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Le Mali, Etat de droit. Quel droit ?
Publié le vendredi 24 janvier 2020  |  Infosept
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© Autre presse par DR
Échangeur à deux roues Pond Fahd - Hôtel Salam - CICB enfin ouvert à la circulation
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L’on aime souvent répéter que le Mali est un Etat de droit et que nul ne saurait être au-dessus de la loi. Il s’agit là d’une rhétorique que les politiciens du camp du prince du jour aiment chanter pour continuer à jouir des privilèges de la cour de Koulouba. En république du Mali, qu’est donc le droit ? Ou plus précisément, qu’est-ce que la loi ?

La soixantaine presque atteinte, le pays peine à combler l’espoir immense d’un Etat fort qu’il a suscité aux premières heures de l’indépendance. Un Etat qui se nommerait « Le Mali » ne saurait être en queue de peloton des pays africains. Surtout que, comme aime le rappeler le président IBK, Nous fûmes alors que beaucoup n’étaient pas.
Mais sérieusement, à quoi peut bien servir ce genre de rengaine alors que le patriotisme est foulé aux pieds quotidiennement ?

La crise multidimensionnelle, en grande partie, n’est que le reflet de notre propre miroir. Aimer son pays, c’est se sacrifier jour après jour afin de rendre l’édification nationale une réalité. Et non se servir d’envolées lyriques pour enfoncer toujours plus l’intérêt général pour son seul intérêt privé.
Au Mali, la loi c’est le bras long, les petits arrangements, l’argent sous la table, et la dépravation des mœurs. Le tout prolifère en toute impunité à cause de notre légendaire social. En réalité, cela peut se résumer en une seule phrase : l’excès de social, tue le social. Car c’est la frange la plus importante qui souffre. Celle pauvre, très peu alphabétisé et important en nombre.
Quant à nos politiques, au lieu de s’empresser afin de jouir de quelques retombées économiques, qu’ils réfléchissent au modèle qui sied le mieux à un pays comme le Mali.

Appliquer au pays ce qui est naturel ailleurs, est contre-productif. Car, les grandes démocraties du monde sont parvenues à leur propre système politique de manière quasi-naturel, au bout d’un long cycle de changement et de révision institutionnelle. Parmi elles, certaines ont fait un mix ingénieux des systèmes politiques tout en l’adaptant à la sauce locale. D’où cette question : et si l’échec du Mali à prendre en main son destin comme tout pays souverain était aussi dû à son système politique en grand déphasage avec les réalités du pays ? Le constat est suffisamment limpide. L’on applique machinalement ce qui se passe en Occident, en France surtout, sans même se donner la peine de le modeler selon les réalités culturelles du pays.

A titre de rappel, le système politique est un mode d’organisation d’un État. Il comprend notamment le régime politique, la structure économique, l’organisation sociale. Mise à part le fait que le Mali est bel et bien une démocratie, quoique balbutiante, le reste demeure flou pour le citoyen lambda. Le multipartisme est aussi une composante essentielle d’une démocratie. Mais, quand le nombre de partis politiques atteint plus de 176 pour un pays qui compte à peine 18 millions d’habitants, il y a lieu de s’interroger sur l’utilité même de la politique dans le pays. Les partis politiques poussent comme des petits champignons sans même que l’on prenne connaissance de l’idéologie de tel ou tel parti.

Un autre fait qu’il faudra prendre en considération, c’est l’usage du français dans l’espace public. Dans un pays où le taux d’analphabétisme est très élevé, les instances dirigeantes doivent utilisés, le plus possible, la langue locale la plus parlée, en l’occurrence le bamananka. Des efforts ont été fournis dans ce domaine ces dernières années, notamment à travers le journal télévisé en langue bamananka diffusée tout juste après celui du 20 h en français ; et aussi l’inclusion de la langue nationale dans l’enseignement. Mais, cela reste assez timide, et le citoyen lambda ne comprend toujours pas le langage des élites.

La nouveauté dans le système politique malien est le statut du chef de file de l’Opposition. Là encore, il est fort à craindre, que nous ayons, encore une fois, assez mal copier ce qui se passe sous d’autres cieux. Et d’ailleurs, au Mali, très peu de gens peuvent percevoir le rôle, et surtout toutes les subtilités d’un Chef de file de l’Opposition ainsi que de son bureau. Dès lors donc, son existence même est sujette à question.

Beaucoup pensent que donner 500 millions de F CFA par an à un groupe de gens uniquement pour critiquer, est de l’argent gaspillé. Ceci n’est vrai qu’en partie, car si le rôle du bureau du chef de file de l’Opposition n’est comprise et admise que par une minorité lettrée, la somme de 500 millions est, en réalité, dérisoire par rapport aux nombreuses tâches qu’il doit effectuer dans son rôle, éminemment important dans une démocratie, de suivi secteur par secteur de l’action gouvernementale. Par exemple, en Grande-Bretagne, le chef de file de l’Opposition est à la tête de ce que l’on appelle le cabinet fantôme, (the shadow cabinet) doté de presqu’autant de moyens humains et financiers que le gouvernement en place. Au Mali, pour l’heure, l’on est très loin d’exercer ce concept dans les règles de l’art.

Et, lorsque l’on remarque lors de la dernière présidentielle, que le triomphe d’IBK au second tour avec plus du double des points gagnés par son challenger Soumaila Cissé, est surtout le triomphe de l’argent et de diverses promesses matérielles, il est judicieux de se demander sur la capacité du Mali à exercer pleinement la démocratie. L’occasion sera donnée au cours du dernier quinquennat d’IBK de rectifier autant que possible les anomalies du système politique malien par la révision constitutionnelle qui devra se faire, vaille que vaille. Avis donc aux experts pour que la prochaine constitution ne soit pas une constitution de plus, ne prenant pas en compte les réalités maliennes.

Ahmed M. Thiam
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