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Mali. Le jeu trouble de l’État avec les milices
Publié le vendredi 9 aout 2019  |  orientxxi.info
MNLA
© Autre presse par DR
MNLA (Mouvement National pour la Libération de l`Azawad)
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Tandis que la France s’enlise · Plus de cinq ans après l’intervention française, la situation au Mali ne cesse de se détériorer. Créées ou encouragées par l’État, les milices se retournent contre lui et affaiblissent le peu d’autorité qui lui reste.

Koulogon le 1er janvier 2019 : 37 morts.
Ogossagou le 23 mars : au moins 160 morts.
Sobane-Dah le 9 juin : au moins 35 morts, peut-être beaucoup plus.
Gangafani et Yoro le 17 juin : au moins 38 morts.

Les tueries de civils se sont multipliées ces derniers mois dans le centre du Mali1. À chaque fois, ce sont les mêmes récits qui reviennent : des hommes armés venus en 4x4 ou en moto encerclent le village, tirent sur tout ce qui bouge, y compris les animaux, puis mettent le feu aux habitations et aux greniers, avant de retourner chez eux. Parfois, ce sont des Dogons qui tuent des Peuls ; d’autres fois, des Peuls qui tuent des Dogons. Et il en est ainsi depuis plus d’un an et demi. Selon le Haut Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH), les attaques contre des villages ont, dans cette région, fait plus de 600 morts entre mars 2018 et mars 2019, et provoqué le déplacement de plus de 66 000 personnes. Dans les cercles de Koro et de Bandiagara, des villages dogons et peuls ont été vidés de leurs habitants en raison de l’insécurité.

Les auteurs des tueries sont des groupes dits « d’autodéfense » plus ou moins bien connus, créés ces trois dernières années dans un contexte d’insécurité grandissante et fondés sur l’appartenance communautaire : Dogons, Peuls, Bambaras... Dans deux rapports distincts publiés en 2018, la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH) et Human Rights Watch (HRW) ont détaillé de nombreux cas de violences et d’atrocités commises par ces groupes armés. À Koulogon, la Mission des Nations unies u Mali (Minusma) a conclu à la responsabilité des chasseurs traditionnels, ou dozo, possiblement liés à la milice dogon Dan na Ambassagou (« les chasseurs qui font confiance à Dieu » en langue dogon). Après la tuerie d’Ogossagou, cette milice a été une nouvelle fois pointée du doigt, ce qui a contraint le gouvernement malien à prononcer sa dissolution le 24 mars.

LE GOUVERNEMENT FOURNIT LES ARMES
Rien n’avait été fait auparavant pour limiter les agissements de cette milice née en 2016. Au contraire. Des diplomates, des chercheurs et des responsables politiques dénoncent depuis des mois, souvent en off, la passivité du pouvoir politique et du commandement militaire, et évoquent même une possible complicité. « De nombreux témoignages et individus bien informés font état d’un soutien logistique et financier apporté aux dozo par le gouvernement malien ou tout au moins par certains de ses membres », écrivait la FIDH en 2018. Un ancien ministre devenu opposant explique, sous couvert d’anonymat, que le gouvernement « a fourni des armes » à la milice en 2018. Une certitude : les groupes d’autodéfense disposent d’armes de guerre, et pas seulement de vieux fusils artisanaux dont sont généralement équipés les dozo.

Il est probable que dans un premier temps, le pouvoir politique malien a considéré ces milices comme des alliés nécessaires pour contrer l’influence des groupes djihadistes et pour contrôler des territoires qui échappent aux forces de sécurité. Mais comme le souligne un diplomate malien ayant requis l’anonymat : « Le monstre que nous avons suscité nous a échappé. Aujourd’hui, les milices opèrent en toute autonomie. » À plusieurs reprises ces derniers mois, les chefs de Dan na Ambassagou ont menacé les militaires s’ils tentaient de les désarmer. Après le massacre d’Ogossagou, ils ont rejeté la dissolution édictée à Bamako. De fait, leurs hommes opèrent toujours sur le terrain, et le chef militaire du mouvement, Youssouf Toloba, continue de se déplacer librement — il a même rencontré le premier ministre, Boubou Cissé, début juillet.
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