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Trousseau de mariage d’aujourd’hui : Fanfaronnade et démesure
Publié le vendredi 26 avril 2019  |  L’Essor
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Le mariage est l’union sacrée qui unit deux familles, deux sociétés et même deux communautés. Il joue un rôle important dans notre pays. C’est le socle de la vie familiale.

Le trousseau de mariage est une exigence sociale. Au fil du temps, la folie des grandeurs a opéré des dégâts dans le cœur et l’esprit des futurs mariés. Certaines fiancées et leurs mères ont imposé des dépenses lourdes et extravagantes au fiancé et aux parents du futur beau-fils. La gourmandise de certaines belles familles dégrade les rapports sociaux qui consacrent le mariage dans le Mali actuel.

La collecte des éléments du trousseau occupe une place importante dans la préparation du mariage. Elle suscite un engouement devenu un phénomène culturel. Il varie d’une ère, d’une culture ou d’une ethnie à une autre. Les parents s’échinent à offrir à leur fille des meubles, des ustensiles pour vivre confortablement dans son futur foyer. Le sociologue, Dr Aly Tounkara, rappelle que le matériel était insignifiant dans la perception culturelle de la vie quotidienne chez nous. Le Malien était préoccupé à inculquer des valeurs à sa fille pour vivre en harmonie avec sa belle famille et son environnement. « Le trousseau de mariage se constituait dans la simplicité et la sobriété. La famille de la mariée fournissait ce trousseau selon le marquage culturel et environnemental de la mariée », a expliqué le Dr Aly Tounkara. Il comprenait des tissus traditionnels si la fiancée venait d’un milieu où le coton est la culture principale, ou des têtes d’animaux si la mariée est issue d’un milieu d’éleveurs. Aucun esprit matérialiste n’apparaissait. Tous les objets collectés traduisaient un certain symbolisme aux yeux de la société. Le futur mari n’était en aucun cas concerné par une quelconque contribution au financement du trousseau.

Aujourd’hui, la réalité est tout autre. La pratique traditionnelle a changé d’objectif. De nos jours, ce rite connaît de sérieuses mutations. La femme est en déphasage avec les exigences du mariage. « La maman dont la fille doit se marier est plus soucieuse de taper dans l’œil des voisins, des parents », a déclaré Dr Aly Tounkara.

Le trousseau volumineux de mariage est devenu une obligation dans les mariages. Les mères, les tantes, les filles et même les pères font souvent l’impossible pour fournir le maximum d’objets rutilants lors de la cérémonie. « Au-delà de la dot qui est de 15 000 Fcfa (certains continuent de toujours payer 10 000 Fcfa) pour les filles, certains parents n’hésitent plus à faire pression sur leur gendre pour acquérir un trousseau très cher sous peine du report de la date du mariage, voire l’annulation pure et simple ». à défaut d’avoir beaucoup de tasses et de nombreux tissus, les parents et la nouvelle mariée s’exposent à l’humiliation. Et pourtant, les religieux sont unanimes sur la question : le trousseau n’est pas obligatoire. Pour débarrasser les Maliens de l’obligation de collecter un trousseau de mariage, l’artiste Maïmouna Dembélé vient de créer l’association « Hami Ban Kan ». Elle va dérouler un programme de sensibilisation pour l’abandon total de cette pratique, source de tension dans nos foyers (Voir l’Essor du 25 mars 2019). De l’avis du Dr Tounkara, la famille de la mariée cherche comment impressionner la belle famille et le voisinage et n’agit plus par nécessité, mais veut imposer l’image de la belle réussite qu’elle ne mérite pas. La mère de la fiancée adopte brutalement un comportement qui la déshonore. Le trousseau n’est pas réuniseulement dans les villes. La déviation sociale affecte aussi les campagnes.

Peu soucieuses des valeurs culturelles. La hantise d’impressionner le public le jour de la collecte, pousse beaucoup de filles rurales à choisir l’exode dans la ville. Les aventurières deviennent des « bonnes » à tout faire dans les familles. Elles économisent l’argent nécessaire à l’achat du trousseau. Ainsi, les jeunes filles sont peu soucieuses des valeurs culturelles.

Leur motivation est de ne pas paraître misérable devant leurs belles familles. Elles imposent une image erronée d’elles. D’autres louent même des tasses et autres ustensiles de cuisine, voire des objets d’ornement juste le temps d’une présentation de leur trousseau de mariage. Malheureusement, ces pratiques ostentatoires ont acquis droit de cité dans notre pays depuis quelque temps. Le Dr Aly Tounkara précise que les religions prônent la simplicité et dénoncent les dépenses inconsidérées. La vieille, Mme Coulibaly Tiha Diarra, estime que le trousseau de mariage a une grande valeur symbolique. Chaque membre de la famille souhaite donner un présent à la fille qui se marie. » En notre temps, donner sa fille en mariage suscitait de la fierté. La qualité ou la quantité des composants du trousseau de mariage signifiait peu. Attention à l’exagération ! » Cette vieille orthodoxe conseille de prendre l’exemple sur sa propre fille. Le jour de son mariage le trousseau de celle- ci comptait deux pagnes traditionnels, une paire de chaussures, quelques ustensiles de cuisine et quelques parures. Mme Coulibaly regrette qu’aujourd’hui, les mamans se permettent de fournir à leurs filles toutes sortes d’ustensiles de cuisine, des coupons de bazin riche, des morceaux de pagnes et de tissus de grande valeur. Des cérémonies folkloriques et grandioses sont organisées pour exposer ce trousseau, fruit d’une grande capacité financière. Mais, la réalité est que cette réputation est usurpée. Les voisins ne sont pas dupes. L’entêtement à réunir un trousseau riche et volumineux entraîne des conséquences fâcheuses. Le quotidien du futur couple est hypothéqué dès le départ dans la vie conjugale. Les difficultés de réunir le trousseau allongent la durée du célibat. Il décourage le marié, lorsque les moyens financiers exigés par la belle famille dépassent ses capacités.

A cela s’ajoute le manque de respect des beaux parents à l’égard d’une nouvelle mariée mal lotie. « Revenons au fondement de l’éducation familiale du terroir et à nos valeurs sociétales », a conclu le sociologue.

La présidente de l’association, « Hami Ban Kan » Maïmouna Dembélé, déplore le fait que chaque fois que le coût du mariage est élevé, l’amour diminue au sein du foyer. Convaincue que des dépenses inutiles sont à la base des mésententes entre l’épouse et son mari, Maïmouna Dembélé a décidé d’agir. Elle œuvre à sauver des mariages, à alléger les souffrances des parents pendant la préparation des trousseaux.

Anne Marie Kéïta
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