Face à la multiplication des attaques djihadistes au Sahel, Emmanuel Macron réunit ce lundi après-midi les présidents des cinq pays partenaires de la force Barkhane, pour renforcer la légitimité contestée des militaires français sur place.
Le choix du lieu est lourd de sens. Pau, la ville où se trouve le 5e régiment d'hélicoptères de combat (RHC), c'est-à-dire la base d'où sont partis sept des treize soldats français morts dans la collision de leurs appareils aux confins du Mali, le 26 novembre. C'est là qu'Emmanuel Macron a choisi de convier les dirigeants des cinq pays du Sahel où opèrent les 4500 militaires de la force Barkhane (Mauritanie, Mali, Niger, Tchad, Burkina Faso) pour une réunion d'explication de texte. Le sommet du G5 Sahel aurait dû se tenir en décembre, mais il a été annulé après l'attaque djihadiste d'Inates, au Niger, la plus meurtrière depuis 2015 (71 morts). Finalement, il s'ouvre ce lundi après-midi, au château de Pau.
Le rendez-vous a été convoqué pour tenter de remédier à un « double décrochage » selon l'expression d'un diplomate de haut rang. Celui des armées sahéliennes qui essuient presque toutes de lourdes pertes. La dernière s'est produite jeudi à Chinegodar, au Niger, où 89 soldats ont été tués près de la frontière malienne. Celui de certaines opinions publiques aussi.
Depuis des mois, un sentiment anti-français s'instille auprès des opinions publiques maliennes et burkinabées. Un état d'esprit que semblent entretenir avec ambiguïté certains dirigeants politiques… et qui irrite grandement Paris. Vendredi, un millier de Maliens ont encore manifesté à Bamako, la capitale, pour réclamer le départ des troupes étrangères, en particulier françaises.
Mobiliser les alliés internationaux
En haut lieu, on attend de cette rencontre une déclaration commune des cinq pays qui assume clairement la présence militaire sur place. « C'est tellement facile de dire que l'armée française est une armée coloniale, s'agaçait Emmanuel Macron, en petit comité, il y a quelques semaines. Je ne veux pas ça pour nos soldats dans les pays où on est. Je ne peux pas les envoyer au charbon dans ces conditions. Je veux des engagements. » Soit l'assurance, exprimée à la tête des Etats concernés, que la présence française est choisie et non pas subie.
« Ce que j'attends, c'est un discours de vérité. Si cette clarté politique n'est pas établie, la France, dans certains pays, en tirera toutes les conséquences », menaçait même le président, ouvrant la porte à un retrait de la force Barkhane ou à sa décrue.
Outre ce volet politique, le sommet de Pau vise à recadrer la stratégie militaire dans cette région désertique vaste comme l'Europe et à y relancer l'alliance antidjihadiste. Notamment en tentant de mobiliser les alliés internationaux, au premier rang desquels les Européens. Paris espère que ce rendez-vous convaincra ses partenaires de l'Union. Ces derniers soutiennent l'opération Barkhane, mais se montrent rétifs à s'engager compte tenu des critiques qu'essuie la France sur place. Autre motif de préoccupation pour Paris : les hésitations des Américains dont l'appui militaire reste essentiel.