Où en est la force conjointe du G5 Sahel ? Alors que l’insécurité continue de s’étendre dans le centre du Mali, au nord et à l’est du Burkina, la force conjointe qui doit unir cinq pays de la sous-région dans la lutte contre le terrorisme ne semble pas réussir à voir le jour.
Son financement et son équipement restent encore très précaires. Des difficultés que déplore le général mauritanien Hanena ould Sidi, commandant de la force conjointe du G5 Sahel. Il répond aux questions de notre envoyée spéciale à Nema.
RFI : Général Hanena Ould Sidi, où en est l’opérationnalisation de la force conjointe du G5 Sahel ?
Hanena Ould Sidi : Après la certification opérée des bataillons, qui a commencé en octobre et qui a pris fin le 6 décembre 2018, l’opérationnalisation de la force a été estimée à 75 %. C’est un niveau qui a permis la reprise des opérations de janvier 2019 pour lancer un message fort sur la résilience de la force après l’attaque de son ancien PC de Sévaré.
En Février 2018, à la Conférence de Bruxelles, il y a eu des promesses de dons à hauteur de plusieurs centaines de millions d’euros pour la force conjointe. Aujourd’hui, où en est-on du décaissement de ces fonds et surtout de l’équipement de la force conjointe ?
De ces 100 millions accordés par l’Union européenne à la force, en deux tranches, 75 millions ont été dédiés à la force. Et la force a adressé à l’Union européenne un certain nombre de requêtes. Certaines requêtes ont été satisfaites, telles que celles concernant certains matériels, certaines primes. D’autres sont en cours de livraison, tel que la livraison des véhicules de commandement. Cela, c’est au plan de l’équipement.
Au plan des infrastructures, maintenant, concernant le PC provisoire, sa livraison est prévue début juillet. Au niveau du PC de Nbeiket Laouach, je pense que les travaux avancent. Et au niveau du PC des fuseaux « Est », au Tchad, deux reconnaissances ont été effectuées et la dernière est assez concluante.
Est-ce que tout cela va assez vite, selon vous ?
Je dis et ne cesserai de le répéter, qu’en tant que chef opérationnel, je considère que ces choses sont extrêmement lentes. Lentes, à tout point de vue. Maintenant, il est évoqué de l’autre côté que les procédures sont ainsi faites et que l’on ne peut pas accélérer les procédures.
Mais je continue à dire que les procédures sont lentes, le matériel n’arrive pas comme je l’aurais souhaité. Et ce retard handicape certaines capacités, qui sont très importantes à développer au niveau de la force pour pouvoir lutter plus longuement et plus efficacement contre les terroristes. La lutte contre le terrorisme est une affaire qui demande du temps et qui demande, aussi, de la réactivité par rapport aux événements.
Pourtant, la plupart des bailleurs, à commencer par Paris, affirment qu’il faut aller très vite. Qu’est-ce qui coince ?
Je sais tout simplement que la force a exprimé ses besoins, a exprimé ses besoins dans les délais, avec les spécifications techniques définies par la force. Maintenant, les financiers, les bailleurs de fonds, les fournisseurs, les administrateurs, ont leur procédure et c’est assez souvent cette lenteur de procédure qu’ils évoquent pour justifier la lenteur.
Malgré l’appel récent du Burkina aux Nations unies pour plus de solidarité internationale avec le Sahel, il n’y a toujours pas de mécanisme prévu de financement du G5 Sahel dans un cadre onusien. Est-ce que ce n’est pas un petit peu décourageant ?
C’est quelque chose à déplorer. Le G5 c’est d’abord une idée novatrice et une idée à saluer, puisque ces cinq pays ont décidé de mutualiser leurs efforts pour lutter contre un phénomène qui actuellement sévit dans le Sahel et qui est un phénomène mondial. Je pense que cette initiative devrait être plutôt saluée au niveau des Nations unies pour que la force du G5 ait un mandat fort et un financement pérenne. Quand je dis un mandat fort, c’est un mandat sous le chapitre 7. Et un financement pérenne, parce que la lutte contre le terrorisme a besoin de cela pour être bien menée.