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Le Général Yahya Sangaré: à CŒUR-Ouvert «L’application de la charia par les armes tout comme l’opposition systématique à la charia par les armes sont autant anti- démocratiques»
Publié le mercredi 18 decembre 2019  |  L’express de Bamako
Djihadistes
© Autre presse par DR
Djihadistes
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Mon Général, il y a près de trois (03) ans, plus précisément, le 29
juin 2017, vous avez écrit ceci: «Si l’application de la charia par les
armes ne peut qu’être anti-démocratique, il est que l’opposition
systématique à la charia par les armes est aussi anti-
démocratique…» «Nous ne devons pas nous priver d’envisager ou
de penser à des solutions conformes à nos moyens… Nous ne
pouvons pas continuer à compter nos morts chaque jour que Dieu
fait, et ce dans l’ignorance du lendemain…»
«Nous sommes des Maliens, et l’effort de trouver le moyen pour se
parler, s’écouter et se comprendre est plus que jamais nécessaire, voire
indispensable.» «La France ne peut continuer à soutenir une politique
dont elle n’a pas les moyens, et souhaitons que l’existence des forces
africaines soit une réalité, même si nous n’avons souvenir d’aucun
exemple d’une réussite de collaboration africaine.»
Question: Mon Général, compte-tenu de la situation actuelle que
nous vivons, je voudrais savoir comment vous l’analyser et si vous
pensez toujours la même chose qu’en 2017 ?
Le Général Yahya Sangaré: Permettez-moi d’avouer que j’aurais
souhaité m’être trompé pour le bonheur du peuple malien, mais hélas !
La situation d’aujourd’hui est grave et n’est ignorée de personne. Dans
un traumatisme collectif, nous sommes réduits à des accusations et
déductions qui n’apportent aucune solution aux problèmes posés. Nous
substituons aujourd’hui la conséquence à la cause, tout en nous
éloignant d’une probable solution. Pour ce qui est du rapport France-
Afrique, je ne me permettrais pas d’affirmer ce que je ne peux prouver !
Mais certains faits réels me permettent de me faire une idée et une
opinion sur tout ce qui s’est passé.

Quand j’étais étudiant en France, j’ai vu sur le plateau de TF1 un
chameau avec des commentaires sur des hommes bleus, et ce avec
Danielle, épouse de François Mitterrand. Bien après, j’ai su qu’un
corridor a été ouvert pour Iyad Ag Ghaly après l’attaque dite «djihadiste»
de Konna. A l’issue de cette attaque, l’armée malienne fut interdite
d’entrer à Kidal. La France relèvera son ambassadeur au Mali, le jugeant
incapable de défendre les intérêts de la France pour avoir critiqué le
mariage entre le MNLA et la France. Les équipements fournis au
Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) par la France ont
été mis en sécurité en Mauritanie pendant cette période de Konna.
Si aucune réponse n’a été donnée aux décideurs maliens par rapport à
toutes ces questions qu’ils étaient en droit de se poser, force est de

constater la constance dans la politique française ! Des prélèvements
sur les scènes de crime nous auraient permis de connaitre l’origine des
munitions et la provenance des armes. La présence d’officiers maliens
au sein des forces étrangères et au niveau du commandement
opérationnel aurait évité certains doutes, si vraiment cela constituait un
souci. Mais, malheureusement, nous n’analysons rien des scènes
d’attaque, nous ne sommes pas présents à aucun niveau de
commandement opérationnel… Pourquoi alors ?

Nos enfants meurent tous les jours, et sont accusés les djihadistes ! Au
Mali, nous avons une chance énorme, celle de pouvoir échanger avec
Amadou Kouffa et Iyad Ag Ghaly ! Nous ne devons pas attendre que les
maîtres penseurs finissent par nous demander de négocier quand nous
serons abandonnés à notre sort… Ces deux adeptes de la charia ont été
pourtant très clairs avec le Mali: «Nous ne voulons pas la division du
Mali, nous voulons l’application de la charia…» Amadou Kouffa a déclaré
souhaiter le départ des forces étrangères afin qu’entre nous, nous
puissions échanger.

Nos soldats et les forces étrangères les combattent. Vous comprendrez
qu’il leur faut se défendre pour défendre leur objectif identifié, même si
nous ne le comprenons pas exactement. Avec les forces étrangères, nos
soldats sont tués par dizaines et la situation s’empire de plus en plus…
Ce, au point que nous concluons qu’elles ne sont d’aucune protection,
voire d’aucune utilité ! Alors, pourquoi attendre d’elles une solution qui,
visiblement, ne sera jamais ? Certain est que quand la France fera
échec dans sa politique, elle sauvera ses meubles et nous abandonnera
à notre sort dans une plus dramatique situation !
Nos ancêtres ont toujours privilégié le dialogue, lequel permet d’éviter le
constat d’une incapacité totale. C’est l’unique signe de la sagesse et de
la grandeur d’un peuple à travers ses dirigeants. Il nous faut éviter de
considérer les conséquences d’une opposition systématique à la charia
telles les causes de la situation actuelles. Est-ce que dans ce combat les
acteurs ont les mêmes objectifs ? Sur quelle victoire pouvons-nous
compter ?

Nous ne pouvons attendre davantage ! L’unique solution est la sincère
négociation ou le vrai dialogue entre enfants du même pays, sans
oublier que cela ne convient pas à tout le monde. Et quand la
négociation permettra de faire taire les armes et qu’aucune attaque ne
puisse être attribuée aux djihadistes, nos soldats ne pourront plus être
tués à visage masqué !
Mieux, nous saurons si les attaques ou les présences sont pour le
Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) ou contre les
djihadistes et l’intégrité du territoire malien ! Nous pourrons être certains
que les séparatistes ne vaudront que si la situation reste trouble !

Une Correspondance particulière
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