Les jihadistes combattus par les militaires français et leurs partenaires au Sahel bénéficient d'une "forte capacité de régénération", a souligné le chef d'état-major français, le général François Lecointre, lors d'une récente audition au Sénat. "Face à nous, nous avons un ennemi au volume moyen assez faible, mais capable de mobiliser rapidement et ponctuellement des effectifs importants - de l'ordre de la centaine, à moto - pour mener des actions sur des objectifs à forte valeur ajoutée", a-t-il déclaré au sujet du groupe Etat islamique au grand Sahara (EIGS), implanté dans la région dite des "trois frontières" (Mali, Niger, Burkina Faso) et désigné par Paris ennemi numéro un au Sahel.Si l'opération antijihadiste française Barkhane, récemment passée de 4.500 à 5.100 hommes, multiplie les offensives contre l'EIGS ces dernières semaines et lui inflige de lourdes pertes, "la capacité de régénération de ces terroristes est forte", a fait valoir l'officier supérieur pendant cette audition tenue début février et publiée seulement un mois plus tard sur le site du Sénat."Ils sont chez eux, ils instrumentalisent des tensions interethniques, ils recrutent des combattants de plus en plus jeunes", a-t-il affirmé. "La population locale est structurée autour de liens ethniques forts et se sent abandonnée par l'Etat: elle fournit à l'EIGS des jihadistes qui, en enfants du pays, maîtrisent parfaitement le terrain, savent pouvoir se diluer dans les villages et bénéficient du soutien des habitants".Depuis mai 2019, l'EIGS a tué entre 350 et 400 membres des forces de sécurité locales dans la zone des trois frontières, a rappelé le général Lecointre, soulignant que "la principale source d'armes et de véhicules de l'EIGS est le pillage des forces partenaires de la zone des trois frontières"
."Nous nous trouvons dans une situation comparable à celle d'il y a sept ans", date de déclenchement de l'opération française Serval à laquelle l'opération Barkhane a succédé en 2014, "avec la constitution d'une zone géographique homogène dans laquelle renaît une véritable menace terroriste qui occupe un territoire et s'acharne à le vider des forces de sécurité des trois États concernés", a-t-il assuré."A la mi-2014, la menace était résiduelle, à la portée des États de la région", mais depuis, "notre optimisme a été déçu et Barkhane n'a pas été accompagnée d'un retour de l'appareil d'État ni de la refonte efficace des forces armées, notamment maliennes", a déploré le chef d'état-major français."La menace terroriste n'a pas été contenue" mais s'est au contraire étendue au Burkina Faso, "et l'on peut désormais craindre qu'elle ne s'étende rapidement au Sud-Mali, voire au sud de Bamako", a-t-il souligné.