Le secteur de la production et de la distribution d’engrais au Mali connaît, depuis quelques mois, l’irruption d’un certain Ibrahim Doucouré. L’homme sorti de nulle part fait, désormais, avec la complicité de certains cadres véreux, la pluie et le beau temps et oblige, même, certains de ses concurrents à licencier à la pelle au sein de leur entreprise.
Comme l’a écrit Jeune Afrique, au Mali, depuis une dizaine d’années, le secteur de la production et de la distribution d’engrais est dominé par l’entreprise Toguna Agro-industries, créée en 2006 par Seydou Nantoumé et Charles Carrière. Mais, depuis peu, poursuit-il, un nouvel acteur vient marcher sur ses plates-bandes : le Malien Ibrahima Doucouré, avec son entreprise Doucouré Partenaire Agro-industries (DPA).
Si les deux patrons sont des autodidactes, Nantoumé a pour lui d’avoir démarré le premier. Depuis 2006, il fait lui-même des mélanges avec le phosphate de la mine de Tilemsi (à l’arrêt depuis trois ans pour raisons de sécurité).
Avec Toguna, il se targue du titre de «leader de la production d’engrais NPK en Afrique de l’Ouest francophone», distribuant aujourd’hui ses produits au Mali, au Niger, au Burkina Faso, au Sénégal, en Guinée et en Côte d’Ivoire. Il a acheté une troisième usine au Burkina Faso, toujours pas entrée en production, en partenariat avec le local Tropic Agro Chem.
Malheureusement, depuis un certain temps, par la complicité de proches du pouvoir et de responsables politiques haut-placés, le leader qu’est Seydou Nantoumé qui prend en charge, bon an mal an, plus de 60% de parts de marché malien en matière de production et de distribution d’engrais agricoles, est obligé de faire face à une concurrence déloyale dans son propre pays.
S’il ne s’agissait que d’une simple concurrence, encore, ceci pourrait être acceptable ; seulement, ici, il s’agit d’une opération montée de toutes pièces pour créer des ennuis au patron de Toguna qui doit, en plus d’affronter DPA, faire face à une mafia politico-financière dont le seul objectif est de l’emmener à fermer boutique.
Tenez, par exemple, sorti de nulle part, son concurrent, DPA, n’a pas tardé, grâce et par les moyens et les soutiens de l’Etat et du gouvernement, à exporter, en un temps record, dans la sous-région (Burkina Faso, Guinée, Bénin, Togo, Niger et Côte d’Ivoire). Il a aussi pu, comme par magie, se lancer dans la production depuis 2014, avec une usine à Ségou, et a décroché une grande victoire en 2018.
À l’issue de l’un des plus importants appels d’offres de l’année, celui de la Compagnie malienne pour le développement des textiles, Ibrahima Doucouré et ses partenaires ont remporté la distribution de 100 000 tonnes d’engrais. Un succès obtenu, on le sait, désormais, au détriment des paysans à cause de la qualité de l’engrais qui a été fourni et grâce aux dessous-de-table distribués au niveau de l’APCAM et à certains membres du gouvernement.
Pire, cette opération était d’autant plus frauduleuse qu’il s’est agi de passer des commandes d’engrais par anticipation ; c’est-à-dire que les besoins ont été anticipés pour pouvoir faire plaisir à Doucouré, certains barons du régime et cadres de la CMDT.
D’ailleurs, selon plusieurs spécialistes du secteur, Doucouré a eu, toute l’année durant, du mal à assurer la distribution d’engrais dans le pays et, d’après les termes de l’appel d’offres, si les adjudicataires n’honorent pas cette partie du contrat, mois par mois, les quantités non distribuées devraient être automatiquement réattribuées… aux concurrents qui y sont parvenus. Ce qui n’a pas été le cas.
Depuis, celui qui ne doit sa percée qu’à sa proximité avec un baron aujourd’hui en disgrâce se cherche. Il ne cesse de faire le pied de grue chez des proches du président de la République afin de ne pas rejoindre Bakary Togola, avec lequel il a, de façon éhontée, exploité les producteurs en leur livrant des engrais «frelatés».
A suivre.