Les contradictions dans le fonctionnement de la démocratie, depuis son origine, continuent à prendre en otage les États démocratiques actuels. Des paradoxes qui susceptibles pourtant d’avoir des réponses adaptées.
Les moyens exploités pour la mise en œuvre de leurs politiques étant mauvais ; il va de soi que l’échec est leur sort. Dans la plupart des démocraties du monde et plus particulièrement au Mali, on entretient, volontairement, le peuple dans le mensonge. Cela, à travers tout d’abord la fixation de certains idéaux à atteindre et susceptible de faire régner le bonheur pour tout un agrégat d’individus réunis ayant des besoins riches et variés. Des idéaux qui ne sont d’ailleurs, pour la majeure partie des cas, que de la propagande politique. Comment faire le bonheur d’un peuple multiple sans risquer des soulèvements populaires juste quelques mois après l’investiture d’un nouveau chef ?
Faire le bonheur du multiple ?
Cette problématique a été longuement abordée par plusieurs penseurs de part et d’autre le monde. Les « dictatures », les « révoltes » dans nos démocraties ne sont que le corollaire de ces pratiques jugées, par certains, d’« historicistes », c’est-à-dire le comportement nous incitant à extrapoler le passé et le présent au futur en faisant espérer un paradis rêvé. On se rappelle que cela a constitué la démarche utilisée dans la plupart des révolutions que l’humanité a connues.
En 1789, contre « l’ancien régime » en France, nous savons que le souhait de découdre avec les inégalités sociales pour le bonheur commun a été au centre de toute la lutte pour l’instauration d’une démocratie égalitaire où la « souveraineté populaire » devrait exister. Mais où en est-on aujourd’hui en France ? Le peuple français est-il sans problèmes ? Plus besoin de le démontrer avec tous les mouvements sociaux qui pèsent sur la tête d’Emmanuel Macron.
La situation malienne en 2013 en est également un exemple assez illustratif de ce problème utopiste dans nos régimes démocratiques actuels. En effet, le président Ibrahim Boubacar Kéita a été plébiscité par tous les Maliens à cause de son discours et de son projet pour la sécurité nationale. Il a suffi de quelques mois pour voir les attentes déçues. Comme conséquence, l’aggravation de la crise sociale, politique et économique faisant des victimes dans tous les rangs.
C’est la majorité qui gouverne
Tous ces problèmes, que nous pouvons retrouver de part et d’autre dans nos pays démocratiques, relèvent juste du principe faisant de la démocratie le pouvoir de la majorité. Or, le paradoxe est que cette majorité, au centre de toutes les décisions politiques, peut également se tromper comme cela peut se constater à travers l’histoire de la démocratie athénienne, où des bavures incommensurables ont été commises par la démocratie sur la base de ce principe. « Les démocraties ne sont donc pas des souverainetés populaires, mais elles sont en premier lieu des institutions équipées pour se défendre contre toute forme de dictature. Elles ne permettent aucune domination à caractère dictatorial, aucune accumulation des pouvoirs, bien au contraire elles essayent de limiter le pouvoir de l’État », nous laisse entendre Karl Popper, penseur anglais du 20esiècle. Comme une maison en construction, quand le fondement est raté, c’est tout l’édifice qui risque de s’écrouler. Ainsi, les principes n’étant pas clairs, les finalités seront rarement heureuses. Beaucoup de décisions sont adoptées dans nos États, soi-disant qu’elles relèvent de la majorité, mais qui suscite pourtant des contestations dramatiques à la longue.
Le drame de la souveraineté populaire
Rappelons que ce problème du règne de la majorité a toujours été également au centre des préoccupations démocratiques puisqu’il remonte jusqu’à Périclès, inventeur de la démocratie, dans l’antiquité grecque. Celui-ci nous laissait entendre, rapporte l’historien Thucydide, que « Même si peu d’entre nous sont capables d’ébaucher un programme politique et de le mener à bien, nous sommes en revanche tous à même de l’évaluer ». Cependant, un paradoxe règne. On a fait croire au peuple qu’il est le véritable souverain capable d’agir, ipso facto, sur des décisions politiques afin de changer leur cours, sans se soucier, que se faisant, on accordait une « trop grande liberté au peuple ». Ces abus engendrent des conséquences innombrables pouvant conduire à la « Tyrannie » à travers la désinformation ou des discours pessimistes sur le sort du monde entier. Ce qui peut conduire également la jeunesse à emprunter de mauvaises voies susceptibles de conduire la nation dans le chaos.
Dans ces circonstances, nos autorités démocratiques échoueront toujours dans leur politique. Des échecs qui leur serviront, certes, de leçons, mais qui risquent d’entraver le progrès de toute la nation.
Le « paradoxe de la liberté »
L’autre raison de l’échec dans nos démocraties, c’est cette mauvaise compréhension du « paradoxe de la liberté ». À ce niveau, il faut comprendre que « trop de liberté » accordée au peuple nuit à la nation. Inversement, trop de libertés aux autorités mettent la liberté des citoyens « dans les fers ». C’est pourquoi il importe de limiter les libertés de tous les côtés afin que nul ne puisse nuire à l’autre. « Nous avons besoin de la liberté pour empêcher les abus de l’État, et nous avons besoin de l’État pour empêcher les abus de la liberté», expliquait Popper lors d’une conférence prononcée le 9 juin 1988 au Bayerischer Hof de Munich.
Cette situation constitue un grand problème dans la majeure partie des démocraties modernes où la liberté d’expression, de manifestation, d’information se trouve violée. Ce qui traduit la transformation de nos démocraties en « Oligarchie » de quelques hommes mauvais. Les hommes de médias se trouvent ainsi trainés devant les tribunaux ; les manifestants matés, le droit des femmes et des enfants mal considéré, etc.
Le protectionnisme de l’État, une nécessité
L’« État paternaliste » ou l’« État providence » ou encore le protectionnisme de l’État doit être une nécessité pour le règne d’une véritable démocratie, le développement et la lutte contre l’insécurité dans nos contrées. Certes, le bonheur est individuel puisque chaque citoyen a une source de bonheur différente de celle des autres, mais il importe que l’État soit présent pour empêcher les abus de liberté de la part de certains citoyens afin de rendre le vivre ensemble plus convivial. Pour ce faire, le rôle du peuple n’est pas à négliger dans l’évaluation des politiques gouvernementales.
Il faut également la mise en place d’institutions fortes pour contrecarrer non seulement toute forme de dictature, mais aussi de procéder au remplacement du piège « initiative du peuple » par l’option plus rationaliste de «jugement du peuple ». Cette procédure peut servir également de moyen à procéder au changement de leadership à la tête de nos États sans « effusion de sang ». Pour la réussite des politiques dans nos démocraties, il importe de développer la politique du dialogue.