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Au Mali, un président par la grâce de Dieu
Publié le mardi 13 aout 2013  |  Autre presse


© Partis Politiques par DR
Présidentielle 2013 : Le candidat IBK en campagne à Abidjan
Juillet 2013. Côte d`Ivoire. Le candidat IBK à la rencontre des Maliens de Côte d`Ivoire.


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Je vote pour IBK parce que c'est le meilleur musulman », explique Aminata, une jeune femme qui vient de glisser son bulletin de vote dans l'urne d'une commune de Bamako. Étudiante en droit, Aminata porte un léger voile noir, elle n'a rien d'une extrémiste religieuse, mais elle considère que la pratique de l'islam est un élément essentiel dans le choix du président du Mali, pays à 95% musulman. « IBK est très pratiquant. Il émaille ses discours de sourates et termine ses phrases en disant Inch Allah », se réjouit Aminata. Au fur à mesure de la campagne qui a mené au deuxième tour du 11 août, son discours est devenu de plus en plus religieux. Un des parents d'Aminata ajoute que « l'élection du président est un événement capital, mais qu'il reste néanmoins beaucoup moins important que le ramadan qui vient de s'achever ».

A deux pas du bureau de vote, les assesseurs ont installé leurs tapis de prière à même la latérite, une terre battue de couleur rouge. Ils se relaient régulièrement auprès des urnes afin de continuer à honorer Allah pendant l'élection. Dès le premier tour, IBK - Ibrahim Boubacar Keïta - avait remporté 39% des suffrages. « Son succès, il le doit clairement au vote religieux et aux consignes données par les chefs spirituels, explique Aliou Badara Diarra, directeur de l'hebdomadaire L'enquêteur. Au Mali, un homme politique ne peut pas mobiliser plus de 3.000 personnes, mais un leader religieux met facilement 200 à 300.000 personnes dans la rue. Ici les vrais leaders ce sont les chefs religieux ».

« L'homme pieux »

Dans le QG de campagne d'IBK au soir de la victoire, tout le monde reconnait que le succès a été en grande partie bâti grâce au soutien des religieux. « Au moins 10 % des électeurs se prononcent en fonction des consignes de vote des chefs religieux. Ça a beaucoup aidé notre candidat même si ce n'est pas la seule raison de son succès », selon Fatoumata Traoré, l'une des responsables de sa campagne. Un autre de ses partisans, Cissé, étudiant en gestion, note qu'IBK a su faire preuve des valeurs que l'on associe à « l'homme pieux ». « IBK s'est montré modeste. Il n'a cessé de répéter que tout était entre les mains de Dieu, un discours qui a plu, notamment dans les milieux populaires ».

Entre les deux tours, son adversaire Soumaïla Cissé a dénoncé cette stratégie en affirmant qu'il était dangereux d'instrumentaliser la religion et qu'il était, lui même « un aussi bon musulman qu'IBK ». Afin de le prouver, Soumaïla Cissé s'est mis à réciter des sourates dans ses discours de l'entre-deux-tours. « Peine perdue, il était trop tard. Il n'a pas perçu suffisamment rapidement le poids de la religion sur cette élection », souligne l'écrivain bamakois Serge Daniel. « Avec la crise économique qui frappe le Mali depuis la guerre et l'occupation du nord du pays par les djihadistes, on a assisté à un retour très fort de la religion dans le champ politique », explique la militante altermondialiste Aminata Traoré.

Même les proches d'IBK admettent qu'il s'agit plus d'une stratégie électorale habile que d'une réelle obsession religieuse. « IBK aime le bon vin, les voitures de luxe et les belles montres. Il n'a rien d'un fanatique religieux », souligne l'un d'entre eux qui rappelle qu'il a longtemps fait partie de l'Internationale socialiste. Cet ex- Premier ministre et ex-étudiant à la Sorbonne est très apprécié au quai d'Orsay. « La France en a fait son candidat, c'est clair », souligne un diplomate européen. D'ailleurs IBK na de cesse de parler publiquement de son « ami Laurent Fabius ».

Soutenu par la France, par les militaires maliens, notamment les ex-putschistes du capitaine Sanogo, il a aussi réussi à obtenir le soutien du Mahmoud Dicko, président du haut conseil islamique du Mali et représentant le plus en vue de la tendance wahabite à Bamako. Un ami de longue date d'IBK.

« Bamako vaut bien une sourate »

« IBK est un homme très pragmatique. Il s'est dit : si Paris vaut bien une messe, Bamako vaut bien une sourate », s'amuse un de ces proches qui compte aussi sur les miracles de la religion pour aider les Maliens à faire preuve de patience. « Au Mali, il faut tout reconstruire, il n'y a plus d'Etat, plus d'armée, plus d'économie. Le Nord du pays est en lambeaux depuis qu'il a été occupé par les islamistes. Il faudra du temps. Seule la religion apprend à attendre tranquillement et pacifiquement que les changements se mettent en place ».

Parmi les soutiens d'IBK, des islamistes radicaux réclament une remise en cause de la laïcité de l'Etat. « Ils souhaitent que l'Etat puisse aider à la construction de mosquées. Que l'arabe soit désormais considéré comme une langue officielle qui permette de rentrer dans la fonction publique. Ils veulent aussi que les droits des femmes diminuent », s'inquiète Aïssata, une enseignante bamakoise. Pourtant, il est peu probable qu'il cède trop de pouvoir aux radicaux. « IBK n'a pas été élu seulement grâce aux religieux. Il a aussi été très fortement soutenu par la France. Paris va garder une grande influence sur la vie politique du pays, analyse un diplomate occidental. Jamais la France n'acceptera une remise en cause brutale de la laïcité ».

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