Le monde politique a unanimement exprimé mardi son émotion après la mort de 13 soldats engagés au Sahel, où la stratégie d'engagement militaire d'Emmanuel Macron reste très largement soutenue, même si quelques fissures apparaissent à gauche.
Les minutes de silence observées au Sénat puis à l'Assemblée nationale ont témoigné du choc provoqué par la plus grosse perte en une fois de l'armée française depuis 36 ans.
Les 13 soldats décédés au Mali "ont sacrifié leur vie pour notre patrie", a déclaré le président de l'Assemblée, Richard Ferrand, résumant la tonalité des hommages exprimés à droite comme à gauche.
Christian Jacob (LR) a ainsi salué les soldats "partis se battre contre la barbarie islamiste", Olivier Faure (PS) ceux qui "poursuivent avec courage leur combat contre le terrorisme", Fabien Roussel (PCF) les "soldats mobilisés dans le combat commun contre le terrorisme" et Marine Le Pen (RN) les "camarades de combat qui font face au jihadisme".
L'heure est "au recueillement" et non "au questionnement sur le bien-fondé" de l'engagement militaire au Sahel, a souligné la ministre des Armées, Florence Parly.
Mais, tout en exprimant leur "vive émotion", les députés de La France Insoumise (LFI) ont affiché leur divergence. Ils ont appelé le gouvernement à "ouvrir une discussion sérieuse et rationnelle pour envisager les voies de sortie" de la "guerre" au Mali. Car, pour eux, "le sens" de ce conflit "échappe désormais à nombre de nos compatriotes et de Maliens eux-mêmes".
Répondant au député LFI Bastien Lachaud, le Premier ministre Édouard Philippe a qualifié d"indispensable" l'action militaire au Sahel, car il en est de "l'intérêt de notre pays". "L'utilisation des forces armées est toujours politique", a-t-il expliqué, en affirmant que les "objectifs politiques" de l'opération avaient "été affirmés et réaffirmés".
En janvier 2013, lorsque le président François Hollande avait lancé l'opération Serval, le chef de LFI Jean-Luc Mélenchon avait été l'un des rares responsables politiques à exprimer des réserves en jugeant "discutable" cet engagement militaire.
- pas de sortie envisagée -
Depuis lors, la montée en puissance de l'engagement français au Sahel - dans le cadre de Serval puis de Barkhane - n'a guère été contestée ou remise en cause sur la scène politique. Les débats ont d'ailleurs été limités alors qu'il s'agit de la plus importante opération française à l'étranger, avec 4.500 soldats déployés et d'importants coûts, qui s'est jusqu'à présent soldée par la mort de 41 Français.
L'hypothèse d'une sortie n'est pour l'instant pas envisagée, comme l'a réaffirmé Édouard Philippe le 18 novembre à Dakar, en appelant à "ne laisser aucune chance, aucune prise" aux groupes jihadistes dans le Sahel.
Quelques jours plus tôt, Emmanuel Macron avait annoncé qu'il serait appelé prochainement à "confirmer et conforter l'engagement" de la France dans la région, notamment en reprécisant "le rôle de Barkhane".
En se déplaçant à l'étranger ou en participant à des sommets, comme celui du G7 en septembre, le président ne perd pas une occasion d'alerter la communauté internationale sur l'aggravation de la situation sécuritaire au Sahel, sans cacher sa frustration devant le peu d'empressement de nombreux pays à s'engager aux côtés de la France. "Je vais rappeler à l'ordre" des pays partenaires "qui s'étaient engagés dans l'Alliance pour le Sahel et qui tardent parfois à livrer leur aide", a-t-il déclaré le 12 novembre.
"Nous sommes de moins en moins seuls au Sahel", a toutefois affirmé mardi Florence Parly.
A la question: "Faut-il retirer l'armée du Mali?", le sénateur LR Bruno Retailleau a répondu mardi: "Bien sûr que non". Car "la France est en première ligne dans la lutte contre l'islamisme, là bas et ici. C'est une guerre. Il n'y a pas d’étanchéité entre l'intérieur et l'extérieur", a-t-il expliqué, en faisant le lien avec la mort de quatre fonctionnaires lors d'une attaque à la préfecture de police le 3 octobre.
La classe politique devrait rendre hommage aux 13 soldats au cours d'une cérémonie aux Invalides dans les prochains jours. Avant qu'Emmanuel Macron ne célèbre les fêtes de fin d'année auprès de militaires déployés à l'étranger, comme il l'avait fait en 2017 au Niger et en 2018 au Tchad.