« Ses premières victimes, dans cette grande zone d’Afrique de l’ouest, sont les Africains eux-mêmes. »
Un nouveau carnage s’est produit dans la nuit de dimanche à lundi dans le village de Sobane-Kou, où vivent des cultivateurs de la communauté dogon du Mali. Le dernier bilan disponible lundi soir fait état de 95 victimes, massacrées tandis que leur village était incendié et rasé. Les survivants et les autorités désignent des coupables : des éleveurs nomades appartenant à la communauté des Peuls, auxquels les opposent des rivalités ancestrales. Sans qu’il soit possible à ce stade d’établir un lien direct entre les deux affaires, un village peul avait précédemment été détruit le 23 mars à Ogossagou, l’attaque tuant 160 personnes.
Les observateurs notent que les tensions intra-communautaires sévissent avec une particulière gravité depuis 2015 au Mali, depuis que le prédicateur djihadiste Sobane-Kou, recrutant surtout chez les Peuls, a exacerbé les crises entre ces derniers d’une part, et d’autre part les Dogons et les Bambaras. Ce dernier épisode montre que la situation au Sahel est très loin d’être stabilisée. Ce serait sans doute pire si les militaires français n’étaient pas intervenus en 2013, l’opération Barkhane comptant aujourd’hui 4 500 hommes et celle de la Minusma (ONU) plus de 15 000.
Force est de constater que depuis le début de l’intervention française, la situation n’est pas stabilisée, l’ensemble de la région saharo-sahélienne demeurant infestée par la gangrène djihadiste. Les groupes radicaux subissent des pertes considérables, mais en infligent encore davantage, sans cesse !
La solution ne viendra pas des troupes étrangères censées empêcher que le djihadisme prolifère. Ses premières victimes, dans cette grande zone d’Afrique de l’ouest, sont les Africains eux-mêmes. Et ceux qui régleront les problèmes sont également les Africains eux-mêmes. Les pays riches ont beau dépenser des milliards d’euros, armant les forces de l’union militaire du G5 Sahel et finançant des projets de développement, rien ne semble vouloir bouger. Les chefs des États locaux exigent toujours plus de subsides étrangers, qui finissent souvent dans leurs poches ou celles de leurs amis. Mais où sont les solutions politiques, les efforts de dialogue, l’appel aux talents régionaux pour la faire sortir de cette crise majeure ?