Aujourd’hui dans cette 38ème lettre, grand-père, j’ai peur. J’ai très peur quand je regarde l’horizon. Quand je regarde loin ces ethnicités, ces territorialités et ces religiosités qui deviennent de plus en plus politiques. J’ai peur face à nos valeurs qui se perdent dans l’océan de la modernité. J’ai peur quand tous les porteurs de revendications utilisent leur dernière force, leur dernière arme. Aucune place au dialogue ni chez les syndicalistes, ni les rebelles non moins les djihadites. Personne ne regarde ce Mali à qui nous devons tous. Le Mali bâti sur la Charte de Kuru Kan Fuga, du Dialogue et de la concertation franche. La Charte du Mandé. Quand je vois la mort de cette patrie dans tous les cœurs, j’ai peur.
Oui ! Cher grand-père, quand je vois ces mines de conflits et de guerre. Quand je vois cette stigmatisation et ces confiances brisées. Quand je vois les lois et les accords piétinés sachant qu’on tient les animaux par leur queue et les hommes par leur parole, j’ai peur grand-père. J’ai peur pour mon Mali.
Cher grand-père, je t’informe que les déclarations de politique générale du dialogue national exclusif n’ont pas tracé les voies voulues. Le triumvirat ne nous a conduits qu’au Canada. Et pourtant, tout plane. Toutes les mines sont restées.
Cher grand-père, un grand pansement s’impose. Oui une 4ème République nous appelle. Nous devrions y aller bon gré avant qu’il ne soit malgré. Des retraites politiques s’imposent. Une voie est indispensable. Comme après Kirina, comme après mars 91, une autre refondation du Mali est obligatoire. Un sacrifice grand est plus qu’attendu. On a touché le fond.
Cher grand-père, nous avons le Général Moussa Traoré des grandes époques, Alpha Oumar Konaré des grandes institutions, ATT des grands chantiers, Sanogo de la grande force, Dionkounda de la grande résistance et IBK des grands accords. Nous avons de quoi nous en sortir. Nous avons le grand potentiel d’encre pour retracer les voies de Modibo Keïta. Oui cher grand-père, nous avons l’espoir ! Nous pouvons refonder le Mali de toutes les contrées unies. Le Mali du Khasso, du Mandé, du Bélédougou, du Ségourie, du Macina, du Kounari, de Guimbala, du Bourgou, des Ifoghas et de l’Azawad, de Taoudana. Un Mali, riche divers et fort uni. Oui nous pouvons ! Et c’est le seul moment.
Cher grand-père, les mots de l’affamé ne pèsent pas lourd chez le boucher mais ils peuvent sauver des morceaux de viande. Le Mali a aujourd’hui tous les instruments et toutes les opportunités pour se refonder. Après la tempête, il faut de nouveaux piliers pour le temple. Qu’on refonde et qu’une nouvelle page s’ouvre. Les “26 marsiens” n’ont qu’à retourner à leur planète pour un adieu à cette démocratie dormante et élitiste. Aucun avenir n’est radieux au pays des ignorants. A mardi Incha’Allah !