Après la libération provisoire d’Amadou Haya SANOGO et de ses co-accusés, l’affaire sera-t-elle menée à son terme, s’interrogent la FIDH et l’AMDH s’interrogent à travers un communiqué en date du 28 janvier 2020.
La Fédération Internationale pour les Droits Humains (FIDH) et l’Association Malienne des Droits de l’Homme (AMDH) prennent acte de l’annonce, aujourd’hui, de la libération provisoire d’Amadou Haya Sanogo et appellent les autorités judiciaires à mener cette affaire à son terme.
Le 13 janvier déjà, le «procès d’Amadou Haya Sanogo» et de ses 17 co-accusés aurait dû reprendre. Alors que cette reprise était attendue depuis le 8 décembre 2016, nos organisations demandent à ce qu’une nouvelle date du procès soit fixée sans tarder.
Le 9 janvier 2020, soit quatre jours seulement avant la date prévue du procès, le parquet général près la Cour d’appel de Bamako annonçait le report, motivé par les « contraintes majeures liées à la préservation de l’ordre public et de la cohésion au sein des Forces Armées mobilisées pour la défense de la patrie« .
L’annonce du report, puis la libération provisoire d’Amadou Haya Sanogo et de ses co-accusés, interviennent quelques mois après qu’ait été votée et promulguée de la loi d’entente Nationale, le 2 août 2019. Cette loi avait suscité une vive opposition de la société civile malienne, dont l’AMDH, qui craignait que cette loi ne consacre une impunité généralisée pour les crimes commis depuis 2012 dans le pays.
«Nous ne pouvons nous opposer désormais à ce que la Loi d’Entente Nationale soit appliquée, car elle a été votée. Mais nous tenons à rappeler les conséquences de cette loi, qui risque de consacrer l’impunité pour une partie des crimes commis au Mali ces dernières années, sauf les crimes de guerre, crimes contre l’humanité ou viols. Or ces qualifications ne sont qu’exceptionnellement retenues. Dans les faits, cette loi d’entente nationale risque par ailleurs d’empêcher que des procès prévus de longue date se tiennent ou se déroulent jusqu’à leur terme».
Contexte :
Les 21 et 22 mars 2012, alors que le Mali fait face depuis janvier 2012 à une offensive de groupes armés notamment djihadistes ayant déjà conquis près d’un quart du pays, un groupe d’officiers subalternes renverse le président Amadou Toumani Touré. Ces militaires prennent le pouvoir à 40 jours de l’élection présidentielle prévue, et instaurent une junte militaire dénommée Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’État (CNRDRE), avec à leur tête le capitaine Amadou Haya Sanogo.
Le 30 avril 2012 se déroule une tentative de contre-coup d’État, menée par des éléments du 33ème Régiment des Commandos Parachutistes (RCP). Cette unité d’élite de l’armée communément appelée « bérets rouges» a à leur tête le lieutenant colonel Abdina Guindo, restée fidèle à l’ancien chef de l’État Amadou Toumani Touré. Elle est mise en échec et violemment réprimée par les putschistes, qui capturent plusieurs dizaines de bérets rouges.
Dans la nuit du 2 mai 2012, 21 militaires bérets rouges sont sortis de leurs cellules à Kati et transportés dans des camions militaires vers Diago, une localité proche de Kati, quartier général de la junte militaire, situé à une quinzaine de kilomètres de Bamako. Ils y sont exécutés et enterrés dans une fosse commune.
Le 22 décembre 2015, la Chambre d’accusation de la Cour d’appel de Bamako met en accusation Amadou Haya Sanogo et 17 co-accusés et décide de les renvoyer devant une Cour d’assises pour y être jugés des crimes d’enlèvement et d’assassinat, ou de complicité de ces dits crimes.
Presque un an après la décision de la Chambre d’accusation, le 30 novembre 2016 s’ouvre le procès Sanogo et de 17 autres, pour enlèvement et assassinat et complicité d’enlèvement et d’assassinat. Une session spéciale de la Cour d’assises est organisée à cette fin. Elle est transportée à Sikasso, à 380 km de Bamako, pour des raisons de sécurité.
Le 8 décembre 2016, après plusieurs jours de procès, la Cour décide le renvoi de l’affaire à la première session d’assises de 2017, afin de permettre la conduite d’une nouvelle expertise médicale dans un délai de 45 jours, la première n’ayant pas été conduite conformément aux procédures prévues par le droit malien.