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TÉMOIGNAGE : « Moi voilée, rejetée, critiquée, ignorée »
Publié le vendredi 22 novembre 2019  |  Mali Tribune
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« Queen Lumière« était le sobriquet à cette jeune fille, branchée, qui, subitement, a pris la décision de se voiler. Elle partage avec nos lecteurs son expérience.

« Agée d’une vingtaine d’année, étudiante, ma décision de me voiler m’a valu des quolibets et des moqueries. Mansha’Allah ! La vie nous donne à tous une seconde chance qu’il nous revient de saisir ou pas, de faire un choix, entre prendre un nouveau départ où demeurer sur le chemin que tu as choisi.

Le voile est très important dans la religion musulmane, si certains le voient comme un morceau de tissus, pour moi, il est une lumière. Le Coran demande à ce que la femme se couvre pour ne pas attirer, séduire les hommes : « Rabattez vos voiles sur vos poitrines« , précise le Coran. Je m’habillais avant très sexy, pantalons serrés, mini robes bustiers, mini-jupes… Mais du jour au lendemain, j’ai tout laissé et opté pour le hijab, qui n’est pas à confondre avec le niqab ou la burqa. Le premier couvre juste les cheveux et les membres, le second laisse voir juste les yeux et le dernier ne laisse rien voir !




Pourquoi avoir choisi de me voiler alors que toutes les jeunes filles de mon âge s’habillent sexy, collé-serré, est la question qui m’est constamment posée. Je n’ai jamais pris une décision qui m’ait autant éloigné de mes amies, qui ait fait de moi un sujet de discussion, de préjugés, de commérages, que ma décision de me voiler ! Je me suis voilée par simple conviction ! Se voiler n’est pas une faveur qu’on fait à Allah Azzawajel, mais un devoir, une obligation qui incombe sur toutes les femmes musulmanes. Telle est ma conviction. Je m’habillais comme les jeunes filles de mon âge mais un beau jour j’ai pris un foulard, et devant mon miroir je l’ai incorrectement mis. Ça m’a pris plus de 5 minutes pour pouvoir l’attacher correctement ! C’était ma première fois de me couvrir les cheveux !

Au moment de sortir de ma chambre, j’ai voulu l’ôter par peur des préjugés de la réaction du monde extérieur, je me suis souvenu des propos de cette prêcheuse de renom, Malmatou Mamy Sacko qui disait lors d’un séminaire sur le port du voile : ne remettez pas votre repentir à demain. Qui sait de quoi demain sera fait ? As-tu un contrat avec l’Eternel, sais-tu si demain ton âme se lèvera et que ton corps restera inerte sur le lit comme un caillou ?

Je suis sortie affronter les désapprobations, les moqueries et les interrogations. Ces moqueries ont failli, à plusieurs reprises, me faire abandonner, mais, convaincue qu’à mon Créateur je retournerais, que son approbation est plus importante que les piques, j’ai tenu bon.

J’ai parfois été tentée d’abandonner car mes amies ne me considéraient plus, disant que nous n’avons plus les mêmes sujets de discussions, et qu’on a plus grands choses en commun. J’ai été mise à l’écart comme une pestiférée. Ce qui m’a le plus choquée, c’est la réaction de certaines personnes à qui je tenais comme à ma vie mais qui ont été les premiers à me juger et à me coller des étiquettes. Des membres de ma famille me lançaient des piques comme se voiler du jour au lendemain, un changement à la hâte, que je vais finir par me lasser de mon nouveau look Selon eux, le voile ne veut pas dire piété. Certes l’habit ne fait pas le moine mais on reconnait le moine à son habit !

Je ne me sens en compétition avec personne, je veux juste devenir une meilleure personne chaque jour. Je veux les comprendre, étant la seule « voilée« de la famille. Alhamdoulillah, je n’ai pas cédé à la tentation, et même si certains propos me blessaient dans mon âme, je gardais mon éternel sourire. Être acceptée comme je suis n’est pas trop demandé, respecter la décision de quelqu’un n’est pas trop demandé. Tous ceux qui me juraient être prêts à prendre une balle pour moi ont subitement disparu, sans être juste capables d’être là pour moi, pour me soutenir et m’encourager.

Tous les liens sont sacrés et importants pour moi, je n’ai pas pris une balle pour mes amis. Mais j’ai pris des risques pour beaucoup d’entre eux, par Allah je ne regrette rien. Coté professionnel ?J’aimerais tant faire carrière mais avec le voile, je me demande si je ferais carrière. Il faut savoir qu’avec mon métier, je côtoie beaucoup d’hommes. J’évolue dans un milieu où la mixité est la règle. J’ai pensé à me tourner vers les entreprises islamiques qui n’embauchent en général que les voilées. Après les mots décourageant de mes collègues qui ne cessaient de me rappeler mon changement en me disant que je n’avais aucune chance dans mon domaine, en tant que Adja ou Malmatou comme on m’appelle ironiquement désormais, j’ai décidé de tenir.

Une fois, à une cérémonie, un monsieur a serré la main à tous les convives en m’ignorant, avec ce commentaire : « les voilées refusent de serrer la main des hommes, elles exagèrent« . Je me suis refugiée dans un coin pour pleurer comme la fille sensible aux critiques que je suis.

Je demande à ce que la société cesse de mettre un visage sur le voile, nous voilées, quoique nous fassions ou que nous disions la société nous juge.

Je suis voilée mais je reste la même fille banale et simple. J’ai besoin du soutien des miens, pas qu’ils soient les premiers à me blesser. Je ne regrette pas ma décision et je me sens bien dans ma peau avec mon hijab. Oui j’ai été rejetée mais ma décision reste irréversible, car grâce à cette décision, j’ai vu la lumière ».

Propos recueillis par

Oumou Fofana

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