Du début du Ramadan à cette étape, plus rien ne semble aller chez les professionnelles de sexe, la plupart de leurs clients étant des fidèles musulmans. Dans les maquis-bars, cabarets et autres maisons closes à Bamako et environs, c’est quasiment un silence de cimetière qui y règne. Si la rareté de clients, exaspère les prostituées, il en est de même pour les propriétaires d’hôtels et bars chinois qui, eux, se plaignent également de la lenteur monotone et angoissante de leurs affaires. C’est donc une galère effroyable qui les persécute depuis l’amorce du mois, notamment, les prostituées qui, malgré la baisse des prix de leurs services, tirent le diable par la queue.
« Depuis que nous sommes entrés dans le mois de Ramadan, plus rien ne va, à part quelques rares clients qui nous rendent visite. Déjà, une semaine après le début du Ramadan, nous avons unanimement décidé de casser le prix d’une passe, allant ainsi jusqu’à en proposer la moitié aux potentiels clients. Mais jusque-là, rien n’a vraiment évolué et nous n’arrivons même plus à payer la location de nos chambres », a dit, Assanatou Diabira, travailleuse de sexe dans un bar au quartier Hippodrome de Bamako.
« Avant même le mois de Ramadan, nombreuses parmi nos collègues venant des zones périphériques de Bamako ainsi que les régions, ont plié bagage pour rentrer en famille et y rester jusqu’à la fin du mois de Ramadan. Certaines se sont temporairement converties dans d’autres petits métiers pour joindre les deux bouts. Mais nous qui n’avons autres options, avons été obligées de rester pour négocier les quelques clients qui viennent souvent vers nous », a-t-elle poursuivi d’une voix triste.
Le constat est pareil dans les hôtels et autres bars chinois habituellement bondés de clients. Dans le quartier Djicoroni de Bamako, seuls quelques bars de renom, arrivent, un tant soit peu, à s’en sortir, ne serait-ce que trouver de quoi subvenir aux charges du personnel. « Je pouvais facilement me faire un chiffre d’affaires de 200.000 francs en une seule nuit dans la location de mes chambres de passe. Mais depuis l’entame du Ramadan, même pour avoir 25000 francs, il faudrait peut-être attendre les week-ends », a déclaré un propriétaire de bar chinois, qui se dit également impatient de voir le mois de carême et son « cortège de galère » disparaître.
Pourtant, selon les témoignages recueillis, nombreux sont les hôtels, maisons closes et bars chinois qui ont refusé du monde pendant le dernier weekend ayant précédé le 1er jour du Ramadan. Plusieurs fidèles musulmans, jeunes et vieux confondus, se sont ainsi rendus en masse dans ces lieux de débauche pour se défouler à ciel ouvert. Cela, pour, disent-ils, « aborder le mois de jeun avec sérénité ». Car, au cours des 30 jours d’abstinence oblige, ajoutent-ils, le Bon Dieu ne tolérerait aucune dérive comportementale du croyant. Donc, il faudrait profiter pleinement du dernier weekend avant le Ramadan, pour « bien se décharger la vessie ».
Pour les travailleuses de sexe d’origine anglophone et autres prostituées saisonnières qui s’exhibent dans des « lieux stratégiques » de Bamako, l’heure n’est vraiment pas reluisante en ce mois de Ramadan. La nuit, c’est le plus souvent, la chasse effrénée aux clients dans plusieurs rues de la capitale malienne. Certaines même vont jusqu’à quémander des clients réfractaires pour que ceux-ci leur donnent de quoi s’acheter à manger. Aussi, la nature spirituelle de ce mois de Ramadan, a compétemment changé les allures festives ou ‘’VIP-istes’’ de la Rue Princesse de Bamako en Commune I, le lieu attitré des perversions les plus immondes.
« La première semaine après la fin du Ramadan, est généralement très rentable, car, nous retrouvons enfin nos clients et les activités redémarrent fluidement», a affirmé cette autre prostituée visiblement impatiente de voir son négoce retrouver son rythme habituel après le Ramadan. Mais de quels clients ces prostituées nous parlent-elles au juste ? Est-ce ceux parmi ces mêmes individus qui jeunent et remplissent les mosquées lors du mois de carême ? Je laisse, à vous-mêmes, le soin d’y répondre !
Modibo Kane DIALLO