« Je suis un homme d’alternance. On dit souvent que l’homme politique se révèle véritablement lorsqu’il accède au pouvoir. C’est faux, il se révèle lorsqu’il quitte le pouvoir. »Parole de président ! Celle d’Alpha Oumar Konaré, dont le lourd silence observé, depuis sa retraite « dorée », sur les berges du Joliba à Titibougou, continue encore d’intriguer de nombreux maliens, sur les raisons réelles de son mutisme. Cela fait naturellement débat, lorsqu’on sait qu’il fut, pendant ses années d’exercice du pouvoir, il fut incontestablement une des plus grandes voix du continent africain.
Le président Alpha Oumar Konaré est surtout l’inventeur du fameux concept de « pays frontière », car disait-il : « l’Afrique est le continent du monde ou les populations migrent le plus et les collectivités locales africaines sont les points d’origine et de destination des principaux flux de migration. Néanmoins les frontières africaines sont parmi les plus contraignantes au monde et mettent un frein important à la libre circulation des africains au sein de leur continent, au contraire de la dynamique observée sur ce plan dans les autres régions notamment en Europe. Il a alors proposé de faire évoluer les frontières nationales de points de rupture en points de suture.il a suggéré pour cela, de mettre en place des « pays frontières » espaces transfrontaliers au sein desquels serait promu le partage des équipements et services de part et d’autre des frontières nationales, ce qui créerait de fait une habitude de vivre ensemble, par-delà les frontières très favorables à la création d’un climat de paix et de concorde au sein des populations.
il est surtout intéressant d’enseigner à la nouvelle génération (devoir de mémoire oblige), que le président Alpha Oumar Konaré a bien été auparavant un vrai pionnier de la communication dans notre pays, à un moment ou il fallait bien avoir de l’audace, de la témérité. Ainsi, il créa la coopérative Jamana spécialisée dans la presse et l’édition. C’est dans cette même structure que nait en 1989, l’hebdomadaire les « Echos », qui allait se révéler comme un vrai journal de combat, quand les revendications pour l’ouverture démocratique se précisèrent. Signataire de la « lettre ouverte au président de la république » qui réclamait l’instauration du multipartisme, personnalité marquante de l’Adema-Association qui vit le jour en 1990, Alpha Oumar Konaré est porté le 26 mai 1991 à la présidence du parti Adema, dont il fut le candidat à la présidence de la république. Il remporta le 26 Avril 1992 les élections avec 69,01% des suffrages du second tour devançant Tiéoulé Mamadou Konaté. Le 8 juin 1992, il espérait être ce président qui a porté l’espérance, mais dix ans plus tard, il reconnaissait avec ce don inné pour les belles et grandes formules que : « face à la force de l’idéal se dresse souvent l’empire de la réalité. »
« Dans les moments de grande confusion, il faut s’abstenir de tout acte qui peut s’interpréter dans un sens ou l’autre. »écrivait Giscard D’Estain, un ancien président français. Le président Konaré a une horreur viscérale de trois choses : l’imposture, les faux-fuyants et la médiocrité. C’est un homme de méthode, d’organisation et de conviction qui considère que si la grandeur d’un homme ne peut résider que dans l’humilité, celle d’un homme d’Etat en revanche est fonction de sa détermination à doter son pays d’institutions fortes et viables. C’est du moins ce que pense un ancien serviteur du président Konaré. Mais le débat s’est-il refermé pour autant ?