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Controverse autour de la culture de cannabis autorisée au Mali : IBK devant le fait accompli
Publié le samedi 2 novembre 2019  |  Aujourd`hui
Ségou:Moussa
© Autre presse par DR
Ségou:Moussa MARA s`est rendu à l`Office du Niger
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Lorsque nous avons livré l’information sur la légalisation d’une culture de cannabis au Mali, il y a deux semaines, précisément dans notre édition n° 188 du vendredi 15 octobre 2019, elle fut reçue comme une douche froide par des organisations et institutions internationales qui n’étaient jusque-là informées d’une telle mesure. Pis encore, des ministres du gouvernement actuel, tout comme plusieurs ex-ministres que nous avons approchés, ignoraient jusque-là tout de cette culture de cannabis autorisée et l’on se demande si Koulouba a pu adhérer à une telle initiative.

Au-delà du contexte qui ne milite guère en faveur d’une telle culture légalisée à surveiller de près, au point qu’on l’appelle culture encadrée, le Ministère de la Sécurité et de la protection civile ne s’est pas contenté de délivrer une autorisation en 2017 pour, dit-on, l’exportation des graines à des fins médicales. En effet, en 2018, ladite autorisation a été modifiée pour être étendue à l’exploitation des tiges afin d’en extraire l’huile et pourquoi pas, l’appétit venant en mangeant, cette même société ou une autre ne demanderait-elle pas aussi l’exploitation des feuilles de chanvre ? Mais surtout dans quelles conditions ? Là gît toute la question.

Autorisation délivrée en catimini

Apparemment, aucun des membres du gouvernement ne savait qu’une entreprise était désormais autorisée à cultiver du cannabis au Mali parce que le Conseil des ministres n’en a jamais été informé. Il s’agit d’une autorisation délivrée en catimini à une société dite de droit malien, appelée African Seeds sarl. Tout s’est joué entre le Ministère de la Sécurité qui a délivré l’autorisation et ses services comme la Direction générale de la Police et l’Office central des stupéfiants (Ocs). Seul le Ministère de la Santé a été impliqué, à travers la Direction nationale de la Pharmacie qui a aidé à la rédaction d’un semblant de cahier de charges, puisque l’autorisation en question précise bien que c’est pour exporter les graines de cannabis “à des fins médicales”.

Le terme semblant n’est pas trop fort puisque pour une affaire aussi sérieuse que la culture de cannabis, le cahier de charges remplit à peine deux feuillets de format A4. Et il ne précise ni l’endroit où doit se faire la culture, encore moins les surfaces à aménager et les dispositions à prendre vis-à-vis des populations locales et pour l’encadrement et la supervision de ladite culture et de l’exportation du produit. Il s’agit d’un document aux dispositions énumérées de façon générale et qui ne sont d’ailleurs pas, à ce jour, respectées car aucun document d’archive des différents services concernés n’existe pour le prouver.

La Direction nationale de la Pharmacie impliquée

D’ailleurs, au niveau de la Direction nationale de la Pharmacie, seul le maître de céans devrait être au courant de ce dossier puisque plusieurs cadres ont pris le soin de nous approcher pour en savoir davantage sur cette affaire. La demande insistante venant de partout nous oblige d’ailleurs à revenir sur ce dossier pour lequel des esprits obtus, proches du ministre de la Sécurité, ont voulu s’ériger en donneurs de leçons pour nous reprocher de soulever en 2019 une autorisation signée en 2017.

Nous leur rétorquons ainsi que la date d’un acte importe peu par rapport à ses effets dans le temps, surtout si l’acte en question est resté à tort comme secret-défense. En plus, au cours de l’année 2018, cette autorisation a été renouvelée en subissant des modifications au profit de la société productrice.



Mais une chose est sure, aussi bien sur la Décision n°141/MSPC-SG du 28 février 2017, renouvelée et modifiée par la Décision n° 249/%SPC-SG du 05 mars 2018, il n’est précisé aucun ampliataire, comme nous le fait remarquer un expert chargé des questions de drogue et travaillant pour le compte d’une institution internationale spécialisée. Selon lui, même si le ministre de la Sécurité a usé de son pouvoir régalien, pour signer un tel acte, sur la base de la Loi au Mali (qui peut autoriser la culture encadrée de cannabis), l’opportunité d’une telle mesure est discutable. En plus, révèle notre interlocuteur, cette autorisation de culture de cannabis n’a pas été signalée aux institutions partenaires du Mali en matière de lutte contre la drogue, alors que c’était nécessaire pour veiller sur l’application correcte des termes du cahier de charges.

Ce qui intrigue le plus encore les organisations et experts spécialistes des questions de drogues

En plus, dit-il, il n’y a nulle trace de ces décisions dans d’autres services de l’Etat. “Ceci aurait permis de savoir le niveau d’implication de chaque compartiment de l’Etat dans la prise de cette décision ignorée même par des collectivités locales, surtout rurales, qui ont à peine entendu parler de cette autorisation qui les concerne pourtant au premier plan”. C’est dire, selon notre interlocuteur, que le ministre de l’Agriculture et ses homologues chargés des Collectivités territoriales, du commerce et même de l’Economie et des finances (patron des douanes) devaient en être informés. Ce qui justifie une communication sur le sujet au conseil des ministres, selon lui.

Ce qui intrigue le plus encore ces organisations et experts spécialistes des questions de drogues que nous avons rencontrés, c’est que la variété de cannabis cultivée au Mali par les paysans, le chanvre sativa et la même que celle que se propose de cultiver la société autorisée. Cependant, ajoute-t-il, «ce chanvre sativa n’est pas prisé par les consommateurs locaux à cause de sa faible teneur en Thc (tétrahydrocannabinol), élément psychotrope, qui en fait réellement un stupéfiant. Les consommateurs maliens et même ceux du Sénégal et du Burkina Faso, préfèrent le chanvre importé et c’est pourquoi celui en provenance du Ghana a le vent en poupe à leur niveau. Et pourtant, la production du chanvre sativa est en train de faire flores en zone rurale malienne, surtout dans la région de Sikasso».

Développement d’une filière locale de culture de chanvre

Notons au passage que le chanvre est une culture facile, ne nécessitant pas d’arrosage spécifiquement. Le cycle du chanvre est conditionné essentiellement par la durée du jour ou photopériode, c’est à dire que, quelle que soit la date de semis, la floraison puis la récolte se dérouleront à dates fixes, comme indiquées par le semencier. Seuls les rendements varieront. C’est ainsi des villages entiers, sous la coupe du chef de village, s’adonnent désormais à la culture de ce chanvre qui aurait bien un débouché pour prospérer. Y aurait-il alors, en dehors de la société autorisée, une filière clandestine d’exportation bien structurée ?

Le président IBK, à présent informé, est alors interpelé car les envoyés de certains milieux activistes cherchaient les exemplaires du numéro 188 du vendredi 15 octobre qui révélait l’existence de cette autorisation et des suites sont attendues de leur part.

A.B. NIANG
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