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Interview exclusive du président de l’ADEPM, Dr Aboubacar Sidick Fomba : « Vous ne pouvez pas vouloir dialoguer et refuser d’introduire Iyad Ag Ghaly et Amadou Kouffa dans la discussion »
Publié le vendredi 26 juillet 2019  |  Le Pays
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Si le président de la République et son gouvernement écartent tout dialogue avec les djihadistes, d’autres hommes politiques maliens, dont le président de l’Alliance démocratique du peuple malien (ADEPM), Aboubacar Sidick Fomba, estiment qu’il faut forcément discuter avec tout le monde, y compris Iyad Ag Ghaly et Amadou Kouffa, pour sauver le Mali. C’est en tout cas ce  qu’il a déclaré, dans une interview qu’il nous a accordée, le mercredi dernier.  Cet opposant écarte également la révision constitutionnelle, la mise en œuvre de l’Accord d’Alger à l’état actuel, et l’Accord politique de gouvernance.
Le Pays : Quelle analyse faites-vous de la situation actuelle du Mali ?
Aboubacar Sidick Fomba :
La situation actuelle du Mali  est le résultat du mauvais système établi depuis l’avènement de la démocratie en 1992.  Cette démocratie,  qui avait pour objectif d’offrir le paradis au peuple malien, s’est transformée en un régime de kleptocratie, de montage et d’empilement institutionnel. Avec ce mauvais système, ils ont détruit la sécurité, le social, la santé, l’éducation …progressivement. Le président IBK,  qui a été élu pour résoudre les défis auxquels le Mali était confronté  n’a, non seulement, pas pu rien résoudre, mais il  a amplifié la situation. Reconnaissons qu’avant son arrivée au pouvoir, on avait le nord. Mais avec lui, en plus du nord, on a aussi perdu le centre du Mali. Le régime d’IBK a fait plus de morts que toutes les guerres que le Mali a connu. Ce qui est grave, ce régime a perdu toute crédibilité à cause de la corruption et  de  la délinquance financière. Ils (ceux qui sont aux affaires) ont bouffé des sous  des Maliens et de la communauté internationale. Et malheureusement, dans la continuité de ce système mafieux, ils ont signé un Accord politique de gouvernance pour berner le peuple.
Vous vous êtes opposé à cet Accord politique de gouvernance depuis sa signature. Quelles sont les  raisons ? 
Nous sommes contre cet Accord politique de gouvernance,  parce que c’est une arnaque,  une escroquerie, une manière de décrédibiliser l’homme politique. Cet Accord politique de gouvernance est un mépris pour la majorité présidentielle, l’EPM. Le président de la République, en difficultés, a laissé les 67 partis politiques de cette coalition pour aller prendre un Premier ministre qui n’est dans aucune formation politique. Et c’est ce Premier ministre qui garde le portefeuille de l’Économie et des finances comme s’il n’y a pas d’autres intellectuels au Mali. Mieux, nous nous opposons à cet Accord puisqu’il a été dit que les signataires seront d’accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger. Ce n’est pas tout, cet accord n’a d’autre objectif que la révision constitutionnelle. Pour nous, il est inutile d’organiser un dialogue si on ne doit pas discuter de la forme et du fond de l’Accord d’Alger. Vous ne pouvez  pas vouloir dialoguer et refuser d’introduire les Iyad Ag Ghaly et Amadou Kouffa  dans la discussion. La France  négocie avec les djihadistes pour libérer ses otages, pourquoi nous, Maliens,  ne devons-nous  pas négocier avec eux,   pour libérer notre pays de la domination ? C’est suite à tous ces manquements que nous avons dit que nous sommes contre toute arnaque sous forme de dialogue dont l’objectif n’est que de réviser la constitution.
Pourquoi vous traitez ce Dialogue politique inclusif d’une arnaque alors que beaucoup d’opposants sont prêts à y prendre part ?
Ce Dialogue politique inclusif n’a rien de vrai. Ce que nous voulons aujourd’hui, c’est une concertation nationale souveraine, parce que le président a été incapable, il est incapable et est incompétent. IBK a montré toutes ses milites. Mais malgré tout, par manque de volonté politique, il est en train de s’agripper  sur une révision de la constitution qui ne prévoit que la partition du Mali. Croyez-moi, 80% des fonctionnaires internationaux travaillant au Mali, au compte des Nations Unies, sont des Soudanais. Tout le monde sait ce qui s’est passé dans leur pays, le Soudan. Au Conseil de sécurité des Nations Unies, il a été dit que la Communauté internationale donne une valeur internationale à l’Accord d’Alger bien qu’il soit national. Là encore, c’est une autre arnaque. Si le Dialogue politique inclusif aboutit  à  la révision constitutionnelle, les résultats attendus seront : la réparation, par le Mali, de tous les dégâts intervenus au nord depuis 1960, la consécration de 40% du budget national aux régions du nord, cela pendant 20 ans.  L’accord prévoit une zone tampon qui sera formée par les cinq régions du nord, à savoir Gao, Tombouctou, Kidal, Taoudenit et Menaka. Pis, si nous partons sur cette base, 80% des militaires qui seront recrutés vont appartenir  à la CMA. Cet accord prévoit aussi des quotas pour des postes régaliens de l’État. C’est pourquoi je dis que le diagnostic de  l’Accord d’Alger est faux. La CMA est dans la partition du Mali. Ceux qui ont les armes aujourd’hui, leurs parents n’ont jamais combattu aux côtés du Mali pendant la pénétration coloniale, ils ont toujours été avec les blancs et ils sont jusqu’à présent avec eux.
Vous venez de claquer la porte de l’EPM. Qu’est-ce que vous reprochez à cette coalition de soutien à IBK ?
Je n’ai rien contre l’EPM en tant que tel. Cette coalition a été trahie par le président de la République. Elle doit prendre son courage pour combattre le président, elle-même. IBK a trahi le RPM, il a trahi les partis politiques de la majorité. Même étant dans la majorité présidentielle, notre parti, l’ADEPM a toujours défendu sa ligne. Nous avons, devant la conférence des présidents de l’EPM, dit que nous ne sommes ni pour la révision constitutionnelle ni pour la prorogation du mandat des députés encore moins pour l’Accord politique de gouvernance et l’Accord de défense militaire. La vérité est qu’IBK est pris en otage par la France .Je pense que dans cette situation, on doit refuser tous ses projets et demander une concertation nationale souveraine. La vérité, comme IBK veut qu’on la lui dise, c’est qu’il est pris en otage, il n’est plus lui-même. Nous avons un autre Ibrahim Boubacar Keita qui a une autre peau, un autre esprit, et qui n’a rien à avoir avec IBK qu’on a connu en 1994. Pour sauver IBK de cet otage,  il faut que la majorité présidentielle mette en échec ses projets, pas en lui demandant de démissionner, mais en le  maintenant  dans une posture du peuple. Nous allons former une force de résistance contre le complot contre le Mali et pour déjouer le complot des Nations Unies. Le complot est profond. Il faut donc jouer à la résistance. Enfin, je veux que dire que le dialogue pour lequel cette majorité s’engage ne soit une mise en scène.
Pour vous, le Dialogue politique inclusif va échouer ?
C’est un échec depuis le  départ. Le choix même est un échec, car nous n’avons pas besoin  d’un dialogue politique, mais d’un Dialogue national inclusif. On ne devrait pas mettre ce dialogue dans un projet politique. 
Réalisée par Boureima Guindo
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