Il existe désormais au Mali une loi d’entente nationale. Elle couvre les crimes commis depuis 2012. L’idée qui sous-tend cette tellement contestée loi, c’est la recherche de la paix et le pardon, dit-on.
«Par devoir national, la présente loi offre, dans les conditions fixées aux chapitres II, III et IV (…) : le bénéfice du Pardon national à toute personne ayant commis ou ayant été complice des faits visés par l’article 3 (voir loi d’entente nationale)…». Un extrait de la loi que vient de promulguer le président de la République est relative aux crimes commis dans le cadre de la crise malienne depuis 2012. Dès l’entame de la lecture de ce document, ce qu’on soupçonne, c’est la volonté d’obliger les Maliens à pardonner ; le corps du texte sentune odeur de paix et d’oubli décrétée.
Loin de nous la volonté de jouer aux experts ou aux faux juristes. Notre volonté, ici, est juste de faciliter à nos lecteurs la compréhension de ce document et d’expliquer en français facile la volonté qui se cache derrière cette loi d’entente qui ne fera que cultiver et primer l’impunité dans notre pays.
Cette loi, disions-nous, prend en compte des crimes commis depuis 2012 ; à savoir la date de l’éclatement de la crise malienne qui a eu pour summum le carnage d’Aguel-Hoc. Elle exclut du champ de la justice et des compétences de nos juridictions plusieurs autres crimes graves commis depuis cette date sous le fallacieux prétexte d’un pardon qu’on veut décréter.
Nulle part au monde, vous ne verrez une action du genre aboutir, obtenir des résultats probants. Le pardon, tout le monde le sait, ne se décrète pas, c’est un acte volontaire et on n’a pas besoin d’une loi pour l’imposer.
Même dans la religion musulmane (religion majoritaire dans notre pays), quand vous tuez, on vous tue ; à moins que les parents de la victime ou d’autres proches, ayant la qualité, décident, de leur propre chef, sans contrainte aucune, de vous pardonner.
Pour étayer notre thèse au sujet de la bizarrerie de cette loi, nous vous proposons quelques autres extraits : «L’action publique est éteinte à l’égard de toute personne concernée, autre que celles citées à l’article 3 ci-dessus qui, dans un délai maximum de six (6) mois, à compter de la publication de la présente loi au Journal officiel, se présente volontairement aux autorités compétentes et déclare cesser ses actions et remet les armes, munitions, explosifs et tout autre engin en sa possession.»
«L’action publique est éteinte à l’égard de toute personne, recherchée à l’intérieur et à l’extérieur du territoire national, pour avoir commis ou avoir été complice d’un ou de plusieurs faits visés par l’article 3 ci-dessus, qui, dans un délai maximum de six (6) mois, à compter de la publication de la présente loi au Journal officiel, se présente volontairement aux autorités compétentes et déclare mettre fin à ses actions.»
«L’action publique est éteinte à l’égard de toute personne condamnée par défaut ou par contumace, pour avoir commis un ou plusieurs faits visés par l’article 3 ci-dessus, qui, dans un délai maximum de six (6) mois à compter de la publication de la présente loi au journal officiel, se présente volontairement aux autorités compétentes et déclare mettre fin à ses actions.»
«L’action publique est éteinte à l’égard de toute personne détenue, non condamnée définitivement, pour avoir commis ou avoir été complice d’un ou plusieurs des faits visés par l’article 3 de la présente loi.»
Et voici le fameux et si ambigu article 3 : «Les dispositions de la présente loi s’appliquent aux faits pouvant être qualifiés de crimes ou délits, prévus et punis par le code pénal malien, les autres lois pénales et les conventions et textes internationaux ratifiés par le Mali en matière de protection et de promotion des droits de l’homme, survenus dans le cadre des évènements liés à la crise née en 2012 et qui ont gravement porté atteinte à l’unité nationale, à l’intégrité territoriale et la cohésion sociale.»