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Centre du Mali : La détresse des populations… !
Publié le lundi 1 juillet 2019  |  L’aube
Attaque
© Autre presse par DR
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Le Centre du Mali, et la région de Mopti en particulier, est depuis plusieurs années touché par la violence. Les conflits intercommunautaires, le banditisme (vols de véhicule ou de bétail, attaques des forains) et les règlements de compte (assassinats ciblés, enlèvements) y sont de plus en plus fréquents. Conséquences ? Les cercles, villages et hameaux se vident de leurs populations…

Selon le rapport du Conseil Norvégien pour les réfugiés et ses partenaires, la flambée de la violence et l’intensification des opérations militaires dans le Nord et le Centre du Mali ont conduit à plus de 87 000 nouveaux déplacements de civils depuis le début de l’année 2019. «Face à l’exacerbation des conflits et l’intensification des opérations militaires dans le Nord et le Centre du pays, les déplacements de civils continuent d’augmenter tandis que nos capacités de réponse en tant qu’acteurs humanitaires s’affaiblissent», s’inquiète Prince K. Lumueno, Responsable du Programme Urgences pour le Conseil Norvégien pour les Refugies au Mali.

Depuis Janvier 2019, plus de 87,000 personnes ont été déplacées dans le Centre et le Nord du Mali (zone de départ et d’accueil), soit 71,000 personnes déplacées de plus qu’à la même période en 2018, d’après les chiffres enregistrés par les Mécanismes de Réponse Rapide (RRM) au Mali.

Ainsi, la région de Mopti (zone de départ et d’accueil) enregistre à elle-seule le nombre de plus de 15 000 personnes déplacées en raison de la recrudescence des conflits intercommunautaires depuis le début de l’année. Les opérations militaires menées au sud-ouest de Ménaka ont aussi provoqué, en partie, le déplacement de plus de 10 000 personnes depuis janvier 2019.

Toujours selon le même rapport, la recrudescence des incidents sécuritaires liés à la propagation des groupes armés, tels que par exemple les milices ou groupe d’auto défense, les groupes radicaux, l’augmentation de la criminalité ainsi que les opérations militaires rendent également difficile l’accès humanitaire, particulièrement dans les zones frontalières des pays membres du G5 Sahel.

Le Conseil Norvégien pour les Réfugiés et ses partenaires du Mécanisme de Réponse Rapide au Mali réitèrent leur inquiétude quant à l’impact humanitaire de la crise sur les populations déplacées. « Depuis plusieurs mois, des milliers de femmes, hommes, et enfants dans le besoin ne reçoivent toujours pas d’assistance. C’est actuellement le cas le long de la frontière entre le Mali et le Niger, au sud-ouest de Ménaka, dans la région du Gourma, au nord-ouest de Tombouctou, ou encore dans la bande frontalière Mali-Burkina Faso, comme dans les cercles de Koro et Bankass », indique Lumueno.

«Les civils paient un lourd tribut à l’insécurité grandissante. Depuis le début de l’année, plus de 400 civils ont été tués au Centre et au Nord du Mali. En comparaison, l’année 2018 avait enregistré un total de 287 civils tués», évoque Tidiane FALL, le directeur pays d’Action Contre la Faim au Mali…

Ces réfugiés dans leur propre pays !

En effet, des déplacés peulhs fuyants des violences qui s’intensifient dans le Centre ont trouvé refuge à Bamako. Disséminés dans plusieurs camps, notamment à Niamana, Faladié, Sénou… Celui de Faladié est au milieu d’une décharge d’ordures de Bamako et ses occupants vivent un véritable calvaire entre insalubrité et manque de moyens.

Partout des ordures, des enfants jouent sur les détritus, des femmes font la lessive et des chèvres paissent entourées par les ordures. Les tentes de fortunes qui forment le camp de Faladié, dans le centre de Bamako, sont elles-mêmes fabriquées à partir de déchets, des bouts de toiles et des restes de nattes. Plus loin, une procession de femmes et d’enfants qui n’ont d’yeux que pour un carton rempli de vivres… Le camp est installé sur un tas d’ordures. L’odeur est insupportable et il faut imaginer que ces déchets sont en permanence en train de brûler. D’ordinaire cette zone non-constructible en raison de sa proximité avec l’aéroport de Bamako n’est occupée qu’occasionnellement par des éleveurs de passage au marché au bétail de Faladié. Les habitants du camp sont des Peuls, qui ont fui les conflits intercommunautaires du centre du Mali. La violence des affrontements, fondés sur des litiges fonciers entre les éleveurs peuls et les agriculteurs dogons, s’y est intensifiée récemment.

« Ces déplacés viennent de la région de Mopti (Centre), ils ont commencé à arriver il y a six mois, mais cela s’est accéléré depuis le mois de décembre 2018. En ce moment à Faladié, il y avait 483 adultes et 203 enfants de moins de 15 ans », nous confiait Kola Cissé, un responsable d’association humanitaire qui s’occupe des déplacés. « Nous avons aujourd’hui plus de personnes dans ce camp et les gens continuent de venir, même le samedi dernier, nous avons reçu 60 personnes en provenance de Mima (cercle de Bankass) où ils ont fui les combats intercommunautaires. Comme la plupart des refugiés », explique M. Cissé. Pourquoi ce choix de s’installer au marché de bétail ? La plupart des déplacés ont un parent qui réside dans le parc, indique Kola Cissé.

Les femmes sont aussi en nombre dans ce camp, habillées en haillons, les yeux rivés dans le vide. Parmi elles, beaucoup sont enceintes en état avancé, et ont dû faire le trajet Koro-Bamako dans des conditions extrêmement difficiles. « L’équation était simple : soit on part, soit on meurt. Je n’ai plus de nouvelles de mon mari et de mon premier enfant, je ne sais s’ils sont vivants ou pas. Je suis venu avec mes trois enfants », raconte Assétou récemment venues au camp…



Situation précaire

Ici, les gens sont obligés de brûler les déchets pour diminuer un peu le volume mais le problème c’est qu’il très difficile d’éteindre un feu ici, il couve toujours quelque part. Il arrive que des tentes prennent feu et la fumée de ces ordures qui brûlent est dangereuse, toxique. Aussi, la fumée qui s’échappe des ordures s’invite directement dans les abris faits de plastiques, vieux sacs et tissus récupérés sur les tas d’ordures. N’ayant pas d’autres solutions, c’est sur les tas d’ordures également qu’ils font leurs besoins naturels. Le manque d’eau dans le camp accroît également les risques sanitaires. Ils passent des nuits et des jours sous des hangars en plastique déplorables.

Trois enfants ont perdu la vie L’accès à l’unique toilette du camp reste très difficile vu le nombre de plus en plus important de réfugiés. Ainsi, ces personnes qui ont tout perdu n’ont pas le moyen de s’offrir le luxe d’aller aux toilettes. Résultat : hommes, femmes et enfants, tous, se mettre à l’air libre pour se laver ou pour d’autres besoins… Des grincements de dents se font entendre parmi les personnes travaillant dans la zone, à cause de cette situation. « La nuit tombée, tu les verras sur les tas d’ordures déféquer. Allez constater derrière », raconte Issa, travaillant dans le marché à bétail, contigu au camp des déplacés.

Les déplacés du centre que nous avons rencontré sont partagés entre colère et espoir, Amadi Cissé, venus de Koro avec sa femme et ses trois enfants nous interpelle : « Vous faites toujours des vas et viens pour nous demander mais rien d’autres. Ici, nous avons faim, nous avons soif, nos enfants sont malades mais ça ne vous regarde pas. En plus, vous voulez profiter de nous pour monter des projets. On ne vous dira rien. Vous voyez vous-même tout », après ces paroles lancées avec hargne, il détourne son regard et s’enferme dans le mutisme.

«Peulh ici, Peulh, Songhay, Tamashek et Dogon cohabitent. Nous sommes tous les mêmes ici. Nous sentons tous la douleur de la même façon mais le gouvernement lui ne sait même pas que nous sommes ici », nous fait remarquer Amadou Diallo, qui fait office de porte-parole., il reconnait être allé voir le maire de la commune VI pour des explications. « A notre arrivée, par deux fois, des jeunes sont venus se présenter à nous de la part des autorités du quartier. Ils nous demandaient de leur payer pour chaque famille la somme de 3 000 francs pour notre installation et qu’on devait payer 1 000 franc par mois. Alors, nous avons effectué un déplacement à la mairie pour discuter avec le maire. Celui-là a mis à notre disposition trois policiers et ils n’ont plus été revus depuis».

Mohamed Sylla

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