SociétéLe directeur de l’AGETIPE-Mali à propos du contentieux avec le cabinet « AAU » : “Le Consultant Malick Badra Sow a fait du faux et usé de faux pour nous condamner”
“Comment peut-on payer 305 609 804 Fcfa au titre de réclamation pour un contrat de 265 642 800 Fcfa ? “
Le directeur général de l’Agetipe-Mali, Boubacar Sow, n’arrive pas à comprendre la décision du Tribunal de Commerce de Bamako condamnant sa structure à payer 305 609 804 Fcfa et 50 millions de Fcfa de dommages-intérêts au Consultant “Atelier d’Architecture et d’Urbanisme” dans le cadre du contentieux sur le marché de construction du Monument du Cinquantenaire. Suite à cette condamnation, les comptes bancaires de l’Agetipe-Mali sont saisis. Et pourtant, Boubacar Sow accuse le Consultant AAU, Malick Badra Sow, d’user de “faux et usage de faux” pour gagner ce procès.
e contentieux judiciaire opposant l’Agence d’exécution des travaux d’intérêt public pour l’Emploi (Agetipe-Mali) et le Consultant «Atelier d’Architecture et d’Urbanisme (AAU)» concernant le projet de construction du Monument et d’Aménagement de la Place du Cinquantenaire à Bamako, continue de défrayer la chronique dans les milieux judiciaires.
Notre article intitulé : “Suite à une condamnation à payer 305 609 804 Fcfa : les comptes bancaires de l’Agetipe-Mali saisis par le Cabinet AAU”, paru dans le N° 208 du vendredi 20 mars 2020, a suscité beaucoup de bruits. De ce fait, le directeur général de l’Agetipe-Mali, Boubacar Sow, nous a reçus dans son bureau afin de nous fournir des éclairages sur ce dossier qui remonte à 2012.
“Sincèrement, nous avons été surpris de voir dans la presse la condamnation et la saisie des comptes bancaires de l’Agetipe-Mali concernant le contentieux avec le Consultant “AAU” Malick Badra Sow, qui est d’ailleurs l’un de nos partenaires. Mais dans ce dossier, nous sommes convaincus qu’il n’a pas raison. Après nous avoir fait condamner par le tribunal, nos comptes bancaires ont été également saisis, alors que nos comptes sont insaisissables au regard de nos textes. Ce qui nous a créé d’énormes difficultés vis-à-vis de certains de nos partenaires stratégiques qui ont eu peur.
Mais moi, je suis croyant. Je remets tout à Dieu puisque Dieu est juste. Je continuerai à me battre avec nos maigres moyens. Pour moi, chaque jour est un combat à gagner. Je respecte trop la justice malienne, mais je pense que cette justice doit encore faire des efforts pour dire le droit, rien que le droit”, nous a confié, d’emblée, Boubacar Sow qui avait sous la main tous les documents relatifs audit marché.
De quoi s’agit ?
En fait, dans le cadre de la célébration des 50 Ans de l’Indépendance du Mali, les plus hautes autorités ont décidé de construire un Monument sur la Place du Cinquantenaire avec un projet d’aménagement. C’est ainsi que le Ministère du Logement, des Affaires foncières et de l’Urbanisme, en sa qualité de Maître d’Ouvrage, a confié à l’Agetipe-Mali la réalisation de ce projet.
Il s’agit de la réalisation de la place du Cinquantenaire sur la berge gauche du fleuve Niger, dans le prolongement de l’Avenue de l’Indépendance et la réalisation du Monument du Cinquantenaire. Et la Convention de Maitre d’ouvrage délégué avait été signée le 31 mai 2010 sur la base d’une provision de 800 millions de Fcfa. Et à l’époque, Boubacar Sow n’était pas encore directeur de l’Agetipe-Mali. Il a été nommé en 2012.
Pour la réalisation de cet ouvrage, l’Agetipe-Mali a signé plusieurs contrats de prestations. Il s’agit d’un contrat d’étude technique, contrôle et surveillance des travaux d’aménagement de la place du Cinquantenaire avec le Consultant CIRA pour un montant de 191 750 000 Fcfa.
Le dossier
d’appel d’offres n’a pas été exécuté
Pour le Consultant “AAU”, il s’agit d’un contrat d’étude technique, contrôle et surveillance des travaux de réalisation du Monument du Cinquantenaire pour un montant de 265 642 800 Fcfa. Et le contrat devrait être exécuté en différentes phases, notamment une phase dédiée aux Etudes techniques pour 138 226 000 Fcfa y compris la confection de la maquette du Monument et une autre phase dédiée à la surveillance et au contrôle des travaux pour 127 416 800 Fcfa.
Ainsi, pour la phase Etudes, le montant des études préliminaires, d’un montant de 24 400 000 Fcfa a été payé dès la signature du contrat. Après l’exécution de l’APS (Avant-Projet-Sommaire) l’Agetipe-Mali lui a payé 28 657 800 Fcfa, soit 30% du montant global et 47 763 000 Fcfa soit 50% du montant, après l’APD (Avant-Projet Détaillé).
Une somme de 19 105 200 Fcfa, soit 20% du montant devrait être payé après l’approbation du Dossier d’Appels d’Offres (DAO). Malheureusement, ce document n’a jamais été validé par l’Agetipe-Mali. C’est là où tout le contentieux a commencé entre l’Agetipe-Mali et le Consultant “AAU”.
“Dans le contrat, les deux phases sont distinctement définies, notamment en ce qui concerne le calendrier de paiement pour chacune des phases. Pour ce faire, il existe une disposition très explicite qui conditionne la poursuite de la phase surveillance et contrôle des travaux à une évaluation satisfaisante de la phase Etude. Ce qui signifie qu’il n’y aura pas de phase surveillance et contrôle des travaux tant que les études techniques jusqu’au dossier d’appels d’offres n’ont pas été achevées à la satisfaction de l’Agetipe-Mali. C’est dire que les études doivent à chaque étape être soumises à validation et sans cette validation, aucun paiement ne pourrait être effectué pour le compte du Consultant AAU”, précise le directeur général de l’Agetipe-Mali. Avant de rappeler : “Conformément aux dispositions contractuelles relatives au calendrier de paiement convenu, le point d’exécution des études techniques donnant droit au paiement au Consultant AAU se résume comme suit : Validation des études préliminaires effectuée le 6 octobre 2010 ; validation de l’APS corrigé effectuée le 14 janvier 2011 et dépôt de l’APD provisoire effectué le 26 janvier 2011 dont la validation a été programmée le 15 février 2011.
Pour ces prestations, le Consultant AAU a droit au paiement de 100 820 800 Fcfa. Sur ce montant, revenant de droit au Consultant AAU, il lui a été payé 23 180 000 Fcfa conformément à sa facture N°1 du 14 septembre 2010. Ce paiement a été fait par chèque N°0215161 du 17 septembre 2010 d’un montant de 19 644 068 Fcfa et un prélèvement à la source de la TVA de 3 535 932 Fcfa.
Le consultant a également produit une caution d’avance de démarrage de 20 millions de Fcfa qui lui a été payée. C’est pour vous dire qu’il a perçu 43 180 000 Fcfa sur la somme globale de 100 820 800 Fcfa pour la phase des études techniques”.
Aux dires du directeur général de l’Agetipe-Mali, “la somme reliquataire de 57 640 800 Fcfa devrait lui être payée pour l’ensemble des prestations que le Consultant AAU a réellement exécuté dans le cadre du contrat qui le lie à l’Agetipe-Mali. Toute autre demande en dehors de ce montant pourrait et devrait être qualifiée d’un enrichissement sans cause”.
L’Agetipe-Mali condamnée par le Tribunal du Commerce sur du “faux”
Le hic est que l’Agetipe-Mali a été condamnée par le tribunal de Commerce de Bamako lors de son jugement du 30 octobre 2019 à payer 305 609 804 Fcfa soit le montant total du marché au Consultant AAU, plus 50 millions Fcfa de dommages-intérêts, avec l’exécution provisoire de cette décision.
Le directeur général de l’Agetipe-Mali, Boubacar Sow, a été très surpris d’une telle décision du tribunal de Commerce. “Comment peut-on payer 305 609 804 Fcfa au titre de sa réclamation, alors que le montant global de son contrat fait 265 642 800 Fcfa ? Il est évident que le Consultant AAU veut à tout prix et par tous les moyens s’enrichir illicitement en réclamant une telle somme qui dépasse le montant de son contrat qui, d’ailleurs, n’a été exécuté que partiellement”, dira-t-il avant de rappeler un autre point très important.
“A titre de rappel, le Consultant AAU avait donné plein pouvoir à Mali Créances -sa aux fins de recouvrement de sa créance d’un montant de 105 493 400 Fcfa représentant la somme que l’Agetipe-Mali lui devait au titre de son contrat à travers la lettre référence : 307/18-DGA du 1er août 2018. En comparant le montant réclamé dans son assignation du 16 avril 2019 qui est de 305 609 804 Fcfa et le montant réclamé par Mali-Créances qui est de 105 493 400 Fcfa, on est en droit de se demander la moralité de sa créance. Elle est plus que douteuse car allant du simple au double”, nous a précisé le directeur général, Boubacar Sow, avec beaucoup de regrets. Il précise qu’en tout et pour tout, l’Agetipe-Mali doit au Consultant AAU environ 57 millions de Fcfa.
Avec cette condamnation, tous les comptes de l’Agetipe-Mali ont été saisis au niveau des banques. Cela a créé d’énormes préjudices.