L’international du Stade malien de Bamako, Cheick Oumar Koné (COK) est notre héros de la semaine dans le cadre de la rubrique “Que sont-ils devenus ?”. C’est du Racing Club de Sikasso qu’il a transféré au Stade en 1974, et, en compagnie des joueurs comme Lassine Soumaoro, Djofolo Traoré, Cheick Oumar Sangaré, Ousmane Guindo, Moussa Kanfedeny, Yacouba Diarra dit Yacou Pelé et Kolokani Pelé, ils tentent ensemble de tenir tant bien que mal le flambeau de la famille blanche, frappée par le départ pour l’Europe de certaines de ses vedettes à l’image de Cheick Fantamady Diallo. Le retour de feu Mamadou Kéïta dit Capi comme entraineur a contribué à ressouder le groupe et à lui redonner un repère, un noyau qui a écrit l’une des plus belles pages de l’histoire du Stade. Ancien capitaine, COK s’imposa pendant au moins dix ans au Stade, d’abord en tant que milieu, puis libéro. Très technique, avec un jeu rigoureux, il ne trichait pas sur un terrain de football. Il ne baissait non plus de tempérament qu’à la fin du match. Ce qui explique d’ailleurs ses multiples accrochages avec Abdoulaye Koumaré dit Muller du Djoliba AC, un renard des surfaces qui marquait des buts comme on égrène un chapelet. Il est arrivé dès fois que les deux joueurs se donnent des coups de poings. Un jour, n’eut été l’intervention de son grand frère Mamadou Koné dit Zito (officier de police et sociétaire du Djoliba), Cheick Oumar Koné serait conduit au Commissariat de police du 3ème Arrondissement. Reconverti entraîneur de football, c’est la même impulsivité qu’on remarque sur son banc de touche. Pourquoi cette passion ? COK répond que l’on doit prendre tout au sérieux dès l’instant que des intérêts sont en jeu. L’ancien capitaine des Blancs de Bamako, connu pour son sens élevé du social et de l’humour, nous a reçus au terrain d’entrainement de l’USFAS.
Admis au Diplôme d’Etudes Fondamentales (DEF) à Sikasso en 1974, Cheick Oumar Koné est orienté au Lycée Technique de Bamako, grâce à l’intervention de feu Tiécoro Bagayoko, ex Directeur des Services de Sécurité. Celui-ci avait sa petite idée en tête, c’est-à-dire le faire jouer au Djoliba AC, à côté de ses frères Zito et Moussa. Après les cours du soir, Diango (surnom de Tiécoro) l’amenait au terrain d’entrainement des Rouges de Bamako. Malgré son jeune âge, Cheick Oumar Koné avait une grande capacité de discernement. Il s’est laissé dorloter par Tiécoro, sans lui dire exactement son intention, à savoir rejoindre le grand rival, le Stade malien de Bamako.
Non au Djoliba ! Oui au Stade !
Sa première séance d’entrainement avec les Blancs de Bamako a créé une certaine méfiance de la part des dirigeants de son club de cœur, qui ont à juste titre pensé qu’il est un espion du Djoliba où jouent ses deux frères. Cheick Oumar Koné n’a pas accordé trop d’importance à ce climat de méfiance, son seul souci étant de jouer.
Afin d’y voir clair, Fakaba Diané, un joueur du club, décide de lui céder sa place un après-midi. Cheick Oumar Koné n’en attendait pas moins pour faire deux passes décisives au Nigérien Moussa Kanfédeny, et marquer lui-même le 3ème but de la partie. Sa prestation dissipa le doute.
De retour à la maison, il retrouve sur place Tiécoro Bagayoko qui l’interrogea sur la rumeur relative à sa présence au terrain d’entrainement du Stade malien de Bamako. Cheick O. Koné n’a pas eu le temps de nier les faits, parce que Diango en policier expérimenté lui détaille tous ses mouvements, et même la tenue qu’il portait. Néanmoins, il a tenu à rassurer le jeunot de son soutien total. Si cela était destiné à lui faire changer d’avis, Cheick ne s’est pas laissé influencer. La même nuit les choses s’accélèrent. Mody Sylla, un dirigeant du Stade prend toutes les dispositions utiles afin que le joueur signe la licence, avec à la clef une moto et 50000 F maliens.
… avec Salif Keita
Face à son entêtement de jouer au Stade, quel a été la réaction de ses deux grands frères ? Aucun d’eux n’était d’accord, selon Cheick Oumar Koné. Moussa ne l’a pas contrarié, et l’a même soutenu.
Quant à Zito, il n’a pas bronché. Mais son cadet savait ce qu’il a dans le cœur, parce qu’il fait partie des Djolibistes pur-sang. Donc, il ne saurait apprécier que son frère évolue dans le club rival. Les choses en sont restées là, et COK joua au Stade malien pendant au moins une décennie (1974-1984). Une carrière sanctionnée par quatre finales de coupe du Mali (1975, 1979, 1982, 1983), sur lesquelles il n’a remporté qu’une seule, celle de 1982 contre l’AS Biton de Ségou (4-2).
Faudrait-il rappeler que COK a également joué en équipe nationale de 1981 à 1983.
Reconversion réussie
Mais l’homme s’est beaucoup illustré après sa reconversion comme entraîneur. Un métier qui lui a été inculqué par feu Mamadou Keïta dit Capi lors de son passage au Stade. Pour parler de sa carrière d’entraîneur, force est de reconnaître qu’il a d’abord fait ses preuves au Mali, avant de les confirmer au Burkina Faso.
A Koulikoro, il a été trois finalistes de la coupe du Mali : 1994, 1999,2004. Son aventure au Burkina Faso a débuté en 2008 avec l’ASFA Yenenga, où il rafla toutes les coupes, avec une année sans défaite.
L’année suivante, il décroche le titre de champion, avant de faire un saut en Côte d’Ivoire pour entraîner l’AS Abengourou, finaliste de la coupe nationale (2010-2011). Il n’aura passé qu’une saison, les dirigeants de l’ASFA Yenenga lui font appel une seconde fois. Pari réussi ! COK remporte le titre de champion 2011-2012 ; puis il réalise pour la deuxième fois un triplé (2012- 2013).
Avec les équipes nationales, il a fait de bons résultats. En juillet 2003, il a qualifié pour la première fois le Mali aux Jeux Olympiques d’Athènes 2004, en battant le Cameroun à Bamako. L’unique but malien a été marqué par Dramane Traoré dit Rivaldo. COK remporta la dernière édition de la coupe Amilcar Cabral (2007).
Entraîneur adjoint des Aigles, il a fait partie de la Campagne de la CAN de Guinée Equatoriale 2015. Il qualifie les Aigles locaux au Championnat d’Afrique des Nations Rwanda 2016, mais ne conduira pas l’équipe à cette compétition. La raison ? Le Mali est éliminé auparavant des éliminatoires des Jeux Olympiques Brésil 2016. Du coup, COK est limogé et remplacé par Djibril Dramé. Cette décision de la Fédération l’a très déçu, et considère cette aventure comme l’un de ses plus mauvais souvenirs.
Moments douloureux
Cheick Oumar Koné est issue d’une famille de footballeurs avec quatre frères joueurs, Zito, Moussa Koné dit Temple Of Heaven, Amidou Koné et Abdoul Kassim Koné dit Batou. Celui-ci, policier de son état, était le benjamin. Dommage qu’il soit brutalement décédé en 1996 à Sikasso, à la suite d’un accident de circulation, pratiquement trois jours après les funérailles de leur papa. Quelques années plus tôt, c’est son grand frère Moussa Koné qui perdait la vie sur le Pont Fadh sur une moto alors qu’il partait chercher ses enfants à l’école sur la rive gauche. Coup dur triple !
En rappelant ces moments douloureux, Cheick Oumar Koné est tombé dans un calme émotif. Nous aussi. Mais il fallait quand même poser la question de savoir, comment ils se géraient dans la famille, après les matches entre des équipes rivales, dans lesquelles évoluaient des frères de sang. Zito et Moussa Koné évoluaient au Djoliba, Cheick Oumar et son frangin Amidou jouaient au Stade malien de Bamako.
Sur la question, il soutient que sur le terrain, ils se marquaient avec rigueur, se taclaient, mais à la maison, c’était le respect du droit d’aînesse ; ils ne commentaient les matches que pour rigoler.
Il aurait dû ajouter un doublé à son palmarès, s’il n’avait pas décidé d’arrêter au milieu de la saison 1983-1984. Selon lui, ses relations avec l’encadrement technique avaient tendance à se détériorer.
Cadre de la SOMIEX, il est affecté à Koulikoro la même année. Une fois dans la capitale du Meguetan, COK est contraint par Banou Makadji et Mamadou Diarra dit Diarradjan afin qu’il reprenne service avec le Nianan local.
Entraîneur, joueur, il contribua largement à la montée du club en première division (1987), et dès lors il n’est plus redescendu.
Pour parler de ses bons souvenirs, COK retient la coupe du Mali de 1982, son aventure à Koulikoro avec l’AS Nianan, la qualification des Aigles B aux J.O d’Athènes 2004, le trophée du tournoi Amical Cabral 2007, son passage à l’ASFA Yenenga du Burkina Faso.
La défaite du Stade en finale de la coupe du Mali 1979 contre le Djoliba AC, sa retraite forcée des pelouses en 1984, l’élimination des Aigles U20 à Dakar en 2015 suivie de son limogeage constituent ses plus mauvais souvenirs.
De retour au pays, Cheick Oumar Koné s’occupe d’une équipe du quartier de Yirimadio. Il s’emploie à livrer des matches amicaux avec les équipes de première division de la capitale. C’est dans ce cadre que nous l’avons rencontré à Djicoroni Para, au terrain d’entrainement de l’USFAS.
Marié, COK est père de 10 enfants dont un vient de signer un contrat professionnel dans un club Allemand.