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Afrique subsaharienne : une reconquête par les multinationales françaises
Publié le mardi 1 octobre 2019  |  tribuneouest.com
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© aBamako.com par mouhamar
Visite de la mission de l’Union Africaine pour le Mali et le Sahel (MISAHEL) à Kidal
Kidal, le 08 Août 2014. La délégation de la mission de l’Union Africaine pour le Mali et le Sahel (MISAHEL) conduite par son Excellence monsieur Pierre Buyoya, Haut Représentant de l`Union Africaine s`est rendue ce vendredi à Kidal, pour s`enquérir de conditions de vie des populations.
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Après plusieurs années de retrait, les grandes entreprises françaises sont de nouveau à l’affût de parts de marché dans une Afrique subsaharienne aux alléchantes perspectives économiques. Mais ce retour ne doit pas faire oublier les déboires passés des groupes industriels tricolores, comme Bolloré, Areva ou Orange.

« Avez-vous pensé à mettre l’Afrique dans votre business plan ? » L’accroche du dossier de BPI France sur « L’Afrique : un marché à conquérir » ne manque pas d’enthousiasme. Pour vendre le continent africain aux entreprises françaises, la Banque publique d’investissement ne lésine pas sur les superlatifs : « terre d’opportunité », « géant au potentiel considérable », « nouvel eldorado des PME françaises », etc. Bref, « L’Afrique, c’est maintenant ! », résume le premier sous-dossier.

Face au ralentissement de la croissance en Europe, les grandes entreprises françaises se tourneraient de nouveau vers l’Afrique après l’avoir boudée pendant plusieurs années. Les conflits politiques et militaires qui ont secoué le Rwanda, la Côte d’Ivoire, le Congo ou la région du Sahel ces 25 dernières années n’y étaient évidemment pas étrangers.

Mais à l’image du dossier promotionnel de BPI France, l’intérêt pour le continent africain se ferait de plus en plus pressant de la part des grands groupes tricolores. Ces derniers seraient même prêts à en découdre pour conquérir l’Afrique subsaharienne, aux perspectives de croissance incomparables sur la planète. En 2015, un rapport du cabinet BearingPoing révélait que les sociétés françaises s’attendaient à une hausse de leur chiffre d’affaires africain de 75 % en 10 ans.

Afrique : un effet boomerang auprès des grands groupes tricolores
Avec le boom démographique annoncé, la classe moyenne africaine devrait en effet passer de 150 à 300 millions de consommateurs actuellement à 900 millions d’ici 2040, selon le groupe CFAO. L’accélération de l’urbanisation (4 % par an) constitue également un facteur-clé puisqu’il induit une explosion des marchés du bâtiment, des transports, de la finance, de la téléphonie, de l’e-commerce, etc. Un essor économique dans lequel les industriels français croqueraient bien volontiers. Dans les pays comme le Rwanda, l’Éthiopie, le Sénégal ou la Côte d’Ivoire, le taux de croissance dépasse les 6 % depuis plusieurs années.

En janvier 2017, une importante délégation d’une soixantaine d’entreprises françaises était ainsi présente à Bamako (Mali) pour le Sommet Afrique-France. Emmenés par Pierre Gattaz, ex-président du MEDEF, Veolia, Thales et d’autres grands groupes semblaient redécouvrir le continent africain et ses gigantesques parts de marché à (re)conquérir. En 10 ans, l’Hexagone a en effet perdu près de la moitié de ses actifs en Afrique subsaharienne (4 % en 2015, contre 7 % en 2005).

Seuls quelques mastodontes sont à contre-courant : Carrefour a récemment densifié sa présence en Côte d’Ivoire, au Sénégal, au Cameroun et au Kenya ; Danone a créé une direction Afrique en 2015 ; L’Oréal a transféré son centre de recherche sur les cheveux africains et les peaux noires des États-Unis à l’Afrique du Sud ; et Axa a investi 75 millions d’euros dans Jumia, leader de l’e-commerce africain.

Orange et consorts : des ratés embarrassants
L’arrivée et le retour de grands groupes français en Afrique subsaharienne ne sont pourtant pas toujours couronnés de succès. « Il est vital de connaître le terrain et ne pas imaginer que, en quelques mois seulement, on va faire beaucoup d’argent, analyse Jérôme Douat, directeur transmission et distribution international chez Eiffage. C’est un marché d’avenir, mais pour y travailler, il faut des reins solides. » Plusieurs géants tricolores s’y sont ainsi cassés les dents. Parmi les exemples de ratés, Orange est le dernier d’une longue série, mais pas le moindre.

Orange, le géant des télécoms, a d’abord accusé d’importantes pertes au Kenya, où il a racheté l’opérateur historique en 2007, alors en situation de quasi-monopole. Mais le Français a fini par revendre toutes ses parts en 2015. Cette année, Orange a essuyé une nouvelle sortie de piste au Niger, où il était présent depuis 2008. Là aussi, le groupe hexagonal aurait eu des difficultés à valoriser son actif, mettant notamment en cause les autorités fiscales du pays. Il viserait désormais le marché malien, où il y aurait plus de lignes de téléphones que d’habitants, selon son directeur exécutif régional Alioune N’Diaye, ainsi que le marché togolais.

Quelles leçons tirer du passé ?
Comme Orange, plusieurs multinationales françaises ont multiplié les déboires sur le marché africain. Même celles qui y ont bâti leur fortune, comme le groupe Bolloré. Son PDG, le milliardaire Vincent Bolloré, a certes été blanchi suite à la prescription des faits dans une affaire de corruption pour l’obtention de concessions portuaires en Guinée. Il est cependant mis en examen pour d’autres faits de corruption au Togo et a été condamné pour homicide involontaire au Cameroun suite au déraillement d’un train qui a coûté la vie de 79 personnes en 2016. D’autres sociétés françaises emblématiques ont également sali leur réputation en Afrique, comme Areva (désormais Orano), accusé d’avoir mis en danger les travailleurs et la population autour de ses mines d’uranium en Centrafrique, ou Total, impliqué dans plusieurs affaires de corruption, notamment en Tanzanie et au Nigéria.

Face à ces affaires et au manque d’agilité des grands groupes, les pays africains auraient plutôt intérêt à privilégier les sociétés mieux dimensionnées aux marchés nationaux et régionaux : pure-players, start-up ou PME implantées et connaissant déjà bien le terrain. Encore faut-il ne pas se laisser amadouer par les « catchlines » des services marketing des multinationales, qui promettent monts et merveilles.

AUTEUR: Tribune Ouest
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