L’assassin de l’imam Abdoul Aziz Yattabaré, ancien vice président du Haut conseil islamique (HCI) a été condamné à la peine de mort le mardi 19 novembre 2019 à Bamako. Le procès s’est déroulé devant la Cour d’assises.
Venus nombreux assister au jugement les proches de la victime se disent soulagés par le verdict prononcé alors que des défenseurs des droits humains se battent pour l’abolition de la peine capitale dans notre pays.
Le jugement n’aura duré que quelques heures. Moussa Guindo, accusé d’avoir assassiné l’imam Yattabaré, a été rapidement fixé sur son sort. La cour lui a requis la peine de mort, à la «grande satisfaction» des proches de la victime et de nombreux fidèles, venus assister au procès.
«Ils étaient des centaines de femmes et d’hommes à prendre d’assaut la salle d’audience et la devanture de la Cour d’appel où s’est tenu le jugement». Et ils n’ont pas cessé de réclamer la peine de mort pour l’assassin. Certains scandaient «Allah Akbar», c’est-à-dire «Dieu est Grand». D’autres exigeaient que «justice soit dite pour la gloire de Dieu». «La charia dit quand tu tues un homme, tu dois être aussi tué», a rappelé l’ancien président du HCI-Mali, l’imam Mahmoud Dicko présent au procès.
Une centaine de policiers et militaires avait été mobilisés pour sécuriser le tribunal et éviter les débordements. Interpellé à la barre, l’accusé Moussa Guindo reconnaît avoir assassiné l’imam Abdoul Aziz Yattabaré le 19 janvier 2019, alors que ce dernier se rendait à la mosquée. Pour l’un de ses avocats, il a été établi que l’accusé n‘était pas en possession de toutes ses facultés mentales. Mais, malgré cet argument, le verdict est tombé : Moussa Guindo est condamné à mort pour assassinat.
Une partie de la salle crie victoire et des responsables d’associations musulmanes présents, réclament l’application stricte de la sentence. Il faut rappeler qu’au Mali, la peine de mort n’est pas abolie. Cependant un moratoire décrété fait qu’elle n’est pas appliquée depuis de nombreuses années.
De nombreux fidèles musulmans ainsi que des dignitaires religieux ont fait le déplacement pour assister au jugement. Dans la salle d’audience et au dehors, ceux-ci réclamaient la peine de mort pour l’accusé. Est-ce que la mobilisation a influencé la décision de la cour ?
Beaucoup d’activistes qui se battent contre les violences faites aux femmes répondent par l’affirmative. Et ils sont nombreux à dénoncer le «déséquilibre» entre le verdict de l’assassin de l’imam Yattabaré et ceux prononcés contre des auteurs de crimes passionnels. En effet les «assassins de femmes» s’en sortent souvent avec «seulement dix ans» de prison.
Le comité de suivi promet de veiller à ce que la loi soit strictement appliquée
«Celui qui a tué l’imam doit avoir la même sentence que celui qui tue une femme : la peine de mort», souhaite sur les réseaux sociaux Balla Mariko, activiste de la lutte contre les violences basées sur le genre. «A défaut de la peine capitale, tous ceux qui assassinent froidement leurs épouses doivent être condamnés à des peines de prison à vie parce qu’ils représentent des dangers pour la société», défend un jeune activiste. Mais pour certains, si une vie n’est pas plus importante qu’une autre, «beaucoup de paramètres» sont pris en compte dans le verdict d’un procès !
Rappelons que le 19 janvier dernier, Moussa Guindo (26 ans) a attaqué l’Imam Yattabaré qui se rendait à la mosquée aux environs de 5 heures du matin en lui assénant plusieurs coups de couteau. Il s’est ensuite rendu au commissariat du 3e Arrondissement de la police pour sans doute échapper à un lynchage. Mortellement poignardé à plusieurs reprises, l’Imam rendra l’âme à la Polyclinique Pasteur quelques minutes après.
Au cours de l’audience, la thèse selon laquelle Moussa Guindo serait un débile mental a été réfutée par la partie civile et confirmé par l’intéressé lui-même. «Les rapports d’expertise n’ont précisé à aucun moment que Moussa Guindo n’était pas sain d’esprit au moment où il commettait son crime. Et ce matin, les débats ont démontré qu’il était lucide que son discernement n’était pas aboli», a défendu un avocat de la partie civile.
Après plus de 4 heures d’audience, le ministère public a requis la peine de mort contre l’accusé Moussa Guindo. Un verdict salué par les soutiens de la victime. «Moussa Guindo, l’assassin de notre frère et collaborateur vient d’être condamné à mort conformément à la loi après avoir été auditionné. Il a 3 jours pour se pourvoir en cassation… Et nous ne baisserons pas la garde parce qu’il ne faut pas qu’on vienne nous dire un jour qu’il s’est évadé. Nous ne voulons pas de moratoire, il faut que la loi soit appliquée dans toute sa rigueur», a insisté Mohamed Kimbiri membre la commission de suivi de l’affaire Imam Yattabaré.