Après le chantage exercé sur les éventuels candidats au recrutement du contingent des 15 300 enseignants volontaires, pour l’enseignement fondamental 1 et 2 (premier et second cycle) et pour l’enseignement secondaire pour une durée de 6 mois, les syndicats de l’éducation signataires du 15 octobre 2016 sortent de leur manche une autre arme : l’instrumentalisation des enfants pour perturber les établissements privés en marge de leur mouvement de grève, la forme améliorée du hooliganisme par procuration.
Pour exiger l’application hic et nunc de l’article 39 de la loi N° 2018-007 du 16 janvier 2018, portant statut du personnel de l’enseignement secondaire, de l’enseignement fondamental et de l’éducation préscolaire et spécialisée, les grévistes alternent avec un cynisme lapidifiant trois redoutables stratégies.
La première se nourrit des articles 20 et 21 de la Constitution du 25 Février 1992 : ‘’la liberté syndicale est garantie. Les syndicats exercent leurs activités sans contrainte et sans limite autres que celles prévues par la loi’’ ; ‘’le droit de grève est garanti. Il s’exerce dans le cadre des lois et règlements en vigueur’’. C’est le légalisme qui se manifeste, à travers des marches pacifiques, nonobstant quelques dérapages à l’instar de celle observée le jeudi 13 février où le Premier ministre, chef de la deuxième institution de la République, a été tourné en dérision. Il se manifeste tout autant par l’arrêt de travail dont ils usent et abusent.
Le dialogue est la deuxième stratégie.
« Nous tenons à réaffirmer au gouvernement que nous avons toujours été ouverts au dialogue et entendons rester dans cette dynamique », ont assuré les grévistes. Il faut dire que jusque-là ce dialogue s’avère stérile, s’il ne relève pas d’une séquence truculente d’une vaste comédie.
La troisième stratégie, la plus sournoise, la plus redoutable et la plus abjecte sont l’instrumentalisation des enfants contre d’autres enfants. Le duel qui s’est installé sur fond de machiavélisme entre les syndicats grévistes et le Gouvernement, s’est transporté hier sur le terrain du hooliganisme. Hier matin, au Quartier de Banankabougougou, ce sont des enfants armés de bâtons et de pierres qui ont délogé leurs camarades des établissements privés. Leur furia n’a pas épargné les simples usagers de la route interdits de circulation (sur l’axe qui part de la station Total pour aboutir au tronçon qui va à Wèrèda). Interrogés sur les raisons de leur sortie, des enfants ont répondu : « nous sommes en grève ». A la question posée à un autre groupe : « les enseignants sont en grève, comment se fait-il que vous aussi vous décidiez d’aller en grève ? ». La réponse met en évidence une situation ubuesque : « nous étions en classe ; ils sont arrivés et se sont mis à jeter des pierres pour nous obliger à sortir des classes ». Cette dernière réponse est d’élèves d’une école privée ; donc d’innocentes victimes.
Les assaillants aux allures terrorisantes, dans la quinzaine, étaient visiblement en mission commandée. Parce qu’à ce qu’on sache, il n’y a pas encore de comité AEEM au Fondamental. À ce qu’on sache, il n’y a eu non plus aucun préavis de grève des élèves de l’enseignement fondamental 1 et 2. Alors, pour qui roulent ces élèves jeteurs de pierres victimes expiatoires d’une tragi-comédie hypothéquant leur avenir ?
Une certitude : c’est pouacre d’enferrer l’avenir d’enfants par des grèves légales et d’en faire également les bras armés d’une stratégie qui repose sur le vandalisme totalement illégal cette fois-ci. Sans verser dans l’hyperbole, l’on est désormais face à un terrorisme scolaire.
Qui l’eût cru que le corps qui s’est toujours distingué comme modèle dans la société malienne, par sa conduite probe, puisse sombrer dans une espèce de muflerie ? Désormais, les valeurs sont égrugées par l’âpreté au gain ; l’or pur se transforme en bronze. Autres temps, autres mœurs ! Cette citation de Sonia Lahsaini, enlumine à suffisance la scène qui se joue : ‘’le matériel concrétise un mode de vie, mais ne vous apporte pas la valeur de votre existence’’.