Jeune étudiant malien à l’Université Paris 8 Vincennes (France), en master de création littéraire, Diadié Dembélé (22 ans) se joint désormais au cercle des jeunes écrivains. Son premier ouvrage est intitulé « Les tresses royales », un recueil de poèmes paru récemment chez l’Harmatan. Ce livre parle essentiellement des origines de l’auteur, issu de la lignée des Soninkés du Mali. Depuis l’Hexagone où il réside, nous avons échangé avec lui autour de son livre.
« L’écriture de ce livre est partie d’une longue réflexion sur mes origines et mon identité »
Aujourd’hui-Mali : Bonjour, pouvez-vous nous présenter votre recueil de poèmes « Les tresses royales » ?
Diadié Dembélé : « Les tresses royales » est un recueil composé essentiellement de poèmes à la gloire de mes ancêtres. Son écriture est partie d’une longue réflexion sur mes origines et mon identité. Je voulais retrouver mes racines en tant que Soninké de la diaspora, et jeune homme de ce siècle traversé par son million de problèmes. Le titre du livre « Les tresses royales » vient du mot « Toriden » en Soninké qui renvoie à la coiffe des seigneurs de guerre et aussi à l’intronisation d’un roi.
Dans votre ouvrage, vous faites la part belle à l’histoire des Soninkés dont vous êtes issu, qu’est qui a motivé ce choix ?
Ce choix est tout d’abord motivé par le brassage ethnique dont je suis le fruit. Mes ancêtres les plus proches sont originaires de Soroma dans l’actuel cercle de Bafoulabé. Ils n’étaient pas Soninké à l’origine. Mais par les relations de bon voisinage avec les Soninkés, il s’est opéré un mélange qui a fait de moi le Soninké que je suis aujourd’hui. C’est donc avec une fierté que je rends hommage à ce peuple vaillant et courageux.
Vous parlez également du royaume de Ségou… !
L’histoire de Ségou est indissociable de ces fameux Balanzans, arbres qui y poussent en abondance, qui incarnent non seulement le pouvoir et son exercice, mais les ruses qui jouent pour son maintien. Ceux qui ont regardé le film « Les rois de Ségou », inspiré de l’histoire de Ségou, ont vu avec quelle diplomatie agissaient les régnants et leurs courtisans pour maintenir la cohésion et l’entente au sein de leur royaume.
Quel message voulez-vous faire passer par le titre « Makari, pitié » ?
Makari ou Djondon est une danse traditionnelle qui renvoie aux captifs et aux descendants de captifs. Comme la plupart des sociétés mandingues, les Soninkés sont repartis en différentes castes dont celle des captifs et descendants de captifs. Ces derniers occupent le bas de l’échelle. Et même si l’esclavage a été officiellement aboli, il reste des reliques qui font des membres de cette caste des sortes d’intouchables. Le message que je souhaite transmettre est celui de la tolérance car peu importe que nous soyons des nobles, des Guésséré (généalogistes), des Tagué (Forgerons), des Garanké (cordonniers) ou des Komé (captifs), nous sommes tous humains.
Vous dédiez un poème à la récolte « africaine », « Le seigneur de la récolte »
La récolte est un moment de grâce. Qu’il s’agisse des Mianka, des Bambaras, des Malinkés, des Soussous ou des Wolofs, le plus riche des hommes est celui qui a le plus grand grenier.
Dans votre ouvrage, vous rendez hommage à Amadou Hampaté Bah…!
Amadou Hampaté Bah est à la littérature malienne ce qu’est Molière à la langue Française. Il a su défendre contre vents et marrées la tradition orale et porter haut la voix de sa légitimité.
Le titre « Soudan Niarela », un hommage au Mali ?
Oui. Le Mali a été un grand pays. Et nous, jeunes Maliens, devons être conscients de cela. Il ne s’agit de vivre dans un passé glorieux, mais de comprendre que l’histoire du Mali ne commence pas par la colonisation, tout comme celle de la France ne se résume pas à l’occupation allemande.
A travers votre poème « Champion des aigles », vous soutenez que : « Les guerriers n’ont pas de femmes, ils se marient avec la guerre » ?
Le décor est épique, certes. Mais le message s’adresse davantage aux femmes qui veulent épouser des hommes ambitieux. Elles doivent être prêtes à épouser le combat de leurs hommes, sinon c’est avec le combat que les hommes finiront par se marier.
« L’autre prophète », de qui s’agit-il ?
Il ne s’agit pas d’un prophète en particulier. Le poème cherche simplement la tolérance entre les différentes confessions. Que nous soyons animistes, chrétiens ou musulmans, nous adorons tous le même Dieu, et c’est l’essentiel.
Avez-vous d’autres projets d’écriture ?
Oui je travaille actuellement sur un projet de roman dans le cadre de mon master.
Quel est votre genre littéraire préféré et pourquoi ?
La poésie ! C’est vrai qu’elle a eu ses heures de gloire et qu’elle ne trône plus sur les autres genres. Mais, à mon avis, elle reste le seul genre capable de donner de la puissance et de la magie aux mots.
Quel sera votre mot de fin ?
Je remercie le journal Aujourd’hui-Mali pour cette interview et j’incite fortement mes frères et sœurs, jeunes comme moi, à s’intéresser à l’écriture. Parce que le monde a besoin d’entendre notre voix. Je tiens aussi à informer les lecteurs que le livre est disponible chez l’éditeur, L’Harmatan, chez la Fnac, sur Amazon et toutes les librairies en ligne.