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Commission spéciale d’enquête à l’AN: qui ne dit pas la vérité ?
Publié le mardi 8 octobre 2019  |  Info Matin
Interpellation
© aBamako.com par A S
Interpellation de l’Assemblée nationale sur la crise scolaire
Bamako, le 4 Avril 2019 Trois membres du gouvernement à savoir les ministres de l’Éducation nationale, le Pr Abinou TEME ; le Dr Boubou CISSE de l’Economie et des finances ainsi que DIARRA Raky TALLA, du Travail, de la fonction publique et des relations avec les Institutions répondaient, à l’interpellation de l’Assemblée nationale sur la crise scolaire
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L’Assemblée nationale, faisant suite à une demande formelle de l’Honorable Soumaïla CISSE, en date du 26 août 2019, afin qu’elle procède à toutes les investigations nécessaires et urgentes pour répondre aux questions qu’il égrène, a mis en place, samedi dernier, une Commission spéciale pour enquêter sur l’affaire dite ‘’des avions cloués au sol’’. Si une telle mesure est prévue par l’article 90 du Règlement intérieur de la 5e législature 2014-2018 de l’Assemblée nationale, il n’en demeure pas moins que de nombreuses zones d’ombre entourent le processus de mise en œuvre de ladite commission que les Maliens appelaient de tous leurs vœux.

La résolution créant la présente Commission d’enquête parlementaire a été approuvée à la faveur de la session extraordinaire de l’Assemblée nationale consacrée au budget rectificatif 2019. À l’occasion, pour mettre en place la Commission d’enquête parlementaire demandée par le Chef de file de l’Opposition, le Président de l’auguste Assemblée, l’Honorable Issiaka SIDIBE, a sorti de ses réminiscences de droit, l’argument imparable : « comme j’ai dit à la conférence des présidents, j’ai écrit au gouvernement pour demander s’il y a une information judiciaire qui a été oui ou non ouverte. J’ai été répondu par un ‘’non’’ ». Au regard de cette réponse d’une limpidité à ne rien envier à l’eau de roche, Isaac est dans son plein droit d’agréer à la demande de Soumi champion.
Mais, voilà, il y a un sac de nœuds qu’il faudrait préalablement débrouiller. C’est l’intérêt de la question : l’honorable Président de l’auguste Assemblée nationale a-t-il posé la bonne question au Gouvernement ? Il n’a pas demandé s’il y a eu ouverture d’une enquête (en droit, une poursuite est une action en justice intentée contre une personne) comme l’a annoncé le Procureur de la République près le Tribunal de Grande Instance de la Commune III en charge du Pôle économique et financier de Bamako, Mamoudou KASSOGUE, au cours de son point de presse du 21 août dernier. Le Perchoir s’est directement enquis de l’ouverture d’une information judiciaire. En prenant en charge ou en occultant ce principe : ‘’en cas de crime ou de délit pénal (affaire complexe), le procureur de la République déclenche l’action publique et ouvre une information judiciaire, confiée à un juge d’instruction. L’information judiciaire est la phase de la procédure pénale qui précède un jugement et au cours de laquelle le juge d’instruction, sous le contrôle de la Chambre de l’instruction, procède aux recherches permettant la manifestation de la vérité, rassemble et apprécie les preuves, entend les personnes impliquées ou poursuivies et les témoins, décide de mettre en examen une personne et de la suite à donner à l’action publique’’.
En fait, il y a une divergence d’interprétation ou probablement une interprétation erronée de l’article 90 du Règlement intérieur de l’Assemblée de la part de l’Honorable Issiaka SIDIBE.
L’article 90 dudit Règlement stipule : ‘’il ne peut être créé de commissions spéciales d’enquête quand les faits ont donné lieu à des poursuites judiciaires aussi longtemps que ces poursuites sont en cours. Si une commission a déjà été créée, sa mission prend fin dès l’ouverture d’une information judiciaire relative aux faits qui ont motivé sa création’’. Une lecture attentive de cet alinéa soulève deux cas de figure.
Le premier cas de figure : il n’y a aucune poursuite judiciaire ; donc, les commissions spéciales peuvent être mises en place.
Le second cas de figure : la mission de la commission cesse dès l’ouverture d’une information judiciaire.
Mais, il se trouve que l’information judiciaire est une étape de la procédure (l’ultime avant le jugement). Ce sur quoi se fonde le Président de l’Assemblée pour ouvrir la porte à la création d’une Commission spéciale. Mais, avant l’information judiciaire, il y a eu l’ouverture d’une enquête par le Procureur de la République qui devrait empêcher la création de la Commission.
La vérité est que cet alinéa de l’article 90 est ambigu et qu’il gagnerait à être clarifié.
Autre cocasserie, c’est l’attitude de la Chancellerie qui donne un coup de Jarnac au Procureur de la République, en prenant le contre-pied total de son annonce. Lui qui se régalait du soutien indéfectible de cette Chancellerie : « nous sommes parfaitement en phase avec la Chancellerie où le ministre de la Justice nous a assurés aussi de l’engagement des plus hautes autorités du pays à nous accompagner sur ce chantier ». Parce que, si le Procureur en charge du Pôle économique et financier n’a pas menti, en annonçant l’ouverture d’une enquête ; c’est qu’on l’a fait mentir, à travers la réponse à la demande du Président de l’Assemblée nationale.
De même, à l’aune du jeu trouble du Premier ministre (l’interlocuteur du Président de l’Assemblée nationale), il y a fort à craindre que l’accompagnement des plus hautes autorités soit un cadeau empoisonné. La lutte contre la corruption, sous nos cieux, n’est-elle pas un marché de dupes où les plus naïfs passent à la trappe et constituent le plat de résistance d’une ploutocratie vorace ?

PAR BERTIN DAKOUO
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