Longtemps restés hors des radars médiatiques, les Peuls, l'un des derniers grands peuples nomades de la planète, sont désormais au coeur de presque toutes les actualités au Mali, et plus largement au Sahel. Contrairement aux "hommes bleus" du désert - les Touaregs - qui fascinent les Occidentaux, avec lesquels ils entretiennent des liens séculaires, les Peuls restent largement méconnus. Depuis des siècles, ils empruntent pourtant avec leurs troupeaux les mêmes routes sahéliennes: ils sont aujourd'hui plus de 35 millions, dispersés dans une quinzaine de pays, des côtes Atlantique du Sénégal à la forêt dense de la Centrafrique.L'actualité les a rattrapés ces quatre dernières années, avec l'insurrection jihadiste qui s'est propagée du nord vers le centre du Mali.Dans la région de Mopti, où ils sont le plus nombreux, les Peuls constituent aujourd'hui le gros des combattants au sein des cellules jihadistes liées à Al-Qaïda, comme la katiba Macina.Son chef, Amadou Koufa, est lui-même un Peul et appelle ses "frères" répartis dans toute l'Afrique de l'Ouest, à le rejoindre pour mener la guerre sainte contre les "mécréants".Une partie de la jeunesse peule l'a suivi, poussée par le sentiment de marginalisation, la pauvreté ou encore l'endoctrinement religieux.Au fil des mois, le poison jihadiste a attisé les conflits intercommunautaires.Les tensions pour l'accès à la terre et aux pâturages entre éleveurs peuls et agriculteurs bambaras ou dogons se sont transformées en affrontements sanglants et le discours anti-Peuls s'est généralisé dans le centre. Cette région touristique autrefois paisible est devenue un no man's land aux routes piégées d'engins explosifs, sillonné par des Casques bleus impuissants à enrayer les violences. Les villages brûlés succèdent désormais aux champs abandonnés.Le conflit s'aggrave de jour en jour: le nombre de déplacés fuyant les violences a quasiment quadruplé en l'espace d'un an dans la zone de Mopti, pour atteindre 70.000, selon l'ONU. Et il se propage à une vitesse alarmante dans les pays voisins. Au Burkina Faso, seule la capitale Ouagadougou semble encore sous le contrôle de l'armée, tandis qu'au Niger, les attaques jihadistes se multiplient aux portes de Niamey.