Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Annonces    Femmes    Nécrologie    Publicité
NEWS
Comment

Accueil
News
Santé
Article
Santé

Coronavirus. « Un défi de plus » pour les réfugiés du Sahel
Publié le mardi 7 avril 2020  |  Ouest-France
Les
© Autre presse par DR
Les déplacés du centre qui sont réfugiés dans un campement à Senou
Les déplacés qui ont fui les violences du centre pour se réfugier dans un campement à Senou.
Comment


L’Afrique lutte comme elle peut face à la propagation du Covid-19. Dans la région du Sahel, déjà meurtrie par les attaques des djihadistes, la possible apparition du coronavirus dans les camps de réfugiés pourrait déclencher une catastrophe sanitaire sans précédent.

« Si on a le coronavirus au camp, ça va être une catastrophe. » Hamadoun Boukary Barry s’alarme à l’idée que le Covid-19 s’insinue dans le camp de Bamako, au Mali, où lui et vingt-trois membres de sa famille vivent depuis qu’ils ont fui la guerre.
Ce grand-père à la barbe blanche et au large boubou qui a fui la région de Bankass, au centre du pays, avec les siens il y a un an, a des raisons de s’inquiéter : les camps de réfugiés et de personnes déplacées par les conflits ou les persécutions accueillent parmi les populations les plus vulnérables de la planète. A fortiori ici, au Sahel, dans l’une des régions les plus pauvres du monde.
« Regardez, on dort tous là », dit-il en montrant l’entrée de sa tente. À l’intérieur, un seul matelas et quelques casseroles. « Imaginez si une personne dans la famille l’attrape. »
Ils sont, comme lui, un million à avoir dû tout quitter sous l’effet de la crise profonde qui agite le Sahel central depuis huit ans.

Des groupes djihadistes y sèment la terreur. Ils se sont d’abord mêlés à des rébellions préexistantes dans le nord du Mali, puis ont évincé les indépendantistes et se sont implantés au Burkina Faso et au Niger voisins.
Ils embrigadent sur le terreau fertile du sentiment d’abandon, répandu dans certaines ethnies, et de l’impuissance et des exactions imputées à des armées faibles. Le banditisme et les éruptions de violence entre communautés alimentent le cycle de la terreur.
Les civils n’ont d’autre choix que de prendre la route pour se réfugier dans les villes avoisinantes ou pour passer la frontière si elle est proche. Ils vivent dans des camps de fortune, dépendant des aides. L’eau est rare, les moyens sanitaires limités, la nourriture arrive par lots.
« Utilisez votre turban ! »

Le coronavirus, « c’est un défi de plus, et beaucoup n’arrivent pas à comprendre même ce qu’est le coronavirus », s’alarme Ibrahima Sarré, travailleur humanitaire dans le camp de déplacés de Sénou, à quelques kilomètres de l’aéroport de Bamako.
Il n’y a dans les trois camps de déplacés de la capitale malienne ni masques, ni gants, juste quelques kits de lavage des mains donnés par une association, qui profite de la distribution pour sensibiliser aux gestes barrières.
« Utilisez votre turban ! », lance Kola Cissé, membre de l’association peul Pinal-Pulakuu, à l’assemblée réunie. « Tous les déplacés en ont un, c’est notre culture peul. Et comme ils n’ont pas les moyens d’acheter une boîte de masques à 25 000 francs (38 €) à la pharmacie, c’est un bon moyen », précise-t-il.
Le Mali a déclaré quarante-sept cas de contamination et cinq décès ; le Burkina, 364 cas et dix-huit décès ; le Niger, 253 cas et dix décès.
Pour l’heure, aucun cas de Covid-19 n’a encore été déclaré officiellement parmi les déplacés au Sahel.
Mais, dans des camps où s’agglutinent des centaines, voire des milliers de personnes, les deux humanitaires reconnaissent que faire appliquer les gestes barrières, c’est compliqué. « C’est très difficile de faire de la distanciation quand on vit dans une tente de cinq mètres carrés à treize ou quinze personnes », soupire Ibrahima Sarré.
« Comment pouvons-nous demander aux gens de se protéger quand ils n’ont pas facilement accès à l’eau ? », renchérit Jamal Mrrouch, chef de mission de l’ONG Médecins sans frontières. Les déplacés « peuvent être extrêmement menacés », prévient-il.
Au Burkina, le maire de Kaya, Boukari Ouedraogo, veut croire que la mise en quarantaine d’un certain nombre de villes « peut préserver » la sienne, où 50 000 déplacés ont trouvé refuge.
Action humanitaire entravée

On n’accède aux sites de déplacés de Kaya qu’après avoir pris sa température et s’être lavé les mains et des masques ont été distribués à tous dans les camps, assure-t-il.
Mais au Burkina et ailleurs, les mesures anti-coronavirus, conjuguées à la protection des personnels, compliquent et ralentissent l’action humanitaire.
Les missions sont « très très limitées » depuis la capitale Ouagadougou, explique Moussa Bougma, chargé de communication au Haut-commissariat aux réfugiés (HCR) de l’ONU.
La « menace du Covid-19 met en péril le travail humanitaire » alors que ce million de réfugiés dépend « désormais presque entièrement de l’aide extérieure pour survivre », corrobore l’ONU.
À Bamako, le vieux Hamadoun Boukary Barry en appelle à la compassion internationale : « Il faut que l’humanité soit unie, qu’on nous aide, que Dieu nous aide. »
Dans une tente, une jeune femme tousse et peine à respirer. Les humanitaires appellent le numéro vert mis en place par les autorités. On leur demande de l’amener au centre de santé. Les tests diagnostiquent finalement une crise d’asthme et un ouf de soulagement parcourt le camp.
Coronavirus. « Un défi de plus » pour les réfugiés du Sahel

source Ouest France
Commentaires