Au Mali, nous avons l’impression que plus aucune roue ne tourne. Cela peut s’expliquer de différentes manières.
Le législatif, l’exécutif et le judiciaire constituent les trois organes de sens d’un pays démocratique. À la différence des hommes qui possèdent cinq sens, une nation en comporte trois.
Pour la bonne coordination des actions dans une nation, chacun de ces trois pouvoirs qui donnent de la lumière au pays tout comme le soleil éclaire la terre doit jouer pleinement sa partition. Si l’un d’entre eux venait à manquer à sa mission, c’est le chaos qui devient le sort du pays. Pour reprendre ce sage antique grec s’exprimant sur les procédures de la connaissance humaine, « Si un sens venait à disparaitre, c’est toute une connaissance qui disparaitrait. »
Cette théorie d’Aristote reste de même pour la gestion d’un pays. Les institutions de la République étant à la nation ce qu’est la raison pour l’homme, ou le soleil pour la terre, doit chacune jouer leur rôle afin de donner au pays le développement souhaité.
Au Mali, nous avons l’impression que plus d’un sens a disparu. Ce pays fait face à un vide institutionnel. Pour Paraphraser René Descartes, l’essentiel n’est pas d’avoir de bonnes institutions, le principal est que chacune accomplisse sa tâche. Ni le pouvoir législatif, ni le pouvoir exécutif ou encore le pouvoir judiciaire au Mali n’accomplissent leur devoir.
Le Mali est devenu orphelin d’institutions pendant qu’il en compte huit. Mais pour quoi faire ? Sûrement pour comploter dans le dos du peuple qui meurt affamé à cause de la mauvaise gouvernance, de l’impunité.
Si Montesquieu était encore vivant aujourd’hui, il allait sûrement revoir sa théorie de la nécessité de diviser les pouvoirs. Cela à cause des failles dans la démocratie malienne ainsi que dans la plupart des régimes démocratiques actuels dans le monde.
Au Mali, lorsque nous disons que plus d’un sens est porté disparu, c’est pour dire que le mal qui gangrène cette nation s’est répandu à plusieurs de ses organes. Une démocratie est conçue comme une machine dans laquelle chaque appareil doit jouer pleinement sa fonction. Une fois qu’un vient à se mettre en panne, c’est la machine qui s’arrête ou fait entendre de grands bruits. Cela reste de même pour la démocratie où toutes les institutions doivent impérativement jouer leur fonction. Au Mali, la machine institutionnelle est en panne. D’où des crises multidimensionnelles, des cris de détresse à tous les niveaux. Si l’on n’y veille pas à temps, c’est toute la machine d’État qui risque bientôt de sombrer sous le coup du feu ardent qui s’empare un à un de ses appareils.
Revenons à nos organes de sens, plusieurs scientifiques sont arrivés à la conclusion que toute la connaissance commence par les organes de sens (l’ouïe, l’odorat, le goût, le toucher, la vue). De même que l’homme a besoin de tous ses sens pour ne pas altérer sa procédure de connaissance, de même un État démocratique a besoin de la fonctionnalité de tous ses sens que sont les institutions.
Celles-ci sont tellement importantes dans la bonne gouvernance que cet intellectuel anglais, Karl Popper, repris par certains écrivains africains, trouvait que la démocratie est le régime dans lequel de meilleures institutions existent et permettent de déposer les gouvernants sans bains de sang.
De là, nous comprenons la place centrale que jouent les institutions et surtout la société civile qui doit jouer un rôle d’interpellation des pouvoirs publics. Au Mali, l’existence de cet organe fait défaut. Les luttes qu’il mène ne sont que des combats d’intérêts et non pour le salut de la nation.
Ces luttes d’intérêts restent le mobile d’intégration de la plupart des gens qui composent cet organe. Or, le désir a une grande part à jouer dans la persévérance de l’homme dans son être, comme nous a légué Baruch Spinoza, intellectuel hollandais, c’est-à-dire dans sa volonté de progresser, de se développer. Ou encore Hegel qui nous apprend que rien de grand ne se réalise sans passion.
Le désir, la passion, sont ce qui manque à la plupart des actions des différentes institutions de la République du Mali. Les gens appelés à occuper des postes de responsabilités dans les différents organes ne viennent qu’avec le désir de se remplir la poche de l’argent du contribuable malien. Ces genres de situations n’arrivent que lorsque la vertu est rarement priorisée dans les actions.
Il faut arriver à redonner au Mali tous ses sens si l’on s’attend à un développement rapide de ce pays à travers la résolution de ses crises.