Selon le dictionnaire petit Larousse, la corruption est l’action de corrompre, d’engager à agir contre son devoir, soudoyer, exemple corrompre un juge. Le pendant et la conséquence de la corruption est l’enrichissement illicite. L’enrichissement illicite peut se faire aussi indépendamment de sa fonction. On ne compte plus le nombre de séminaires, de conclaves, de colloques, consacrés à la corruption. Des spécialistes de tous les bords n’en finissent plus d’émerger sur la question. Le phénomène de la corruption existe sous tous les cieux, même aux Etats-Unis et en France. Mais dans ces pays la corruption est une exception et c’est connu : il est sévèrement puni.
Au Mali, la corruption est devenue une règle générale. Tout se paie, tout s’achète. Pour rentrer dans la Fonction publique, il faut payer ; dans l’armée, il faut payer ; dans la police, il faut payer ; dans la douane, il faut payer… Pour avoir gain de cause dans un procès, il faut payer. Pour diminuer ou augmenter l’âge sur les documents administratifs, il suffit tout simplement de payer, etc…
La corruption est devenue un phénomène de société qui a la vie dure au Mali et souvent c’est la famille même qui prend l’initiative. Aussi, a-t-on l’habitude d’entendre, lors de la nomination d’un membre de la famille à une haute charge de l’Etat : “C’est maintenant ton tour de te servir”. Pour les partisans d’une telle position et Dieu seul sait s’ils sont nombreux au Mali à manger l’argent du public, rien de plus normal puisque ça appartient à tout le monde. Et si on ne puise dans les caisses de l’Etat ou de la communauté, on est à la limite qualifié d’enfant maudit. Alors la corruption est-elle un phénomène culturel au Mali ? Cela n’a pas toujours été comme ça.
Sous le régime de Modibo Keita, la corruption n’était pas la règle générale, mais une exception. Modibo Keita n’avait pas lui-même une villa au Mali alors qu’il avait la possibilité d’en disposer par dizaines sinon par centaines. Modibo Keita et ses compagnons voyaient grand. Ils nourrissaient des ambitions qui allaient au-delà de leur propre personne. La plupart d’entre eux étaient des panafricanistes avérés. Rien à avoir avec la génération actuelle de dirigeants.
La corruption qui a commencé avec le régime de Moussa Traoré, s’est amplifiée avec la démocratie. Sous le régime de Moussa Traore, il y avait les “Les châteaux de la sècheresse”, à l’heure de la démocratie, on est bien obligé de constater que “les immeubles de la démocratie” pullulent à Bamako et dans les autres grandes villes du pays. Combien de grands dossiers de corruption et de délinquance financière impliquant des hauts responsables et de la haute administration ont été classés sans suite. Seuls les petits poissons sont pris tandis que les requins en haute mer arrivent à passer toujours paradoxalement à travers les mailles des filets. Au Mali, ne dit-on pas que si l’on détourne cinq millions de francs Cfa on peut écoper de cinq ans de travaux forcés, tandis que si l’on arrive à détourner cinq milliards de francs Cfa, on arrive toujours à s’en sortir par les jeux de complicités et les tractations politico-administratives.
A défaut d’appliquer la manière forte, façon John Jerry Rawlings, il convient de mettre l’accent sur le contrôle a priori pour empêcher la commission de la corruption comme Soumana Sako savait si bien le faire. Une dernière remarque : les salaires sont trop bas au Mali. Cette situation donne aux acteurs de la petite corruption le prétexte pour commettre leurs forfaits. Pour que cet argument n’opère pas, il y a lieu d’augmenter les salaires.