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Un coin de l’histoire du Mali : Les temps difficiles de la colonisation de Bamako par les français entre 1883 et 1893 (1ere partie)
Publié le vendredi 19 juillet 2019  |  Carrefour
Moussa
© AFP par FRANCOIS ROJON
Moussa Traoré
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Le 1er février 1883, l’objectif assigné dans les instructions du Vice-Amiral Cloue était atteint : nous étions installés à Bamako malgré que notre domaine se réduisait alors à un fortin d’où les hommes ne pouvaient sortir qu’au péril de leur vie. Sur le plan politique local, la situation à l’intérieur du village indigène Bamba kô était également très confuse. L’autorité du chef Bambara était contrebalancée par l’influence des maures installés là depuis de longues années et beaucoup plus entreprenants et riches que les vrais chefs du pays.

A l’extérieur, il y avait deux de nos rivaux dangereux : Samory et Ahmadou sultan de Ségou que nos succès n’avaient pas ébranlés. A peine arriver au fleuve Niger nous avons commencé à être édifier. Aux abords de Oyowayanko, qui constitue pendant longtemps la limite administrative ouest de la commune-mixte, une troupe évaluée à près de 3 000 hommes dirigée par Fabou, le frère de Samory, s’était installée et menaçait de couper les lignes de communication du poste par ses tentatives de soulèvement de l’important groupement des Béléris.

De son côté, Amadou, le Sultan de Ségou, nous menaçait par l’intermédiaire de Mountaga, commandant les Toucouleurs de Nioro. Borgnis-Desbordes a jugé qu’il était préférable de prévenir une attaque coordonnée de nos deux ennemis.

Lançant une colonne sous ordres du Capitaine Piétri contre les éléments de l’armée de Fabou, détachés pour nous isoler de Kita,Borgnis-Desbordes attaqua lui-même de front les sofas de Samory massés sur les rives du Oyowayanko. C’était le 2 avril 1883. La chaleur en cette saison est épuisante (40°) et la petite colonne harassée ne put abattre l’adversaire et elle a dut renoncer à la lutte.



Malgré cet échec, Fabou avait été fortement impressionné par le courage et l’ardeur des français et avait aussitôt entrepris de renforcer la défense de son camp. Dix jours plus tard, Borgnis-Desbordes était résolu à nouveau de forcer la victoire. Mais au lieu de s’engager dans une lutte de front contre un ennemi fortement palissade, il le contourna en traversant la rivière Oyowayanko au pied des collines. Fabou, surpris, n’a pu enrayer la panique qui gagna ses troupes. Cette manœuvre hardie avait dégagé Bamako dès lors.

Le succès du Lieutenant-Colonel Borgnis-Desbordes avait du même coup par cette victoire anéanti le village indigène de Bamako dirigé par Titi Niaré,ont assisté à ce succès également les commerçants Maures. La tâche de Borgnis-Desbordes s’achevait donc. Il quitta Bamako le 27 avril 1883. Auparavant il avait remis le commandement du fort au Capitaine Orisot qui a assuré l’intérim jusqu’à l’arrivée du titulaire désigné c’est-à-dire: le Capitaine Ruault de l’artillerie de Marine. La campagne militaire n’était cependant pas terminée, mais il fallait quand même organiser le poste et gagner la confiance des habitants, en un mot assurer la paix.Cette tâche fut réalisée malgré les incessants dangers menaçant de toutes parts l’influence française naissante. Rien n’illustre mieux cette période que la lecture du journal du poste de Bamako. Toutes les préoccupations du commandement y sont fidèlement reportées dans le détail de la tâche journalière. Rien n’est plus émouvant que ces feuilles jaunies par le temps où chaque ligne est le vivant témoignage de l’épopée de quelques français.

Alors que le 6 août 1884 : La première canonnière a été mise à flot sur le Niger. Elle a été utilisée dans les missions de surveillance sur le fleuve. Ce fait banal avait une importance considérable puisque cette canonnière nous permettait de surveiller tous les mouvements sur la rive droite du fleuve. Ahmadou ne s’y était pas trompé puisque très au courant de la construction de cette canonnière il avait préféré ne jamais en parler.



Dès 1884, une école s’ouvrait au poste : ‘’Modestement, en dehors des heures de service, un sous-officier ou un officier passait toujours de longs moments à jouer le rôle de l’instituteur’’ et cela en vu d’avoir des serviteurs locaux immédiatement.

Le ‘’5 septembre 1885 : fut la date d’arrivée d’un nommé FodiéHaïdara, enyé par KamanOulé, chef de Dialabala, village situé dans les environs de Tabou. Samoty, dit-il, se raproche de nous. Son intention au dire des guerriers qui sont venus rôder aux environs de Siby, était de venir attaquer Bamako’’.

Le 14 septembre 1885: Retour de Fente Nalaba. Cet émissaire des français est allé, dit-il, à Faraba et a vu Fabou, pour lui communiquer les nouvelles suivantes, ‘’les français ne désirent pas la guerre avec Samory, que celui-ci abandonne la rive gauche du Niger et ils vivront en paix avec lui. Si Samory veut la paix, il doit envoyer une députation au commandant de Bamako par contre s’il veut la guerre, les français sont prêts à cela. ‘’Fabou aurait répondu qu’il n’attendait que la fin de l’hivernage pour aller assiéger le fort de Bamako. Le commandant a mis le frère de Tiékoura en liberté, après lui avoir fait promettre que Tiékoura et lui s’emploieront à le renseigner sur les mouvements de Samory et de Fabou et engageront les villages Bambaras de la rive droite, qui veulent échapper au joug de Samory, à émigrer vers Bamako après la récolté’’.

C’est ainsi qu’en 1885, nous étions à Bamako à l’avant-garde de notre village conquis c’est-à-dire Bamako. Les pays qui entourent le poste sont certes placés dans notre zone d’influence mais la faiblesse des effectifs ne permettait pas d’entretenir par tout et d’une façon permanente notre autorité. Nous ne pouvions que vivre les mouvements de nos voisins, envoyer de temps à autre une colonne chargée de la surveillance et de la sécurité d’une région ou d’un lieu particulièrement menacé. Aussi nous nous sommes contentés de ne donner ici que les principales étapes de notre progression.



Entre 1886-1887 de Nyaminaà Siguiri toutes les agglomérations ont été occupées. Ces postes constituaient des points solides. Par les traités de Kéniéba-Koura et de Bissandougou, notre autorité s’est affirmée sur la rive droite du Niger.

La menace sur la zone Bamalen 1887 était réelle.Une convention a étésignée avec Aguibou par laquelle ses Etats devraient être placés sous notre protectorat.

En 1888 nous avons obtenu un protectorat sur les Etats de Tiéba que Samoryavoulu vainement s’attaché à cette agglomération de Sikasso.

En 1888-1889 : Une première compagnie d’Archinard a affirmé définitivement notre autorité sur les pays situés entre Kayes et Bamako entraînant du coup la rupture avec Ahmadou, le Sultan de Ségou.

Entre 1889-1890 : la deuxième campagne d’Archinard a été marquée par la prise de Ségou le 5 avril 1890, de Ouosébougoule 25 avril 1890 et Nioro le 1 janvier 1891.

Entre 1891-1893 : la troisième campagne s’est terminée par la fuite d’Ahmadou à Sokoto. En même temps, Samory était largement repoussé au sud : Kankan était occupée. Samory ne fut pris qu’en 1898par le capitaine Gouraud. Ces trois campagnes d’Archinard, l’ancien compagnon de Borgnis-Desbordes et constructeur du fort de Bamako terminaient la conquête du Soudan.

Telles sont, rapidement esquissées, les principales phases de la pacification. Ces pré-occupations militaires n’empêchaient pas que déjà à Bamako on pensait à la paix.

L’activité économique ne s’est pas ralentie et les dioulas (commerçants) comptaient sur notre protection. Cheveux, bœufs, ânes, sel, colas, moutons, constituaient les principales marchandises du commerce. Le cheval se vendait à 1 500 francs, le bœuf dix fois moins, la barre de sel 65 francs et la noix de colas 0,10 francs en avril 1886.

Dans le rapport du 20 février 1887, le commandant du poste écrivait :’’Au point de vue commercial, on peut constater le passage à Bamako d’un assez grand nombre de dioulas venant du nord et allant dans le Ouassoulou pour échanger chevaux et sel contre captifs’’.L’impôt qui était d’abord payé en nature se percevait assez facilement.

Ce fut en 1888 que des instructions ministérielles autorisèrent la perception d’une côte personnelle.Ainsi la vie s’organisait, malgré les menaces de Samory et d’Ahmadou. Combien de patience fallut-il à ces premiers français pour lutter contre l’insolence de nos administrées ? La population s’occupait peu du lendemain sachant que l’argent obtenu grâce aux corvées qui lui étaient imposées étaient satisfaits par leurs besoins quotidiens.

L’organisation territoriale n’était pas elle non plus négligée. On note ainsi dans le journal du fort à la date du 22 mars 1885 un compte rendu d’une affaire qui précise la règle générale à observer dans l’installation de nouveaux villages ou l’établissement de nouveaux habitants dans un village déjà existant. Les habitants de la rive droite qui sont venus s’établir à Salla seront sous les ordres de chef de ce village. Les habitants de Baguineda qui sous les ordres de Mori-Bâ sont venus former un village entre Dougouballa et Salla dépendaient de Titi, chef des Etats de Bamako.

Cette règle était applicable en général à tous les habitants qui s’établissaient dans un village déjà formé ou qui fondait un nouveau village. Cette règle a témoigné de notre volonté de préserver notre influence en donnant aux chefs coutumiers une autorité incontestable. Ce sont ces chefs qui furent partout d’ailleurs nos premiers auxiliaires dont les archives et récit de l’époque nous donnent quelques traits saisissants

(à suivre).

Source : Les archives de la colonisation
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