fruit, car les autres membres de la famille se sont tous rués vers la véranda, mais c’était trop tard. La petite Araba parée dans son beau page wax rouge (complet) avait déjà tourné le dos à ce monde des vivants.
« Ce n’est pas vrai ! Pourquoi Araba ? » tel est le cri qui accompagnait les chaudes larmes qui coulaient sur tous les visages. La même question continue de donner du tournis aux agents de police du commissariat de police de Sevaré, sous la houlette du costaud officier de police, le commissaire divisionnaire Mamby Traoré. Lesquels ont été dépêchés sur les lieux dès les premiers instants de la découverte de la scène macabre.
Pourquoi l’adolescente s’est-elle suicidée ?
Une fois sur place, les limiers du commissariat de Sevaré, avec instruction du Procureur de la République près du Tribunal de Grande Instance de Mopti, ont fait recours à un médecin légiste pour venir constater le corps de la jeune Araba Sidibé. Les premiers résultats du diagnostic du médecin légiste sont sans contestes : aucune lésion visible, ni de trace d’agression ou de viol sur le corps de la défunte. Il ne peut s’agir que d’un cas de mort suite à un acte de suicide volontaire par pendaison. Pour tirer au clair les causes de ce suicide une enquête a été ouverte sous l’égide du Tribunal de Grande Instance de Mopti.
Entre temps, le corps de Araba Sidibé a été remis à ses parents pour l’inhumation. Les obsèques ont eu lieu, mardi dans l’après-midi au cimetière de Sevaré dans une grande tristesse. Le lendemain, la police de Sevaré a rouvert le dossier pour passer à l’interrogatoire des proches parents et camarades de classe de la défunte.
En effet, dans un cas de suicide, conformément au code pénal, la justice à l’obligation de faire des investigations afin de confirmer ou d’infirmer les causes assimilables au délit de provocation au suicide. C’est dans cet ordre d’idées que le Tribunal de Mopti avec le concours de la police de Sevaré a décidé d’ouvrir une enquête.
Une paire de chaussure…
Des premières informations recueillies auprès des sujets écoutés, il ressort que la défunte n’avait aucun antécédent ni avec un membre de sa famille encore moins avec ses camarades de classe ou de quartier.
La seule raison qui est restée dans les mémoires est le fait que 24 heures avant de se donner la mort, la petite Araba Sidibé avait sollicité sa grand-mère pour que cette dernière puisse l’acheter une paire de chaussures. Lorsqu’elle n’a pas reçu de réponse favorable auprès d’elle, Araba s’est dirigée vers son Papa, toujours avec la même demande. « Je lui ai promis d’acheter la paire le lendemain à cause du fait que je n’avais pas d’argent sur moi. Sans rien dire de plus, elle est partie » a témoigné Djary Sidibé à la police, la gorge nouée, les yeux rouges.
Au regard de ces révélations, tout laisse à croire que l’adolescente en avait marre de la situation de l’extrême précarité dans laquelle elle vivait avec sa famille. Pour donc alléger les charges de ses parents et ne plus continuer à vivre dans ce monde de vanités, le seul sort qui la semblait propice était de retourner au bon Dieu, à la fleur de l’âge. A 13 ans, elle a choisi de mourir sans déranger que de vivre sans profiter de la vie. « La mort est la dernière parole du destin » disait un penseur. Dors en paix Araba !