Le Gouvernement du Mali, lors d’un conseil des ministres, a convoqué le collège électoral en vue de l’élection des députés à l’Assemblée Nationale. Si cette nouvelle a été applaudie par des associations de la société civile et certains partis politiques qui se battaient pour cela depuis près de deux ans, elle a plutôt suscité des inquiétudes chez une grande majorité des maliens à cause de l’insécurité qui touche aujourd’hui les 3 /4 du territoire national. La question que beaucoup d’observateurs et mêmes d’acteurs politiques se posent est celle de savoir s’il faut aller dans ce contexte sécuritaire difficile, au risque de provoquer une crise post-électorale ? Ou s’il faut reporter ces législatives, afin de convenir de façon consensuelle à un véritable schéma accepté par tous les acteurs politiques. Voici quelques propositions.
Le gouvernement, sachant bien qu’il serait difficile de faire avaler aux acteurs politiques une troisième couleuvre d’une prolongation du mandat des députés, tient coute que coute à organiser les élections législatives avant la date butoir du 2 mai 2020. Un chronogramme du processus électoral est même sorti et les acteurs politiques se sont prononcés. Si pour certains, il faudrait y aller pour éviter une autre prolongation du mandat des députés, d’autres au contraire, pensent qu’il faut encore reporter pour ne pas connaitre après les élections une autre crise postélectorale, à l’image de celle de 2018. L’idéal aurait voulu que ces élections soient reportées pour donner toutes les chances au processus de pacification en cours, ce qui ne serait pas sans conséquences.
Première conséquence d’un autre report
La dissolution de l’Assemblée Nationale après le 2 mai 2020 avec l’accord de tous les acteurs politiques. Si dans quarante jours, conformément à la Constitution, le gouvernement n’est pas en mesure d’organiser des élections, il pourra mettre en place un collège transitoire composé de toutes les forces représentatives du pays. Ce collège transitoire jouera le même rôle que l’Assemblée Nationale, en légiférant et en contrôlant l’action de l’exécutif. Les mécanismes de choix des hommes et des femmes qui doivent figurer dans cette chambre peuvent faire l’objet d’une large concertation entre les acteurs de la classe politique et de la société civile.
Deuxième conséquence du report
La mise en place d’un gouvernement d’union nationale pour exécuter les affaires courantes en attendant la mise en place d’une Assemblée Nationale légitime. Ce gouvernement d’union nationale sera composé par les forces politiques au prorata du nombre de députés qu’elles avaient à l’hémicycle sortant. Les principales missions de ce gouvernement seraient la pacification du pays et la réunion des conditions optimales pour la tenue des élections législatives inclusives sur toute l’étendue du territoire national.
Troisième conséquence du report
Le rétablissement d’un dialogue entre tous les acteurs pour une décrispation de la tension politique. Si tous les acteurs sociopolitiques se reconnaissaient dans le gouvernement d’union nationale, il y a de fortes chances que les positions, hier antagoniques, puissent se rapprocher aujourd’hui afin d’aboutir à des résultats les plus consensuel possibles. Ce cadre de dialogue brisera le mur de méfiance et de suspicion qui ont caractérisé les rencontres des deux pôles politiques, à savoir la Majorité et l’Opposition.
En somme, face à la recrudescence des attaques au centre et au sud, au regard du nombre croissant des déplacés et compte tenu du fait que l’Etat malien n’exerce pas son autorité sur les ¾ du territoire national, il serait utopique de s’engager dans un processus électoral dont l’issue est incertaine.