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Appel à la démission du président de la République : La riposte se prépare
Publié le jeudi 24 octobre 2019  |  le wagadu
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© aBamako.com par A.S
Lancement des festivités du centenaire du Président Modibo Keita
Bamako, le 11 juin 2015, le CICB a abrité la cérémonie de lancement des festivités du centenaire du Président Modibo Keita, c`était sous la Haute présidence de SEM, Ibrahim Boubacar KEITA
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L’attaque perpétrée contre la position des Forces armées maliennes à Boulkessi, ce mardi 1er courant, a coûté la vie à quelques dizaines de militaires et provoqué un grand émoi dans l’opinion nationale. Mais pas que, elle semble en outre raviver les tensions politiques jusque-là latentes. Les acteurs politiques semblent donc se préparer à monter sur le ring ce qui laisse voir un lendemain ponctué de coups et de contrecoups.

Les coups

À l’analyse des évolutions récentes observables dans le milieu politique, nous comprenons aisément que ce énième drame qui a endeuillé la nation malienne est en train de servir d’élément déclencheur à de futures batailles rangées.

D’abord, nous avons eu un tweet (que l’on pourrait en temps normal qualifier de banal) appelant à mettre un terme au «régime incompétent» du Président IBK, que les pouvoirs publics ont quand même trouvé significatif et ce pour un certain nombre de raisons. L’auteur du tweet est un acteur des évènements de 2012 ayant conduit à la chute du Président ATT, il est un officier supérieur proche du général Amadou Aya Sanogo (l’acteur principal des évènements sus évoqués actuellement en prison) comptant sûrement des proches et admirateurs dans les rangs de l’armée. Il est également connu comme étant un farouche opposant au pouvoir d’IBK qui, pourtant, fut un collaborateur. La crainte des autorités face à ce tweet est donc fondée quand on sait que le contexte est également compliqué.

Ainsi, l’officier supérieur fut entendu sur le tweet par la gendarmerie nationale et chose révélatrice, le jour de son audition des figures politiques bien connues pour leur opposition claire au pouvoir en place, tinrent une conférence de presse d’où ils déclarèrent que : «…si les choses dépassaient l’audition, nous serons tous parmi ses soutiens».

Ensuite, dans le même temps, nous avons une partie de la classe politique et de la société civile qui envisage de s’organiser au sein de ce que d’aucuns appellent : «un vaste mouvement populaire pour faire démissionner le Président Ibrahim Boubacar Keita». Cette tendance paraît compter sur la stratégie des vases communicants (comme ce que nous connaissons en mécanique des fluides) pour arriver à ce but.

Concrètement, on aura plusieurs récipients (organisations) multiformes surtout, reliés entre eux par leur base. La consistance de cette stratégie pourrait résider dans le fait de fédérer autour d’une seule direction, tous les mécontents du régime actuel en jouant sur cet énorme sentiment de déception que l’on observe chez la plupart de nos concitoyens. Il est donc logique que le régime craigne la mise au point d’un cocktail dangereux d’où la riposte.

Les contrecoups ou la riposte

Deux faits récents du pouvoir semblent laisser entendre qu’il a bien entendu ces appels à la démission et prend au sérieux les prises de positions. Ces faits sont à considérer comme étant des prémices d’une stratégie de riposte.

Le premier fait est la récente prorogation ou le renouvellement de l’état d’urgence en conseil des ministres. En effet, si le Mali n’est pas à sa première expérience dans l’instauration de ce régime d’exception, le décréter maintenant traduit la volonté du pouvoir à gérer «efficacement» les mouvements populaires (et ses éventuelles dérives) déjà annoncés par certains hommes politiques.

L’état d’urgence, ainsi décrété, devient un moyen pour le pouvoir d’alléger les pesanteurs juridiques qui encadrent de manière générale, le maintien d’ordre. Il permettra de justifier ceux qui pourraient en temps normal être perçus comme des outre passements de pouvoir ou des abus d’autorité. Nous comprenons donc que sur le terrain du maintien d’ordre, le régime se prépare à toute éventualité. Puisque les batailles rangées annoncées sont avant tout politiques, le pouvoir s’organise également sur ce terrain.

Ainsi, le Président de la République himself a reçu les partis et mouvements signataires de l’accord politique de gouvernance. Politiquement, cela pourrait être analysé et compris comme un rappel de troupes avant les combats. Il a habilement tâté les pouls et à travers une communication maîtrisée (la diffusion à l’ORTM), lancer un message à ceux qui veulent le pousser à la démission.

En fin tacticien, il balança également des termes comme «appel au rassemblement pour le Mali», «j’irai chercher tout le monde même quand il s’agira d’aller les trouver chez eux à domicile car rien ne vaut le Mali» etc., comme pour dire d’abord aux opposants sa volonté d’apaiser les choses et ensuite aux témoins qui seraient dans une neutralité relative qu’il est un homme de dialogue, qu’il est bienveillant et que les méchants seraient les autres.

L’évaluation des forces

En évaluant les forces des deux camps (ceux qui voudraient d’une démission du Président et ceux qui soutiendraient le contraire), en cas d’affrontement politique, nous serons peut-être tentés de dire que les appelants à la démission sont plus à craindre et ce, pour des raisons toutes simples : -le pouvoir est actuellement en grande difficulté, très fragile. Le nombre de Maliens non satisfaits de ses résultats ne cesse de croitre. Par simplification, tous les maux du pays et les grandes souffrances du moment ont été inscrits au passif de ce régime. Un tel mouvement pourrait donc à tort ou à raison constitué un appel d’air pour les mécontents de tous les bords et devenir un exutoire pour beaucoup ;

– l’inconnue que présente ce genre de mouvement. En effet, les mouvements que l’on voudrait effectivement populaires et protestataires présentent toujours des inconnues (on sait où et quand ils commencent mais jamais jusqu’où iront-ils). Trop d’imprévisibilités embêteraient n’importe qui, même les stratèges les plus pointus. Aussi, si l’on sait à priori qui ne participera pas à un tel mouvement, on ne sait pas du tout qui y participera ;

-le manque de crédibilité des partis politiques de la majorité présidentielle desservira également le Président IBK. Ces partis qui devraient normalement être la force du Président de la République, n’ont qu’une faible capacité de mobilisation et sont en manque de prestige, ils ne feront donc pas le poids devant un éventuel mouvement de foules.

Quant au pouvoir, le fait est qu’il dispose des forces de l’ordre est à considérer comme un atout majeur mais qui, en même temps, peut se retourner contre lui en cas d’emploi excessif de la force. Il faut également dire que ceux qui demandent la démission du Président de la République ne paraissent pas assez ‘’conventionnels’’ pour fédérer le maximum d’acteurs politico-associatifs opposés au régime. Des divisions sont donc à craindre dans leur camp.

En attendant, wait and see comme disent les anglo-saxons.

Mamadou Lamine SIBY dit Malla,

Analyste et homme politique
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