En réaction à la volonté du gouvernement de proroger le mandat de la 5e législature jusqu’en mai 2020, les partis politiques, mouvements et associations membres de la Coalition des forces patriotiques (Cofop) s’opposent et proposent la mise en place d’une assemblée constituante. Les enjeux, les défis et le contexte actuel exigent, selon la Coalition, une nouvelle configuration de la législature actuelle.
La décision du gouvernement de proroger d’un an le mandat des députés est loin de faire l’unanimité. Des organisations de la société civile et certains partis politiques et regroupements politiques expriment leur désaccord. Parmi eux, la Cofop. Le week-end dernier, la question était au centre d’un débat. Les échanges ont porté sur la constitution du 25 février 1992 et la nécessité d’une constituante. Selon la Coalition, l’engagement s’explique du fait que depuis 2012, le Mali a connu l’une des crises les plus graves de son histoire récente. « Cette crise est multidimensionnelle, politique, sécuritaire, économique, et institutionnelle. Malgré les efforts conjugués des différents acteurs politiques, sociaux et stratégiques, l’insécurité, l’instabilité politique et institutionnelle semblent devenir des facteurs déterminants empêchant le fonctionnement régulier de notre République », indique Dr Abdoulaye Amadou Sy, président de la conférence des présidents de la Cofop.
C’est une volonté de rester fidèle aux idéaux des victimes de la répression de mars 1991 à travers la Cofop, ajoute-t-il. C’est pourquoi, dit-il, « nous nous sommes organisés politiquement afin de s’impliquer de façon résolue dans la recherche de solutions aux défis qui assaillent notre pays. Les deux thématiques, notamment la constitution du 25 février 1992 et la constituante ont pour but de créer un espace de réflexion, d’échange, d’appropriation et d’harmonisation par les cadres politiques et associatifs de la Cofop sur la constitution du 25 février 1992, les enjeux et défis liés à l’opportunité d’une constituante. Elles ont permis d’harmoniser la position politique de la Cofop sur les enjeux, défis et opportunités pour une sortie définitive de la crise multidimensionnelle au Mali… »
Selon Mamadou Traoré, le plus jeune candidat de la présidentielle de 2018, les cadres ont renforcé leurs capacités de réflexion pour aborder les questions relatives au devenir de l’Assemblée nationale et surtout les visions politiques ont été harmonisées sur la constituante. « Ce qu’a abouti, dit-il, à la formulation de ses propositions pertinentes au gouvernement pour une sortie définitive de la crise multidimensionnelle qu’a connue notre pays depuis 2012 ».
Les participants de l’atelier étaient des cadres, militants, sympathisants, députés, ministres, et élus, des partis politiques et mouvements associatifs membres de la Cofop ainsi que Djinna Dogon, TabitalPulaku, les groupes armés, l’Untm, la Cstm, le SAM, le Sylima, la société civile, la diaspora, les transporteurs, la coordination des chefs de quartiers, le Recotrade, le Patronat, NDI, le Pocim, l’IRI, Cmdid, Eisa.
S’agissant des résolutions, la Coalition des forces patriotique (Cofop) rappelle qu’en fonction de la situation sociopolitique et sécuritaire du Mali et surtout la volonté du peuple de surmonter les difficultés que connait le pays, il est important de créer une constituante en lieu et place de l’Assemblée nationale actuelle. Cela permettra de procéder à la révision de la constitution après une large consultation du peuple souverain du Mali et nous nous engageons à soutenir ce processus.
Zan Diarra
COMMUNIQUE DE PRESSE N°003/06/2019
SUR LA PROROGATION DU MANDAT DES DEPUTES ET LA CONDUITE DU PROCESSUS DU DIALOGUE POLITIQUE INCLUSIF EN REPUBLIQUE DU MALI
Le Conseil extraordinaire des ministres, tenu le vendredi 07 juin 2019 a procédé à l’adoption d’un projet de loi organique relatif à la prorogation, une nouvelle fois, du mandat des députés à l’Assemblée nationale jusqu’au 02 mai 2020. Il faut rappeler que le mandat de ces derniers, arrivé à expiration le 31 décembre 2018, avait fait l’objet d’une prorogation antérieure jusqu’au 30 juin 2019 par la loi organique no-2018-067 du 06 décembre 2018, adoptée conformément à l’avis de la Cour constitutionnelle du 12 octobre 2018. Le Conseil a, par ailleurs, procédé à la désignation des personnalités chargées de conduire le dialogue politique inclusif.
La MOE-POCIM note le pas supplémentaire fait par le gouvernement, dans le sens de la décrispation du climat sociopolitique, à travers la mise en place enfin d’un collège de personnalités chargées du dialogue politique. Tout en attendant, dans les meilleurs délais, les termes de références détaillés et le lancement effectif d’un tel dialogue, elle se réjouit, par ailleurs, que la participation des femmes à la construction de la paix en République du Mali ait été valorisée et prise en compte par la présence d’une femme au sein de ce collège de trois personnalités.
La MOE-POCIM note cependant, relativement au nouveau projet de loi organique sur le mandat des députés, que celui-ci intervient sans consultation préalable de la Cour constitutionnelle comme cela avait été le cas les 10 septembre 2018 (par le premier ministre) et 10 octobre 2018 (par le président de l’Assemblée Nationale). La Mission s’interroge sur les raisons d’une telle rupture de forme. L’avis favorable du 12 octobre 2018 est-il un blanc-seing définitif et permanent accordé au gouvernement pour justifier tous les reports éventuels alors qu’il n’aura apporté, comme le soulignait le POCIM dans son précédent communiqué, aucune garantie concrète de sa volonté réelle de résorber les problèmes constitutifs de circonstances exceptionnelles et d’organiser à terme échu les élections législatives ?
La MOE POCIM constate le caractère illégitime et illégal de la prorogation du mandat des députés depuis 2018 et du mandat des conseillers nationaux depuis 2016. C’est dire que la préservation et la pérennisation des acquis démocratiques du 26 mars 1991 sont fortement entamées.
Le POCIM attire l’attention de l’opinion sur le risque qu’il y a pour le gouvernement de se prévaloir, à l’échéance du nouveau terme, de la persistance des circonstances exceptionnelles en vue de prendre un nouvel acte de prorogation, renforçant ainsi la crise institutionnelle actuelle.
Par conséquent, la MOE-POCIM exhorte les acteurs politiques et toutes les autres forces vives de la Nation à poursuivre les consultations en vue de la tenue effective et dans les plus brefs délais du dialogue politique inclusif. Elle invite, par ailleurs, le gouvernement à publier un Chronogramme explicite de toutes les activités préalables au rétablissement de la normalité institutionnelle à travers l’organisation, avant le 02 mai 2020, des élections législatives.
La MOE-POCIM demeure mobilisée et vigilante pour suivre l’évolution de la situation politique sur toute l’étendue du territoire national.
Bamako, le 10 juin 2019
Le Chef de mission
Ibrahima SANGHO