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Boua Ni Sogoma
Publié le samedi 5 octobre 2019  |  Aujourd`hui
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© aBamako.com par A.S
Lancement des festivités du centenaire du Président Modibo Keita
Bamako, le 11 juin 2015, le CICB a abrité la cérémonie de lancement des festivités du centenaire du Président Modibo Keita, c`était sous la Haute présidence de SEM, Ibrahim Boubacar KEITA
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Bonjour Kôrô Président ! Que la Paix de Dieu soit sur vous et sur votre peuple en ce mois de célébration du 59e anniversaire de l’accession de notre pays à la souveraineté nationale et internationale.

Un anniversaire que nous souhaitons vivement se tenir cette année non pas dans la méditation comme c’est le cas depuis un certain moment à cause de la situation de crise que notre pays connait, mais dans la manifestation de l’affirmation de cette souveraineté si chèrement acquise.

Près de soixante ans encore après cette indépendance, notre pays est écartelé entre mouvements sociaux, revendications catégorielles, scandales de corruption à propos d’achat d’avions et d’équipements militaires, et je n’en passe. Personne n’est sûr de l’avenir de ce pays. Et tout le monde s’accorde à reconnaitre que ça ne va pas dans notre pays, mais il semblerait que la solution n’est pas à portée de main.

Qu’est-ce qui se passe réellement dans notre pays où le peuple semble de plus en plus vouloir prendre ses droits maintenant par la force et demain peut-être, ne le souhaitons pas, par une insurrection populaire.

L’on se souvient que tout a commencé par la révolte des populations de Kéniéba qui ont incendié les urnes, le matériel électoral, ensuite c’était au tour des jeunes du tronçon Kati-Kayes de bloquer la route et exiger de négocier avec les plus hautes autorités du pays pour libérer ce tronçon vital à notre économie.

J’ai eu peur pour mon pays depuis ce jour-là ; c’était sans doute le début d’un nouveau printemps malien qui s’annonçait, toutes les villes, tous les villages, tous les groupuscules de la société civile de quelle que nature et de quelle obédience que ce soit vont désormais marcher, manifester, battre le pavé pour réclamer plus de routes et de ponts, la tête d’un cadre qui ne plaît pas à certaines personnes pour des raisons qu’elles seraient les seules à connaître.

Suivirent les manifestations de Gao, Tombouctou, Ménaka, Bougouni et enfin le drame de Niono. Et il n’est pas évident que nous soyons au bout de ces spirales de revendications tant que les promesses tenues par nos ministres ne seront pas honorées.

Dr. Boubou Cissé a promis que les travaux de la route Kati-Kayes allaient démarrer dans les meilleurs délais possibles et quant à la délégation du ministre, porte-parole du gouvernement dans les régions du Nord, elle a promis, si mes souvenirs sont exacts, que les travaux devraient démarrer dans trois mois.

A l’analyse de toutes ces situations, je me suis interrogé sur la qualité des hommes qui nous gouvernent tant je reste dubitatif sur la légitimité et la légalité des actes qu’ils posent au nom du gouvernement et même du peuple.

Je ne dénie pas aux populations le droit de réclamer un mieux-vivre ni les meilleures conditions de travail, de santé pour elles, mais je m’interroge sur le niveau de responsabilité et de représentativité de ceux qui ont bloqué les routes toutes choses qui leur confèrent le droit de discuter directement avec les représentants de l’Etat en l’absence des autorités politiques et des légitimités populaires.
Les ministres ont signé avec qui ? serait-on tenté de s’interroger. Sans aucun doute avec des Maliens qui certes sont excédés par les difficultés qui les assaillent au quotidien et qui constituent de sérieux obstacles à leur épanouissement, mais je crains que ce ne soit de la poudre aux yeux de ces manifestants qui sont prêts à reprendre le chemin de la contestation jusqu’à satisfaction de leurs revendications. Cela va-t-il durer pour combien de temps encore ? L’on constate donc de plus en plus dans notre pays cette prégnance du cadre informel et non républicain dans le traitement de certaines affaires publiques ce qui laisse augurer que si l’Etat ne s’assume pas en toute responsabilité et dans la plénitude de sa souveraineté un désordre incommensurable dont on ne peut mesurer les conséquences sur la stabilité de notre pays pourrait s’installer.

Que le peuple revendique son droit, il n’y a rien de plus légitime mais il doit, à mon sens, sacrifier au respect de l’autorité qu’il a lui-même mise en place.

Les représentants du gouvernement qui ont rencontré les populations “en colère” avec y compris le Premier ministre ont promis le démarrage des travaux de construction ou de réfection des routes pour, dans trois mois ou dans les meilleurs délais possibles. Quels secrets auraient-ils pour commencer les travaux sur des tronçons comme celle de N’Goma Koura-Niono-Tombouctou ? Avec quelles entreprises ont-ils pactisé pour affirmer et confirmer le démarrage des travaux de construction de routes contrôlées par des jihadistes, des bandits armés, des narcotrafiquants, des routes truffées de mines, d’engins explosifs improvisés.
Messieurs les ministres, quelle onction avez-vous obtenue de nos marabouts, féticheurs et autres maîtres des pouvoirs occultes pour donner et avec assurance des délais si précis dans ce contexte d’insécurité, de guerre, où chacun se cherche, où l’on se demande de quoi sera fait demain ?

Evitons à mon sens d’être des pompiers même si par ailleurs nous devrions reconnaître que notre pays n’a plus de route et que toutes les structures socio sanitaires, scolaires, environnementales et humaines se sont dégradées.

Sachons donc gérer tous nos patrimoines si nous acceptons des postes de responsabilité dans le gouvernement fut-il de mission. Ne vous précipitez donc pas à aller éteindre le feu là où l’incendie a éclaté. Faites-en sorte qu’il n’y ait pas d’incendie nulle part ou en tous les cas qu’il soit vite circonscrit.

Que va-t-il donc se passer si les promesses faites aux populations n’auront pu être tenues pour quelque raison que ce soit. Et vous et moi nous sommes sûrs qu’à date ces promesses ne peuvent être tenues.

Il y a aussi les conditions d’attribution des marchés publics notamment ceux de construction des routes. Il faut moraliser ces conditions qui, visiblement, souffrent des mêmes problèmes de gouvernance et de gestion. Sinon comment comprendre que chaque année des milliards et des milliards de nos francs sont engagés pour construire nos routes et que deux ans après ou trois au plus ces mêmes routes soient autant dégradées ? Et c’est encore, hélas le contribuable qui se saigne pour construire ces routes de la honte. Regardez tout autour de vous, à part la route de Ségou dont je félicite l’entreprise adjutatrice du marché qui a fait un très bon travail, et dans une moindre mesure celle de Koulikoro et Kéniéba, nous n’avons plus dans notre pays une bonne route digne de ce nom avec y compris les voies urbaines qui sont toutes dégradées même celles qui ont été construites en 2018. Il faudrait exiger des entreprises qui “gagnent” les marchés de construction de routes de garantir leurs réalisations pendant au moins dix ans pour que le marché leur soit attribué.

Il y a ce combat de la justice contre la corruption que vous avez enclenché ou du moins qui l’aura été sous vos instructions parce que faisant partie de vos promesses de campagne.
Notre pays est pourri et tout le peuple le sait et le dit haut et fort. Mais que faire pour nous sortir de cette mauvaise passe qui a commencé, il faut le dire sous le régime démocratique. Les premiers fonctionnaires milliardaires sont nés au Mali à partir de 1991. Et ce sont ces mêmes politiciens qui nous gouvernent. Depuis bientôt trente ans. Ils changent de mangeoires à chaque fois que leur chance d’être réélus au poste qu’ils occupaient s’amenuise. Ils se précipitent pour créer un nouveau parti ou acceptent même souvent de fondre leur parti dans d’autres certainement mieux positionnés pour conquérir le pouvoir dans lequel eux ils pourraient continuer à garder leurs avantages.

Moussa Traoré n’est certes pas ce démocrate que la France a voulu fabriquer pour ses anciennes colonies avec François Mitterrand, mais sous ce Président, bien qu’il a été reproché à son entourage immédiat, notamment sa femme et ses beaux-frères des interférences dans la gestion des affaire de l’Etat ce qui n’est pas une exception même dans les plus vieilles démocraties, et ce n’est pas demain la veille que ces pratiques vont s’arrêter, la corruption était circonscrite et considérée comme un véritable crime. Et l’on sait que de nombreux chefs de famille chargés de gestion de fonds publics ont été obligés de fuir le pays de peur d’être arrêtés et de devoir passer le restant de leur vie en prison.

Les fonctionnaires milliardaires, sont les enfants de l’ère démocratique. On a comme l’impression que nos démocrates ont sacrifié ces dizaines d’adolescents, d’élèves et étudiants rien que pour s’enrichir. Jetez simplement un regard rétrospectif sur ce qu’ils étaient hier et sur ce qu’ils sont aujourd’hui et vous comprendrez qu’en quelques années l’homme peut passer d’une veste éculée à une garde-robes bien achalandée, et d’une moto SIMSON à une Prado de dernière génération et sans que cela n’offusque personne. Tout cela aussi est le Mali.

Aujourd’hui, on compte des dizaines de milliardaires non pas chez les opérateurs économiques mais parmi les fonctionnaires et cela est connu de tous les Maliens.

Le salaire d’un fonctionnaire est connu et l’on ne s’étonne pas de voir nos cadres propriétaires de maisons de plusieurs centaines de millions et cela n’offusque personne. Il est vrai que les temps ont changé et que les conditions de vie et de travail se sont nettement améliorées chez tous les cadres et certains services ou confédérations ont “arrangé” et dans la légalité leurs conditions de travail. Il s’agit notamment des magistrats qui se sont battus pour avoir une grille spéciale, avec des avantages spéciaux pour leur éviter de tomber dans la tentation de devoir rendre une justice tronquée manipulée par l’argent et des influences.

Je ne crois pas que ces mesures aient porté les résultats escomptés. Il y a peu, nous avons appris que des magistrats ont été licenciés pour mauvaise conduite. Et si l’on pouvait porter à la connaissance des autres fonctionnaires les salaires et autres avantages des uns et des autres ? D’aucuns crieront à la divulgation de secrets professionnels ou à la divulgation de données personnelles ce qui est interdit par les conventions internationales. Cette mesure, je le crois, ne serait que justice. Car dans ce pays il deux poids et plusieurs mesures serait-on tenté de dire.

Les financiers, je veux parler des travailleurs du trésor, des impôts, des affaires économiques, de la douane sont des supers Maliens. Ils se sont arrogés ou arrangé des indemnités, des avantages extraordinaires qui doublent le salaire de leurs camarades de promotion.

Les Maliens ont accepté tout cela pour éviter à nos cadres de lorgner du côté du denier public.

Mais devrions-nous être dans le déni de toutes les pratiques que nous voyons tous les jours chez ces mêmes supers cadres qui continuent de priver notre pays de ses ressources, ressources qui auraient pu et dû suffire à booster notre économie.

Cheick Modibo Diarra a donné la preuve que le Mali peut se suffire à lui-même économiquement parlant. Au moment où certains de nos compatriotes avaient demandé à la Cédéao de mettre notre pays sous embargo, le taux de croissance de notre économie a fortement grimpé à telle enseigne que le PM d’alors a dit au Président Alassane Dramane Ouattara de laisser la situation en l’état tellement cet embargo souhaité par les ennemis du pays arrangeait le Mali.

Nous devrons à mon sens revoir le système de salaire des fonctionnaires maliens. Puisque le peuple qui, du reste, n’a pas été consulté pour fixer les salaires et autres avantages accordés à certaines catégories de fonctionnaires ploie toujours sous le poids de la corruption, de la malversation, du détournement et autres pratiques frauduleuses, édictons désormais des règles précises de préservation des ressources de l’Etat.

Le cas Bakary Togola me semble être un coup de bluff ! Il est arrêté à la suite de dénonciation mais combien de faits avérés de vol, de détournement, de mauvaise gestion, de prévarication, de délinquance financière n’avaient été signalés par le Vérificateur et toutes ces nombreuses structures de contrôle des finances publiques sans qu’aucune mesure ou sanction ne soit prise contre ceux qui ont été cités dans les différents rapports de contrôle !

Kôrô Président, votre initiative est courageuse et mérite d’être saluée et poursuivie. Il ne faudrait pas que ce soit une lutte contre les plus faibles ou contre ceux qui ne seraient plus en odeur de sainteté avec vous. Tout le monde et sans exception doit passer à la trappe si vous voulez vraiment assainir les finances publiques, donner un sens à votre mandat et sortir par la grande porte.

Ne soyez pas Kôrô Président comme cet autre qui vous a précédé et pour lequel j’ai beaucoup d’estime et de respect tant son bilan m’a séduit, et qui a commis la bourde de déclarer sur les antennes de la télévision nationale que lui il ne voudrait point humilier un chef de famille qui a détourné les fonds (plusieurs milliards) en tous les cas plusieurs fois plus que ce qui est reproché à Bakary Togola, des fonds destinés à soigner des malades du Sida, de la tuberculose et du paludisme. Est-ce qu’il y a plus criminel que cet homme et qui cependant a été blanchi par nos juges de tout détournement. L’intéressé aurait même eu une promotion.

Et on dit souvent que ce sont seuls les petits poissons qui passent à la trappe. Et pour ne pas être inquiété, il faut “bouffer” beaucoup de milliards que tu pourras ensuite redistribuer à tous ceux qui sont concernés par ton jugement. Il y a le cas de PMU-Mali, de l’Agetipe, de la Sotelma, de l’engrais frelaté, de l’achat d’équipements militaires, de l’avion présidentiel, des avions militaires, etc.

Faites donc Kôrô Président que le cas Bakary Togola ne soit pas un coup d’épée dans l’eau, que ce ne soit pas une justice sélective. La matière ne manque pas pour enclencher une véritable lutte contre la corruption dans notre pays. Beaucoup de dossiers restent encore pendants devant les tribunaux et les structures de contrôle.

Je voudrais demander au Premier ministre, le Dr. Boubou Cissé, ce que les pauvres retraités lui ont fait. Avant lui leurs salaires étaient payés entre le 18 et le 20 de chaque mois mais avec lui ils attendent souvent le début du mois d’après pour être payés, eux qui ont tout donné à la nation et après tout c’est sur leurs cotisations qu’ils sont payés.

Dieu est avec vous, Kôrô, car ce que vous n’auriez pu dire sur la situation de Kidal l’a été par votre homologue du Niger, et appuyé par celui du Burkina Faso. Votre silence paiera toujours et vous dédouanera de tous les reproches qui vous sont faits à tort ou à raison parce que vous êtes le Président du Mali.

Enfin Kôrô Président, nous devrons prier pour une bonne fin d’hivernage car malgré les grosses et nombreuses pluies qui sont tombées ces derniers moments, les récoltes semblent compromises du fait de l’insuffisance et du manque d’intrants fournis aux paysans. Il y a à ce niveau aussi des investigations à mener. L’Etat a certes subventionné l’engrais mais il a été vendu à des paysans entre 16 000 et 17 500 F CFA le sac à certains endroits du pays. Ce qui a fait que les moins nantis n’ont pu y accéder.

Songez dès à présent à prévoir un bon stock de vivres pour les jours difficiles qui s’annoncent pour notre pays, car ventre affamé n’a point d’oreille. Le peuple, votre peuple, celui qui a porté en vous sa confiance ne pourra tolérer d’avoir faim pendant que d’autres lui volent des milliards. Des régimes sont tombés l’on s’en souvient, pour une augmentation de cinq francs sur le prix du pain.

Qu’Allah SWT bénisse le Mali !

Mamoutou KEITA

Producteur de spectacles
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