Dans le dernier rapport adressé au Conseil de sécurité par le Groupe d’experts créé en application de la résolution 2374 (2017) du Conseil de sécurité sur le Mali, on note que des progrès ont été enregistrés en matière de désarmement, de démobilisation et de réintégration : 1 330 membres de groupes armés ont achevé le processus accéléré en la matière.
L’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger signé en 2015 peine à être appliqué. Selon le rapport du groupe d’experts, cette lenteur s’explique principalement par la non-tenue de réunions pendant six mois au Comité de suivi de l’Accord et par la nécessité de mener à bien un dialogue national inclusif laborieux. Pour le groupe d’experts, certains faits avaient porté atteinte à la confiance entre les parties. S’agit de l’annulation unilatérale par le gouvernement malien d’une réunion du Comité qui devait se tenir à Kidal. Ce, à la suite des déclarations publiques du Niger selon lesquelles la région était un sanctuaire pour les terroristes et des allusions à une éventuelle révision de l’Accord dans le cadre du dialogue national, qui avait poussé la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) à se retirer, avant de se raviser.
Malgré l’agitation politique qui a entouré l’exécution de l’Accord, indique le document, les parties ont continué de coordonner les mesures prises pour accélérer le désarmement, la démobilisation et la réintégration ainsi que l’intégration de nouveaux membres dans l’armée, dans le cadre de la Commission technique de sécurité du Comité. «Au total, 1 330 membres de groupes armés ont achevé le processus et, en janvier 2020, les premiers bataillons de l’armée malienne reconstituée, forte de plus de 400 hommes, ont commencé à se déployer à Kidal, Tombouctou et Gao. Cependant, l’accélération du désarmement, de la démobilisation et de la réintégration a connu quelques difficultés, comme le peu d’intérêt du Gouvernement à l’égard des membres nouvellement intégrés des Forces armées maliennes, un retard de trois mois dans la publication des décisions officielles d’attribution des grades et des nominations militaires et l’insuffisance du matériel», précise la lettre du groupe d’experts.
Il souligne toutefois que le processus a subi des retards et ne suscite guère d’intérêt. Le 2 septembre, à la cérémonie marquant la fin de la formation de 1 006 des 1 330 membres nouvellement intégrés à l’armée, qui s’est tenue au centre de formation militaire de Bapho, le chef d’état-major de l’armée malienne, le général Keba Sangaré, a annoncé que les 1 006 soldats se verraient accorder une permission de 15 jours, ce à quoi les représentants des groupes armés présents se sont opposés, estimant qu’elle entraînerait la dispersion des troupes et créerait de nouveaux risques.
Pendant plusieurs mois, poursuit le même document, les 1 006 nouveaux membres de l’armée malienne ont été abandonnés à eux-mêmes. Beaucoup sont restés chez des proches à Bamako, mais d’autres n’ont eu d’autre choix que de réintégrer leur lieu d’origine dans le nord. Plus de 20 personnes auraient été enlevées le 4 septembre dans un car public entre Douentza et Hombori alors qu’elles se rendaient à Gao, moins de 10 jours après avoir achevé leur formation. Les appels répétés des groupes armés à l’état-major des forces armées n’ont pas été suivis d’effet. On ignore à ce jour où se trouvent ces personnes qui auraient été enlevées. Quatre membres de l’armée nouvellement intégrés ont été arrêtés par des agents de la sécurité du Burkina Faso alors qu’ils traversaient la frontière. Ils sont détenus à la prison centrale de Ouagadougou, en attendant l’ouverture d’une enquête.
Sous un autre chapitre, pour le groupe d’experts, le regain de violence transfrontalière et la recrudescence des attaques contre les forces nationales de sécurité et de défense au Niger et au Burkina Faso, suscitées par un dispositif de sécurité défaillant du côté malien de la frontière, ont poussé à bout la patience des pays voisins et des institutions régionales à l’égard des protagonistes, comme l’indiquent les déclarations faites en septembre sur le statut de Kidal par le Président du Niger, Mahamadou Issoufou, et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest. Cependant, souligne le groupe d’experts, au Mali, l’équilibre des pouvoirs entre les groupes armés signataires et les groupes armés coopérant à l’application de l’Accord a considérablement changé en 2019. Comme décrit en détail dans le rapport final le plus récent du Groupe d’experts (S/2019/636), les chefs des principaux groupes armés du nord du Mali se sont réunis à Bamako à l’initiative du général El Hadji Ag Gamou des Forces armées maliennes, commandant militaire de fait du Groupe d’autodéfense des Touaregs Imghad et leurs alliés (GATIA), pour former une large alliance destinée à combattre le terrorisme et à reprendre le contrôle du terrain perdu d’abord face au Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans et ensuite à la « Province d’Afrique de l’Ouest de l’État.