L’audience de confirmation des charges contre Al-Hassan Ag Abdoul Aziz, l’ancien commissaire de la police d’Ansar Eddine à Tombouctou, s’est ouvert hier, lundi 8 juillet 2019, devant la Cour pénale internationale à La Haye. Al Hassan est accusé « de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité », commis lors de l’occupation de la ville par Ansar Dine et AQIM entre avril 2012 et janvier 2013.
Le mandat d’arrêt contre Al-Hassan Ag Abdoul Aziz a été délivré le 27 mars 2018. Transféré à la CPI le 31 mars 2018, il a fait sa première comparution le 4 avril 2018. Malien et âgé d’une quarantaine d’années, Al Hassan, est accusé par la Procureure Fatou Ben Souda, « d'avoir commis des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité à Tombouctou, Mali entre avril 2012 et janvier 2013. » Les charges qui pèsent contre lui, selon Ben Souda, sont représentatives de la criminalité et des persécutions subies par la population au cours de cette période. « Plus particulièrement, nous accusons M. Al Hassan d'être responsable des crimes contre l'humanité de persécutions pour des motifs religieux ou sexistes, viol et esclavage sexuel commis dans le contexte de mariages forcés, torture et autres actes inhumains causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l'intégrité physique ou à la santé physique ou mentale. », a expliqué, après le transfèrement de Al Hassan, la Procureure. Pour Ben Souda, Al Hassan serait également responsable des crimes de guerre de traitement cruel et torture, atteintes à la dignité de la personne sous la forme de traitements particulièrement humiliants et dégradants, viol et esclavage sexuel, attaques dirigées intentionnellement contre des bâtiments consacrés à la religion et des monuments historiques et condamnations prononcées sans qu'un jugement assorti des garanties judiciaires généralement reconnues comme indispensables n'ait été préalablement rendu par un tribunal régulièrement constitué.
Selon la FIDH et l'AMDH, ces audiences interviennent alors que l’ancien commissaire de la police islamique de Gao, Aliou Mahamane Touré, vient d’être libéré au Mali en dehors de tout cadre légal. Nos organisations, engagées dans la documentation des crimes commis à Tombouctou et dans les procédures contre Al Hassan et son groupe devant les tribunaux maliens, estiment qu’il y a suffisamment de preuves pour que les charges retenues contre Al Hassan devant la CPI soient confirmées et que le procès puisse commencer. « Ce nouveau chapitre judiciaire pourrait relancer les enquêtes et poursuites sur les crimes internationaux commis au Mali depuis la crise de 2012. », a déclaré, dans un communiqué, les deux organisations de défense des droits humains.
L’ouverture de l’audience de confirmation des charges contre Al-Hassan Ag Abdoul Aziz Ag Mohamed Ag Mahmoud à la CPI, poursuit la FIDH et l’AMDH, serait la seconde étape essentielle et prometteuse dans l’établissement de la vérité et de la justice pour les crimes commis durant l’occupation de la région de Tombouctou en 2012 / 2013, et la condamnation des responsables politiques et militaires y ayant fait régner la terreur. « Alors que l’affaire contre Al Mahdi et son aveu de culpabilité constituaient une reconnaissance historique du préjudice causé par Ansar Eddine au patrimoine culturel de Tombouctou, du Mali et du monde entier, l’affaire contre Al Hassan prend en compte la myriade de crimes commis par le groupe pour affirmer son pouvoir et son contrôle sur la population », selon Amal Nassar, représentante permanente de la FIDH auprès de la CPI.
La FIDH et l’AMDH expliquent que ces procédures à la CPI sont d’autant plus importantes que l’ancien Commissaire de la Police Islamique de Gao, Aliou Mahamane Touré, a été libéré le 17 février dernier en dehors de tout cadre légal, à l’issue de tractations sur des échanges de prisonniers. « Alors qu’Aliou Mahamane Touré, le seul djihadiste condamné au Mali à 10 ans de prison en août 2017, a été libéré en dehors de tout cadre légal, il y a quelques mois, l’ouverture du procès d’Al Hassan à la Haye est une excellente nouvelle », a indiqué Me Drissa Traoré, Vice-président de la FIDH.
«Nous espérons que les charges présentées par la Procureure seront confirmées par la Chambre préliminaire et qu’un procès pourra ainsi débuter rapidement, ouvrant la voie à d’autres poursuites à La Haye et surtout au Mali sur les crimes commises en 2012- 2013. Nous souhaitons que la poursuite des auteurs d’un échelon intermédiaire permette de remonter la chaîne de responsabilité jusqu’à la poursuite plus hauts responsables», espèrent la FIDH et l’AMDH.
Pour rappel, les juges de la Cour pénale internationale (CPI) ont condamné, en septembre 2016, à neuf ans de prison le djihadiste malien Ahmad Al Faqi Al Mahdi, l’ancien chef d’Ançar Eddine à Tombouctou, pour avoir détruit en 2012 des mausolées classés au patrimoine mondial de l’humanité à Tombouctou.