L’utilisation anarchique du cyanure dans les sites d’exploitation artisanale de l’or prend de l’ampleur. À la faveur d’une conférence de presse, tenue en marge du dernier Conseil d’Administration de la Mine d’or du complexe Loulo-Gounkoto, les responsables de la société Barrick Gold Corporation ont attiré, l’attention sur le phénomène.
«Des preuves à notre possession font état de l’utilisation artisanale et abusive du cyanure, frauduleusement introduit sur les sites d’orpaillage traditionnels de la région de Kayes », avertissent-t-ils.
Le cyanure étant connu pour sa toxicité et ses effets néfastes à moyen et long terme, sur la santé des populations et l’environnement, il est demandé à toute personne de signaler tout cas suspect ou avéré d’utilisation de ce produit aux forces de sécurité, préviennent-ils. Le cas le plus actuel est la saisie d’un camion rempli de cyanure par le service des douanes dans le cercle de Kéniéba.
Cette situation est bel et bien fondée. Et le constat est amer sur les sites d’orpaillage traditionnel que nous avons visité, en Octobre dernier, à Kéniéba. Dans les mines traditionnels, des jeunes orpailleurs par ignorance ou par négligence, utilisent ce produit nocif sans aucune précaution pour extraire le ‘’métal précieux’’.
Malgré l’interdiction par le Ministère en charge des mines de l’utilisation des produits chimiques dans l’orpaillage, le phénomène bat son plein sur les sites d’exploitation artisanale. Le plus grave, c’est qu’avec l’utilisation de ces produits toxiques dans le traitement du minerai, les orpailleurs font courir le risque d’une catastrophe écologique dans la région de Kayes. Le phénomène est de plus en plus grandissant et les coupables ne s’en cachent d’ailleurs plus. De nombreux sites et villages sont devenus le théâtre d’une cyanuration abusive et incontrôlée qui ne dit pas son nom. Après de longues campagnes de sensibilisation à l’utilisation abusive des produits chimiques nocifs et dangereux tels que le cyanure et le mercure, les départements, environnement et développement communautaire de la mine de Loulo-Gounkoto avaient lancé un appel à lutter contre la pratique de cyanuration non maîtrisée à Kéniéba. Ainsi, ces départements ont fait cas de la situation des orpailleurs de la localité de Kéniéba installés sur le permis d’exploitation de Barrick, en violation flagrante des textes.
Selon les responsables de la mine, cette localité est le plus touchée par ce phénomène nuisible. Ils ont dit que plusieurs localités de la région de Kayes comme les villages de Djidan, Sakolabada, Mahinamine, Sitakili et Boribanda, sont aussi en proie à ces prédateurs qui sont sans loi ni foi. La SOMILO (Société minière de Loulo) a relevé que la ‘’cyanuration’’ par les orpailleurs installés, frauduleusement, sur son permis à Loulo, prend des proportions inquiétantes. «Sur le site du filon rouge à Loulo et à Gounkoto, des individus s’adonnent régulièrement à la ‘’cyanuration’’ au vu et au su de tout le monde. Du reste, des éleveurs de la zone ont perdu quelques animaux, du fait de la contamination des eaux. Le site de filon rouge n’est un cas isolé, on peut également citer les sites d’orpaillage artisanale de Sadiola, Yatéla, Kangaba… où la cyanuration est devenue une activité banale », ont-ils déploré.
Le comble, c’est que ces individus ignorent tout sur les conditions d’utilisation et les méthodes de prévention des risques. Devenu le premier produit d’exportation du Mali, l’or risque, si rien n’est fait, de passer également au premier rang des causes de décès dans notre pays. Les populations sont de plus en plus exposées au risque de contamination au cyanure. Dans certaines localités de Kayes, c’est à quelques encablures du marché que des individus pratiquent la ‘’cyanuration’’. Vivement que des mesures fortes soient prises par les autorités maliennes pour contrecarrer cette pratique dangereuse pour l’homme et son environnement.