Salif Keïta, le Domingo de la musique malienne n’a pas chanté, mais il a parlé. Dans une vidéo qui a vite inondée les réseaux sociaux, Salif assène ses vérités à son Kôrô IBK : sa gestion du pouvoir, sa soumission à la France, le comportement de ses deux fils (Karim et Bouba) qui « gaspillent l’argent du pays », la dramatique situation des familles des soldats tombés sur le théâtre des opérations… Tout y passe en quelques minutes d’intervention. Salif a parlé ! L’artiste a aussi indexé la France qui alimente la rébellion au Mali. La « petite musique » de l’artiste a fait l’effet d’une bombe.
Pour la première fois, un artiste malien a dit haut et fort ce que beaucoup de responsables murmurent tout bas à Bamako. La France est sur le ban !
Le vendredi dernier, des partis politiques, majoritairement de l’opposition, des associations et regroupements de la société civile, ont organisé un rassemblement à la place de l’indépendance pour soutenir l’armée et les forces de sécurité. Aussi, au cours de ce rassemblement, des milliers de Maliens ont, d’une seule voix, fustigé la gestion du pouvoir IBK, les scandales en cascades concernant les ressources financières allouées à l’armée. Autre dénonciation ? L’intervention militaire française au Nord du Mali qui soulève aujourd’hui l’ire des Maliens, à cause de l’impasse (l’échec ?) du processus de stabilisation du pays.
Autant l’opération Serval a été applaudit par les Maliens, autant ceux-ci ne cachent plus leur incompréhension sur les vraies missions de l’opération Barkhane qui, pour de nombreux maliens, est présente sur le sol malien pour la sauvegarde d’intérêts français et ceux d’une poignée d’individus (alliés de la France) que pour aider les maliens à sécuriser leur pays. La preuve : Kidal n’est toujours pas dans le giron du Mali, contrairement aux affirmations de Emmanuel Macron !
Aujourd’hui, de Kayes à Sikasso, en passant par Bamako et Koulikoro, l’opinion malienne est excédée. Elle a du mal à contenir sa colère contre cette présence française dans le septentrion alors qu’au même moment les attaques contre les FAMas se multiplient.
A la place de l’indépendance, le rassemblement a vite pris les allures d’un meeting contre la France, ou au moins contre les autorités françaises. Dans les jours à venir, ces manifestation sur fond de dénonciation pourraient s’étendre dans tout le pays.
Avant-hier, samedi, c’était au tour du Haut conseil islamique d’organiser, de son côté, un meeting de soutien aux FAMas.
Auparavant, Kati, la ville garnison, avait donné le ton le vendredi matin, avec une marche de soutien à l’armée et aux forces de sécurité. Kati dénonce aussi la présence française dans le septentrion. Les manifestants, dans cette localité, ont également lancé un appel à la… Russie pour intervenir au Mali. Tout un symbole !
Grosse tâche noire au tableau : De Bamako à San (Ségou) en passant par Kati, les rassemblements de soutien aux FAMas se succèdent, mais avec différents acteurs. Ce qui illustre par ailleurs la grande désunion des Maliens au moment où le pays est menacé dans son existence. Et tous voient le danger venir. Mais, au lieu de s’unir et d’unir leurs efforts, les acteurs (politiques et membres de la société civile) offrent le spectacle affligeant de leur division. Chacun à son propre agenda ! Chacun défend ses intérêts ! Chacun est prisonnier de ses propres ambitions !
Comment dans ces conditions peut-on changer le cours des évènements et sauver le Mali ? C’est là toute la question.