Ils n’ont pas le génie créateur des Lionel Messi, Cristiano Ronaldo, Neymar, Kylian Mbappé, et autres, dont ils écoutent les exploits sur les pelouses européennes se conter chaque week-end. Ils ne sont pas non plus comparables aux illustres devanciers de ces méga stars (Edson Arantes do Nascimento dit pelé, Diego Maradona ou Johan Cruyff) qui trônaient sur le toit de la planète foot.
Mais, ils partagent avec eux la même passion pour le ballon rond et le goût pour la gestuelle technique. Ils, ce sont les non-voyants qui pratiquent le cécifoot ou football des non-voyants. Ce football est devenu une discipline à part entière des Jeux paralympiques, en septembre 2004 à Athènes (Grèce). Il a la particularité de se jouer avec un ballon sonore sur un terrain de 40 sur 20 mètres. Le cécifoot oppose deux équipes de 5 joueurs (tous non- voyants), mais avec deux gardiens de but emmétropes (qui n’ont aucun trouble de la vision).
Les équipes jouent deux périodes de 20 minutes chacune sur chronomètre comme au basket-ball, c’est-à-dire qu’à la moindre sortie de la balle du champ de jeu, on bloque le chrono. Les «cécifootballeurs» se déplacent en fonction du son de la balle. Ils ont les yeux couverts par des bandes d’étoffe. Ils se parlent pour se repérer, se faire des passes et réaliser des merveilles de contrôle au point que l’on se pose la question de savoir comment réalisent-ils ces gestes ? Le Mali dispose d’une équipe nationale de cécifoot. Celle-ci a participé à la Coupe d’Afrique des nations de football pour non-voyants pour la première fois en 2015, au Cameroun où les Aigles ont ramené la médaille de bronze. Deux ans plus tard (2017), les joueurs maliens foulent le sol cap-verdien pour une autre Coupe d’Afrique des nations de cécifoot. Ils épinglent dans leur tableau de chasse d’autres équipes talentueuses pour se hisser en finale contre le Maroc. Malheureusement, l’équipe chute sur la dernière marche (1-4) et se contente de la médaille d’argent.
Mais, si l’on en croit les explications du staff technique, notre équipe nationale était la seule parmi les 16 sélections participantes à loger dans le stade qui abritait la compétition, faute de subvention suffisante pour une mise au vert digne de ce nom. Et compte tenu de ces conditions difficiles et d’une insuffisance de commodité, une bonne partie de l’équipe s’était retrouvée malade à la veille de la finale.
Ainsi, les Aigles abordaient la finale avec des porteurs d’eau (ces joueurs qui se sacrifient pour le bien du collectif) extrêmement diminués par des pépins physiques, mais surtout avec sa puissance de feu, Mamadou Thiam, pas en possession de tous ses moyens parce qu’atteint par le paludisme. Celui-ci terminera tout de même meilleur buteur du tournoi, avec 13 réalisations et se consolera avec cette récompense personnelle.
Mais la deuxième place des Aigles était synonyme de qualification pour la Coupe du monde 2018 de cécifoot en Espagne. Dans ce pays, l’apprentissage a été rude pour les Aigles qui se sont classés 10è sur 16 équipes. Mais, ils ont eu le mérite d’être contre le Brésil, futur vainqueur de la compétition. Dimanche dernier, les Aigles de cécifoot ont livré un match de gala à l’occasion de l’accession de notre pays à la souveraineté nationale.
Lors de cette rencontre qui s’est déroulée à Torokorobougou à l’initiative de l’Association des jeunes de ce quartier, sous le leadership de Amadou Diallo dit Muller, la sélection nationale de Cécifoot a émerveillé le public par des phases de jeu, des dribles et autres gestes techniques. Les «cécifootballeurs» surprennent toujours par leur sens du jeu collectif, surtout leur sixième sens qui leur permet de mémoriser les différentes parties du terrain et savoir si la balle est sortie ou pas.
Ils ont entamé leur préparation pour prendre part à leur troisième Coupe d’Afrique de Cécifoot, programmée au Nigeria à partir du 22 novembre prochain. Le vainqueur de la compétition sera qualifié pour les Jeux paralympiques de Tokyo 2020. Des confidences de Madani Berthé, directeur sportif de l’équipe nationale de cécifoot, il ressort que les Aigles sont décidés à ramener le trophée pour être au rendez-vous des prochains Jeux paralympiques parce que seul le champion est qualifié. L’encadrement des Aigles avec les moyens de bord, continue d’usiner les pièces d’une équipe solide et compétitive à l’échelle africaine. Mais les Aigles ne demandent qu’à être au centre d’une attention particulière des autorités sportives et du grand public pour briller de mille feux.